A quelques mois de l'échéance du Brexit, la Première ministre britannique Theresa May a averti lundi que ce serait son plan ou rien, à l'adresse de son parti divisé et des milieux économiques inquiets des nouvelles prédictions du Fonds monétaire international.
Avec ce plan dit «de Chequers», Mme May propose le maintien d'une relation commerciale étroite avec l'UE après le divorce, prévu le 29 mars, grâce à la mise en place d'une zone de libre-échange pour les biens industriels et les produits agricoles. Il serait en revanche mis fin à la liberté de circulation des citoyens européens et au contrôle de la Cour de justice de l'UE. Ce projet est combattu au sein de son propre Parti conservateur, depuis qu'il a été annoncé en juillet, par les partisans d'une rupture nette avec Bruxelles, et suscite jusqu'ici le scepticisme des dirigeants européens.
Theresa may «optimiste»
«Je pense que nous aurons un bon accord» avec Bruxelles, a estimé Mme May dans un entretien avec la BBC qui sera diffusé en intégralité lundi soir. «Je pense que l'alternative sera l'absence d'accord», synonyme de la fin de l'accès privilégié au marché européen, a-t-elle ajouté. Une éventualité qui inquiète les milieux d'affaires, et aurait des coûts «importants» pour l'économie britannique, a prévenu la directrice générale du FMI Christine Lagarde, venue présenter à Londres son dernier rapport sur le Royaume-Uni.
«Nous encourageons le Royaume-Uni et l'UE à travailler avec assiduité» pour éviter un divorce brutal, qui pèserait sur la croissance et les finances publiques britanniques et entraînerait une dépréciation de la devise du pays, a-t-elle ajouté, soulignant que «le peu de temps qu'il reste pour conclure un accord est très problématique», même si elle reste «optimiste».
Le Brexit sera au menu d'un sommet informel européen jeudi à Salzbourg, en Autriche, qui assure la présidence tournante de l'UE. Lundi, le chancelier autrichien Sebastian Kurz a affirmé que «tout le monde est d'accord pour tout faire pour éviter un Brexit dur», c'est à dire sans accord.
A ses côtés, le président français Emmanuel Macron a estimé que «l'essentiel était d'arriver à un accord, que les règles de cohésion et de protection de l'Europe, de son marché unique, soient totalement préservées, tout en permettant au Royaume-Uni de respecter le vote de sa population» qui a choisi le Brexit par référendum. Des deux côtés, on dit espérer aboutir à un accord lors du sommet des 18 et 19 octobre à Bruxelles ou au plus tard début novembre.
Quelques questions en suspens
Mais la question de la frontière entre la province britannique d'Irlande du Nord et la République d'Irlande, membre de l'UE, dont ni Londres ni Bruxelles ne souhaitent le retour, reste particulièrement problématique. Pour faire avancer les discussions, Mme May a accepté en décembre l'introduction d'un «backstop» (ou «filet de sécurité») qui maintiendrait l'Irlande du Nord au sein de l'union douanière et du marché unique européens, faute d'autre solution. «Une abomination constitutionnelle», a dénoncé son ex-ministre des Affaires étrangères Boris Johnson, à l'unisson des Brexiters purs et durs.
Selon des médias britanniques lundi, l'UE serait toutefois prête à faire avancer sa position en permettant par exemple à des douaniers britanniques d'opérer à la place des Européens. «Michel Barnier (le négociateur en chef de l'UE) a dit en public, il me semble, qu'il souhaitait dédramatiser cette question du «'backstop'», a réagi le porte-parole de Theresa May lors d'un point presse régulier, soulignant cependant «avoir lu beaucoup de choses ces derniers jours dont pas mal étaient contradictoires».
En cas d'accord, celui-ci devra encore être approuvé par le Parlement britannique où Mme May ne dispose que d'une très courte majorité, ainsi que par les parlements des 27 pays de l'UE et le Parlement européen. Le Parti travailliste, principal parti d'opposition britannique, a déjà averti qu'il voterait contre tout accord sur la base du plan proposé par Theresa May.