Le plan de Theresa May pour le Brexit place «une veste-suicide» sur le Royaume-Uni, le détonateur ayant été remis à l'UE, a dénoncé dimanche l'ex-ministre britannique des Affaires étrangères Boris Johnson, exposant une nouvelle fois les divisions du Parti conservateur sur le Brexit.
M. Johnson, potentiel challenger de la Première ministre conservatrice, avait claqué en juillet la porte du gouvernement pour marquer son désaccord avec le «plan de Chequers» proposé par Theresa May, qui prévoit le maintien d'une relation commerciale étroite entre le Royaume-Uni et l'UE après le Brexit, prévu le 29 mars.
Avec ces propositions, la cheffe du gouvernement a provoqué la fureur des partisans d'un Brexit «pur et dur», mais aussi le scepticisme des dirigeants de l'UE, qui ont mis en doute la viabilité de ce plan.
«Nous avons placé une veste-suicide sur la constitution britannique - et donné le détonateur à Michel Barnier», le négociateur en chef de l'UE, a soutenu Boris Johnson dans une tribune publiée dans le Mail on Sunday. «Nous lui avons donné un pied-de-biche avec lequel Bruxelles peut choisir - à tout moment - de séparer le Royaume-Uni et l'Irlande du Nord».
Il a regretté que le Royaume-Uni adopte une attitude de «béni-oui-oui» face à l'UE.
«Jusqu'ici, à chaque étape des discussions, Bruxelles obtient ce que Bruxelles veut. Nous avons accepté le calendrier de l'UE; nous avons accepté de remettre 39 milliards de livres, sans rien obtenir en retour», a-t-il regretté, faisant référence à la facture du divorce.
«Maintenant, avec la proposition de Chequers, nous sommes prêts à accepter leurs règles - pour toujours - sans avoir un mot à dire sur ces règles», a-t-il poursuivi. «C'est une humiliation».
Boris Johnson a également dénoncé comme une «folie» la solution de «backstop» (ou «filet de sécurité») qui maintiendrait la province britannique d'Irlande du Nord au sein de l'union douanière et du marché unique européens, faute d'autre solution pour empêcher le rétablissement de contrôles frontaliers avec l'Irlande, membre de l'UE, après le Brexit.
Ces propos incendiaires ont choqué jusqu'au sein de son propre camp conservateur, le secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères Alan Duncan estimant sur Twitter qu'ils constituent «un des moments les plus navrants de la politique moderne britannique» et signent «la fin politique de Boris Johnson».
Le président de la commission des Affaires étrangères de la chambre des Communes, Tom Tugendhat, qui a servi en Afghanistan où il a été confronté à un attentat-suicide, a également tweeté : «Le carnage était répugnant (...) Comparer la Première ministre à cela n'est pas drôle».
Autre signe des profondes divisions sur le Brexit agitant le Parti conservateur, le ministre des Affaires étrangères Jeremy Hunt a appelé à l'unité derrière Theresa May.
«Personne d'autre n'a de plan détaillé permettant à la fois de respecter les instructions du peuple britannique», qui a voté en faveur du Brexit en 2016, «et de réussir les négociations», a-t-il souligné dans le Mail on Sunday.
Certains commentateurs au Royaume-Uni voyaient dimanche dans cette nouvelle sortie de Boris Johnson, qui multiplie les critiques à l'encontre de la stratégie de Mme May, une tentative de détourner l'attention portée par la presse britannique à son divorce d'avec sa femme de 25 ans.
Plusieurs journaux publiaient dimanche des détails sur ses infidélités présumées de l'ex-ministre, qui proviendraient d'un dossier monté par l'équipe de Theresa May en 2016 alors qu'elle l'affrontait pour prendre la tête du Parti conservateur. Downing Street a démenti les avoir fait circuler pour le discréditer.