Porté par un soutien international croissant, le président autoproclamé du Venezuela, Juan Guaido, accentuera dimanche sa pression en faveur d'élections en convoquant une nouvelle manifestation et en offrant l'amnistie aux militaires tournant le dos au chef de l'Etat Nicolas Maduro.
«Nous continuons d'avancer, aujourd'hui les voix de ce peuple ont été écoutées par le monde qui, comme nous, croit et lutte pour la liberté et la démocratie», a lancé sur Twitter le jeune chef du Parlement contrôlé par l'opposition, rasséréné par les nombreuses prises de position à l'international en sa faveur.
Il va désormais annoncer la date de la prochaine grande manifestation, prévue d'ici quelques jours, et appeler ses partisans à partager, via les réseaux sociaux ou en version imprimée, la loi d'amnistie promise aux fonctionnaires et militaires acceptant de le soutenir.
«Les militaires et policiers qui contribuent au rétablissement de l'ordre démocratique pourront se réinsérer dans la vie démocratique du pays», prévoit cette loi, qui offre «toutes les garanties constitutionnelles aux fonctionnaires civils et militaires» qui feraient ce choix.
La position de l'armée, principal soutien de Nicolas Maduro depuis son arrivée au pouvoir en 2013, est cruciale: si elle a réaffirmé sa loyauté jeudi, certaines fissures se dessinent dans ses rangs.
L'attaché militaire du Venezuela à Washington, le colonel José Luis Silva, a ainsi annoncé samedi à l'AFP ne plus reconnaître Nicolas Maduro comme président légitime, et a appelé ses «frères militaires» à soutenir Juan Guaido.
Pour Rocio San Miguel, experte en questions militaires, il est logique que le président autoproclamé lance un «appel aux attachés militaires du Venezuela à l'étranger, pour qu'ils cessent formellement de reconnaître Maduro en le traitant d'usurpateur, en échange de l'opportunité de se maintenir à leur poste et de commencer à collaborer avec la transition» vers de nouvelles élections.
«Le monde avec le Venezuela»
«Le monde est avec le Venezuela», a résumé sur Twitter le député d'opposition Julio Borges, en exil en Colombie.
Car samedi, des Etats-Unis et d'Europe, la pluie de soutiens à Juan Guaido, 35 ans, n'a pas arrêté: à l'ONU, le secrétaire d'Etat américain Mike Pompeo a demandé à tous les pays d'«être aux côtés des forces de liberté" et souhaité qu'ils mettent «fin à leurs transactions financières avec le régime de Nicolas Maduro».
L'Union européenne a annoncé qu'elle «prendra des mesures» si des élections ne sont pas convoquées «dans les prochains jours», mais certains de ses membres, comme la Grèce, continuent à soutenir Nicolas Maduro.
De leur côté, Madrid, Paris, Berlin, Londres, Bruxelles et Lisbonne ont lancé un ultimatum à M. Maduro, exigeant la convocation d'élections sous huit jours, faute de quoi ces capitales reconnaîtront Juan Guaido comme président.
Mais Caracas garde des soutiens à l'étranger, notamment la Russie, qui a exigé «la fin» d'«une ingérence cynique et non-dissimulée dans les affaires d'un Etat souverain».
De son côté se trouvent aussi la Chine, la Turquie et Cuba notamment.
Aide humanitaire
Et le gouvernement vénézuélien semble insensible à tout ultimatum: «Personne ne va nous donner des délais, ni nous dire si des élections doivent être convoquées ou non», a asséné à l'ONU le ministre des Affaires étrangères Jorge Arreaza.
L'exécutif continue d'accuser Washington d'agir en coulisses de ce qu'il considère comme un coup d'Etat et le président Maduro a décrété la fin des relations diplomatiques avec les Etats-Unis.
Mais il veut garder un minimum de relations et négocie avec eux l'ouverture de «sections d'intérêts» dans chaque pays, a annoncé M. Maduro alors qu'expirait le délai de 72 heures qu'il avait donné au personnel de l'ambassade américaine pour quitter le Venezuela.
Parallèlement, Juan Guaido agit sur un autre front: il a demandé, dans une lettre au secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, une «réponse internationale à l'urgence humanitaire au Venezuela».
«La situation d'urgence dans notre pays fait des millions de victimes, qui souffrent de ne pas avoir accès à la santé, à la sécurité alimentaire, à l'éducation et à la sécurité, et en raison du haut niveau de violence chronique», écrit-il.
«Nous demandons de façon urgente la coopération de la solidarité internationale, coordonnée par le système des Nations unies et ses agences associées», ajoute-t-il.
Le Venezuela, géant pétrolier, par ailleurs l'un des pays les plus violents au monde, est en plein naufrage économique, avec une inflation attendue par le FMI à 10.000.000% en 2019 et de constantes pénuries d'aliments et de médicaments.
Les mouvements de protestation contre le gouvernement Maduro ont fait 29 morts depuis lundi, selon l'ONG Observatorio Venezolano de Conflictividad Social.
Plus de 350 personnes ont été arrêtées cette semaine lors de ces manifestations, «dont 320 pour la seule journée du 23 janvier», selon l'ONU.