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Brésil : préparation, failles de sécurité, soupçons de complicité... Ce que l'on sait de l'attaque des partisans de Jair Bolsonaro

L'invasion du Congrès, du palais présidentiel et de la Cour suprême aurait pu être anticipée, souligne la presse brésilienne. [© Adriano MACHADO/REUTERS]

Des centaines de partisans de l’ancien président Jair Bolsonaro ont pris d’assaut dimanche les lieux de pouvoir de la capitale brésilienne Brasilia. L'enquête ne fait que commencer et de nombreuses zones d'ombres restent à éclaircir.

Des questions en pagaille. L'invasion des lieux de pouvoirs brésiliens par des partisans de l'ex-président Jair Bolsonaro, dimanche à Brasilia, a suscité la stupeur et donné lieu à plusieurs interrogations quant au fait de savoir comment cette insurrection a été rendue possible. Le point sur ce que l'on sait au lendemain de l'attaque.

les institutions démocratiques prises d'assaut

En fin d'après-midi dimanche, une foule de partisans de Jair Bolsonaro s'est rassemblée sur la place des Trois-Pouvoirs de la capitale Brasilia, où se trouvent côte à côte le Congrès, le palais présidentiel du Planalto et le Tribunal suprême fédéral.

Les manifestants ont d'abord fait face à un cordon de policiers qui tentaient de les contenir, notamment avec du gaz lacrymogène. En vain. Une véritable marée humaine, visible sur de nombreuses vidéos sur les réseaux sociaux, a alors déferlé dans les trois lieux de pouvoirs du pays.

Les manifestants ont envahi les trois palais, bijoux d'architecture moderne, y commettant d'importantes dégradations. Vêtus de maillots de la sélection brésilienne, certains chaussés de simples tongs, ils ont éventré les sièges, pillé les bureaux, brisé les vitres, abîmé un tableau de maître... Avec pour seules armes des pieds de chaises, ou encore des pavés.

Les images rappellent celles de l'attaque du Capitole, notamment une vidéo montrant des manifestants se prendre en photo dans l'hémicycle du sénat.

plus de 1.500 personnes arrêtées

Les forces de l'ordre ont progressivement repris le contrôle de la situation dans la soirée et évacué les trois palais. Des canons à eaux ont été utilisés pour éloigner les derniers manifestants restés dans les alentours.

Le parquet général a demandé l'ouverture immédiate d'investigations pour établir «la responsabilité des personnes impliquées».

Pour l'heure, au moins 1.500 personnes ont été arrêtées. Sur des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux et par la télévision brésilienne, on peut voir des files de manifestants menottés sortir du palais présidentiel.

d'importantes failles de sécurité

C'est la question que chacun se pose : comment les assaillants ont-il pu accéder si facilement aux lieux de pouvoir ? Samedi soir, une centaine d'autocars amenant quelque 4.000 bolsonaristes sont arrivés dans la capitale et ont rejoint un campement installé devant le quartier-général de l'Armée de terre. Le ministre de la Justice, Flavio Dino, a alors déployé des agents de la Force Nationale, une force spéciale de police parfois envoyée dans les différents Etats en cas de menace contre la loi et l'ordre. Mais cela n'a pas empêché les émeutiers de parcourir sans être bloqués les huit kilomètres entre leur campement et la place des Trois-Pouvoirs.

«On peut voir sur les images que (les manifestants) ont été guidés (par les policiers) jusqu'à la place des Trois-Pouvoirs (...) Les forces de l'ordre du District Fédéral ont fait preuve d'incompétence, de mauvaise volonté ou de mauvaise foi», a accusé le président Lula, en déplacement au moment des émeutes.

Quelques minutes avant l'invasion, un responsable de la sécurité à Brasilia aurait même envoyé un message rassurant au gouverneur du district fédéral, Ibaneis Rocha (suspendu de ses fonctions lundi). «Les manifestants sont escortés par la police (...) et le climat est tranquille, c'est une manifestation totalement pacifique», dit-il dans cet enregistrement publié par le site Metropoles.

DES POLICIERS COMPLICES ?

L'attitude de certains policiers a également été pointée du doigt, des vidéos montrant des agents filmant l'assaut avec leurs téléphones plutôt que d'intervenir.

Selon le quotidien Folha, le secrétaire à la sécurité du district fédéral de Brasilia, Anderson Torres, aurait négocié avec les manifestants une entrée pacifique sur la place des Trois-Pouvoirs. Ancien ministre de la Justice de Jair Bolsonaro, il a été limogé dimanche soir. Celui qui l'a nommé, le gouverneur Ibaneis Rocha, a été suspendu de ses fonctions pour 90 jours par un juge de la Cour suprême. D'autres têtes pourraient tomber prochainement.

Une attaque prévisible ?

Les signes avant-coureurs d'une attaque sur les institutions démocratiques brésiliennes ne manquaient pas. Voilà déjà plusieurs semaines que les bolsonaristes les plus radicaux avaient établi leur campement devant le quartier général de l'Armée. Refusant de reconnaître la victoire de Lula, ils réclamaient une intervention des militaires.

Sur les réseaux sociaux, de nombreuses publications montraient que l'attaque était préparée dans ses moindres détails depuis plusieurs jours. Dans les groupes pro-Bolsonaro, sur WhatsApp ou Telegram, des messages indiquaient clairement que les manifestants avaient l'intention de s'en prendre aux lieux de pouvoir.

«L'ordre est maintenant de camper à l'intérieur du Congrès, du TSF (tribunal suprême fédéral) et du Planalto», peut-on lire dans une publication relayée par Globo. De quoi remettre en cause sérieusement l'efficacité des services de renseignement.

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