Des combats opposaient vendredi l'armée syrienne à des jihadistes et rebelles aux portes de la province d'Idleb, faisant des dizaines de morts et semblant être le signe avant-coureur d'une offensive pour reprendre cette région qui échappe au régime.
Lundi, les forces gouvernementales, appuyées par l'aviation de l'allié russe, ont lancé une opération à la périphérie de cette province du nord-ouest du pays en guerre, s'emparant d'une série de villages et de localités.
La province d'Idleb est la seule du pays à échapper entièrement au contrôle du régime de Bachar al-Assad. Elle est aujourd'hui dans sa quasi-totalité sous contrôle du Front Fateh al-Cham, l'ex-branche syrienne d’Al-Qaïda. Des groupes rebelles sont présents dans quelques poches de la province. Le sud-est de la province «est visé par des bombardements d'une violence sans précédent depuis des mois» de la part des avions du régime syrien et de son allié russe, a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
«Le but immédiat de l'opération de l'armée est de s'emparer du sud-est» de la province, a précisé à l'AFP Rami Abdel Rahmane, directeur de l'Observatoire en faisant état de combats entre l'armée d'un côté, et Fateh al-Cham et des factions rebelles de l'autre. Ces dernières 24 heures, 66 personnes ont été tuées dans cette bataille, dont 27 combattants prorégime et 20 de l'autre camp. Les raids aériens ont tué 19 civils, dont sept enfants, toujours selon l'OSDH.
Des centaines de déplacés
Selon un correspondant de l'AFP près du front, d'intenses bombardements ont lieu dans la zone. Des messages diffusés par haut-parleurs dans des villages rebelles ont appelé les habitants à rester chez eux et annoncé l'annulation de la prière musulmane du vendredi.
Des centaines de civils fuyant leurs villages à bord de voitures et pick-up transportant bagages et meubles, se dirigeaient vers la ville d'Idleb, chef-lieu de la province du même nom. L'OSDH a fait état de centaines de déplacés.
Les forces du régime ont été chassées en 2015 de la province d'Idleb par une coalition de rebelles et de jihadistes, appelée alors l'Armée de la conquête. Mais cette alliance s'est effritée en été après que Fateh al-Cham a mené un coup de force contre ses ex-alliés rebelles. Toutefois, dans la bataille en cours contre le régime, jihadistes et rebelles sont alliés dans le combat, a indiqué Abdel Rahmane.
Depuis l'intervention militaire en septembre 2015 de la Russie, venue à la rescousse de son allié Bachar al-Assad qui était en mauvaise posture, le régime syrien a réussi à reprendre la majorité des régions aux rebelles et à chasser Daesh, rival de Fateh al-Cham, de la grande partie de la province orientale de Deir Ezzor et d'autres localités du pays.
Déclenché par la répression de manifestations pacifiques, le conflit en Syrie s'est complexifié avec la multiplication des belligérants et a fait plus de 340.000 morts et des millions de déplacés. Il a également donné lieu à une situation humanitaire catastrophique, notamment dans les régions assiégées par le régime.
Cancers, maladies du coeur
Vendredi, une opération d'évacuation de civils gravement malades a pris fin dans la Ghouta orientale près de Damas. Sur trois jours, 29 patients ont été évacués en échange de la libération par les rebelles de 29 détenus, conformément à un accord conclu entre régime et insurgés.
Le nombre de 29 reste encore très éloigné des 500 personnes que l'ONU appelle à évacuer.
Dernier fief de la rébellion près de Damas, la Ghouta est assiégée par les troupes du régime depuis 2013. Quelque 400.000 habitants sont pris au piège dans cette vaste région touchée par de graves pénuries alimentaires et médicales.
«Treize civils dont six enfants et quatre femmes ont été évacués jeudi à minuit» de la localité de Douma dans la Ghouta, selon un responsable local. Seize avaient pu quitter les deux derniers jours et transportés vers des hôpitaux de la capitale Damas, bastion du régime.
Beaucoup souffrent de cancer, de maladies chroniques ou de maladies du coeur, selon le Comité international de la Croix-Rouge. Parmi les patients évacués figurent Fahed al-Kurdi, 30 ans, atteint du cancer du rectum, et Zouheir Ghazzawi, un garçon de 10 ans, également atteint d'un cancer et dont une jambe a été amputée.
Au moment des évacuations, une jeune femme de 26 ans, Marwa, atteinte de méningite, est quasi-inconsciente sur une civière, avec un appareil d'assistance respiratoire, selon un correspondant de l'AFP sur place. Le chef du groupe de travail humanitaire de l'ONU pour la Syrie, Jan Egeland, a critiqué l'accord rebelles-régime, estimant que les malades et les enfants ne devraient pas être «une monnaie d'échange».