Depuis plusieurs jours, la crise humanitaire qui touche les indigènes Yanomami au Brésil émeut le pays tout entier. Des centaines d’enfants souffrent de malnutrition, causée en partie par la destruction de leur territoire due à l'exploitation minière illégale.
Quelques semaines à peine après le début de son mandat, le nouveau président du Brésil Lula fait face à une grave crise humanitaire. Sa ministre des peuples indigènes, Sonia Guajajara, a tiré la sonnette d’alarme concernant les indigènes Yanomami, qui souffrent de la famine et de maladies graves, notamment les enfants. Une situation alarmante, qui découle de l'exploitation minière illégale de leur territoire.
Qui sont les indigènes Yanomami ?
Les indigènes Yanomami vivent au nord de l’Amazonie, dans la région de la frontière entre le Brésil et le Venezuela. Ce peuple serait arrivé en Amérique du Sud il y a plus de 15.000 ans, selon certaines estimations.
Selon le ministère brésilien de la Santé, environ 30.000 indigènes Yanomami vivraient dans les États de Roraima et Amazonas et au Venezuela voisin, dont 5.000 enfants.
Au Brésil, leur territoire, censé être inviolable et protégé, s’étend sur environ 9 millions d’hectares, entre forêts et montagnes.
Que s’est-il passé ?
Le 20 janvier dernier, la nouvelle ministre des peuples indigènes, Sonia Guajajara, a publié des messages d’alerte sur la situation grave des indigènes Yanomami. Selon son ministère, créé à l'arrivée de Lula au pouvoir, 570 d’entre eux sont morts de malnutrition au cours des quatre dernières années, qui correspondent à la période du mandat de Jair Bolsonaro.
La ministre brésilienne de la Santé, Nísia Trindade, a ajouté que trois enfants Yanomami sont décédés entre le 24 et le 27 décembre 2022, et a dénombré 11.530 cas de paludisme. En 2022, 99 enfants de moins de 5 ans, dont 67 de moins d’un an, sont morts au sein de la communauté.
«Nos équipes sont confrontées à des personnes âgées dans un état de santé grave, avec une malnutrition sévère, en plus de nombreux cas de paludisme, d’infection respiratoire aiguë, et d’autres maladies», a déclaré la ministre de la Santé.
«Le problème n'a pas commencé maintenant, il remonte à loin. Nous disposons de données indiquant que, toutes les 72 heures, un enfant ou un aîné Yanomami meurt de malnutrition, de diarrhée ou de la malaria.», a-t-elle ajouté.
Le président de la Commission sénatoriale des droits de l’Homme, Humberto Costa, a publié ses photographies édifiantes sur les réseaux sociaux, montrant des enfants en état de malnutrition sévère. «Les images de ce qui se passe dans le territoire des Yanomami sont effroyables. Elles nous révèlent le visage le plus cruel d'un gouvernement génocidaire qui, depuis quatre ans qu'il est au pouvoir, a pris l'habitude de laisser mourir les Brésiliens qu'il était censé protéger», a-t-il dénoncé.
Quelles sont les causes ?
Les indigènes Yanomami vivent de la cueillette, de la chasse et de la pêche, et disposent de grandes connaissances sur la faune et la flore qui les entourent. Cependant, leurs capacités de subsistance sont mises en péril par la contamination de l’eau et des sols, et à la disparition du gibier dues à l’exploitation minière illégale de leur territoire.
En effet, bien que leur territoire soit supposé être protégé et inviolable, les chefs Yanomami ont estimé qu’environ 20.000 chercheurs d’or et mineurs clandestins ont envahi leurs terres, contaminant leurs rivières avec du mercure, utilisé pour séparer l’or des sédiments. Ils ont également affirmé que les femmes et enfants indigènes sont régulièrement victimes d’abus sexuels, et les hommes tués par les mineurs.
Vivant dans des zones reculées, leur accès au système de santé reste limité, ce qui explique également la prolifération d’infections et diverses maladies.
De nombreux responsables politiques de l'administration Lula dénonce les politiques de ceux qui les ont précédés, au sein du gouvernement de Jair Bolsonaro, qui aurait favorisé l'exploitation minière et la déforestation au détriment des populations autochtones.
Quelles réponses du gouvernement ?
Après la mise en garde de la ministre des peuples indigènes, le gouvernement de Lula, qui avait promis de protéger les populations autochtones s’il était élu, a engagé plusieurs mesures d’urgence.
Tout d’abord, le chef de l’État s’est rendu samedi à Boa Vista, dans l’État de Roraima où se trouve une partie du territoire Yanomami, à la rencontre des indigènes. Il y a annoncé la construction d’un hôpital de campagne dont le chantier a démarré mardi 24 janvier. Cet hôpital pourra accueillir et 715 indigènes, et fonctionnera grâce à 13 professionnels de la Force nationale du système de santé unifié (SUS), un programme de coopération sanitaire qui agit quand les capacités d’aide de l’État sont insuffisantes. L’hôpital devrait être opérationnel vendredi 27 janvier, selon le gouvernement. Il incite par ailleurs les volontaires à s’inscrire pour participer à l’effort de la Force nationale du SUS, qui a déjà reçu plus de 33.000 candidatures au mercredi 25 janvier.
Le ministère de la Santé a également déclaré l’état d’urgence sanitaire dans les territoires Yanomami. Le gouvernement a déjà envoyé 5.000 paniers alimentaires, soit un total estimé de 80 tonnes de denrées, selon un communiqué du gouvernement. Environ 200 boîtes de compléments alimentaires pour les enfants doivent être acheminées, ainsi que du matériel médical.
Flavio Dino, le ministre de la Justice, a également demandé l’ouverture d’une enquête «sur les crimes de génocide, l’omission d’aide et secours, les crimes environnementaux», a-t-il déclaré lundi dernier. Flavio Dino a également déclaré que les agents publics, anciens ministres et responsables de santé pourront faire l’objet d’une enquête sur leurs actions – et surtout leurs omissions – pour secourir ce peuple autochtone.