Le «Titre 42», un dispositif mis en place aux États-Unis pendant la pandémie de Covid-19, a pris fin ce jeudi 11 mai à minuit, et fait craindre aux autorités un afflux massif de migrants à la frontière avec le Mexique.
Les autorités frontalières américaines sont aux aguets, ce vendredi 12 mai, en raison de l’expiration du «Titre 42». Ce dispositif avait été mis en place en 2020, au début de la pandémie de Covid-19, alors que Donald Trump était encore président des États-Unis. Le but : lutter contre la propagation du virus via la mise en place de mesures très strictes concernant les entrées sur le territoire américain.
Quelles étaient les mesures du Titre 42 ?
Au début de la pandémie de Covid-19, les Centres américains de contrôle et de prévention des maladies (CDC) ont déclaré qu’il était absolument nécessaire de limiter les afflux de migrants aux États-Unis pour endiguer la propagation du virus au sein des centres de détention, alors surpeuplés.
Le Titre 42 a donc permis aux agents frontaliers d’expulser beaucoup plus rapidement et facilement les migrants qui traversaient la frontière vers le Mexique. Ce dispositif rendait aussi quasiment impossible le dépôt d’une demande d’asile aux États-Unis.
Une politique migratoire extrême que Joe Biden avait promis de changer lorsqu’il était arrivé au pouvoir, mais a finalement laissé le Titre 42 en place jusqu’à présent. Selon le service américain des douanes, environ 2,8 millions de personnes ont été expulsées de l’autre côté de la frontière sud en vertu de ce dispositif, censé lutter contre la propagation du Covid-19.
Pourquoi ce dispositif prend-il fin ?
Le Titre 42 n’était cependant qu’un dispositif temporaire. Il a expiré ce jeudi 11 mai à 23h59, heure de Washington. Cette fin coïncide en réalité avec celle de l’état d’urgence sanitaire qui avait été décrété aux États-Unis, et qui vient d’être révoqué par le gouvernement américain.
C’est en effet l’état d’urgence sanitaire au niveau national qui donnait son fondement juridique au dispositif du Titre 42, ainsi qu’à d’autres mesures, notamment celle de la vaccination obligatoire pour entrer sur le territoire américain.
Que va-t-il se passer à la frontière à l’expiration du Titre 42 ?
Les autorités américaines prévoient un afflux de migrants après l’expiration du dispositif, qui pourrait provoquer une situation «chaotique pendant un moment», selon les mots du président américain Joe Biden.
Selon CNN, de nombreux migrants dont les demandes d’asile ont été rejetées ou qui ont été reconduits à la frontière sont toujours dans l’attente de pouvoir entrer aux États-Unis.
Les chiffres du nombre de réfugiés présents à la frontière sont déjà en hausse, selon le Conseil national de la patrouille frontalière : en avril, 183.000 migrants ont été appréhendés par les autorités à la limite entre les États-Unis et le Mexique, soit 13% de plus qu’au mois de mars.
Par ailleurs, 19.000 personnes se trouvent actuellement en détention dans les centres des douanes, ce qui dépasse de 200% leur capacité d’accueil, selon Brand Judd, président du Conseil national de la patrouille frontalière, a rapporté Reuters.
L’ONG Human Rights First, dans un rapport publié en décembre 2022, a dénombré «plus de 13.400 rapports d'enlèvements, de tortures, de viols et d'autres agressions brutales contre des demandeurs d'asile bloqués ou expulsés vers le Mexique dans le cadre de la politique du Titre 42 depuis l'entrée en fonction du président Biden il y a près de deux ans.»
Quelles sont les nouvelles règles en matière d'immigration ?
Face aux républicains qui dénoncent une potentielle «invasion», l'administration de Joe Biden a rappelé que de nouvelles restrictions au droit d'asile ont été adoptées. Avant de se présenter à la frontière, les demandeurs d'asile, sauf les mineurs isolés, devront désormais avoir obtenu un rendez-vous sur une application téléphonique centralisant les demandes, «CBP One», ou s'être vu refuser l'asile dans un des pays traversés. Sinon, leur demande sera présumée illégitime et ils pourront faire l'objet d'une procédure d'expulsion accélérée, leur interdisant pendant cinq ans l'entrée sur le sol américain.
«Je veux être très clair : notre frontière n'est pas grande ouverte. Les personnes traversant notre frontière illégalement et sans fondement légal pour rester seront immédiatement (...) expulsées», a prévenu le ministre de la Sécurité intérieure, Alejandro Mayorkas.
Quelle organisation du côté des autorités américaines ?
Face à la crainte de débordements et d’une gestion chaotique de l’afflux migratoire, les États-Unis ont déployé plus de 24.000 agents et forces de l’ordre à la frontière avec le Mexique, ainsi que 1.100 coordinateurs. Par ailleurs, 1.500 soldats supplémentaires ont été déployés à la frontière, pour appuyer les 2.500 militaires déjà sur place.
«Il s'agit d'un nombre record de personnels, d'infrastructures et de ressources déployées à la frontière afin de préparer les quelques semaines difficiles que nous pressentons», a indiqué à la presse un haut responsable américain sous couvert d’anonymat.
Pour tenter de réduire la pression migratoire, l’administration Biden a annoncé l’ouverture de centres de détention supplémentaires tout au long de la frontière pour traiter les dossiers le plus rapidement possible. Les États-Unis prévoient également d’augmenter les vols de rapatriement.
Par ailleurs, Washington prévoit d’ouvrir des nouveaux centres de traitement des migrants en Colombie et au Guatemala pour réduire l’immigration clandestine, et d’intensifier la lutte contre les réseaux criminels de transport de migrants.
De son côté, l'Etat du Texas, qui partage la plus grande frontière avec le Mexique, a annoncé en début de semaine le déploiement de la garde nationale en prévision de l’expiration du Titre 41, accusant le président Joe Biden de «dérouler le tapis rouge aux gens du monde entier».