Une bataille capitale. Les Forces démocratiques syriennes (FDS) sont entrées dans Raqqa ce mardi matin, pour reprendre à Daesh son dernier grand bastion en Syrie.
Ces 30.000 combattants kurdes, arabes et turkmènes sont soutenus matériellement et militairement par la coalition internationale dirigée par les Etats-Unis, qui a participé à la préparation de cet assaut en bombardant des positions stratégiques. Car la prise de Raqqa représente un enjeu majeur.
Une capitale militaire
L’assaut est le fruit d’une offensive démarrée en novembre 2016, et qui visait en premier lieu à encercler la ville pour l’assiéger. Elle est d’autant plus importante que, si Mossoul, en Irak, est la capitale religieuse et intellectuelle de Daesh, Raqqa fait office de capitale militaire et politique, particulièrement chère au groupe terroriste. D’une part, en tant que dernière grande ville soumise dans la région, d’autre part, en raison de sa situation géographique qui forme un axe direct entre la Syrie et l’Irak, berceau du califat jihadiste.
En raison de ces atouts, la place des forces arabo-kurdes en première ligne fait des envieux, comme la Turquie, ennemi juré des Kurdes présents en nombre dans l’alliance, ou encore les Russes, les Iraniens et les rebelles syriens, qui souhaitent tous jouer les premiers rôles. «Les grandes forces de cette bataille auront en effet l’avantage dans les négociations qui suivront», explique Didier Billion, directeur adjoint de l’IRIS.
Mais, si la progression des combattants est scrutée avec attention, les regards sont également braqués sur les 300.000 civils bloqués dans la ville. Ces derniers ont été invités par les Forces démocratiques syriennes à quitter au plus vite les zones de front. Leur sort suscite l’inquiétude, car les habitants sont pris en étau entre Daesh, qui les utilise comme boucliers humains et les tue lorsqu’ils tentent de s’enfuir, et la coalition internationale, qui bombarde des positions terroristes malgré leur présence.
L’énergie du désespoir
Si les forces syriennes ont affiché hier leur détermination, la bataille risque d’être âpre. A l’image de Mossoul, l’urbanisme de la ville imposera une lente progression, ruelle après ruelle. D’autant que les terroristes «ont eu le temps de se préparer, et ont pour eux l’énergie du désespoir», explique Didier Billion.
Pour autant, libérer Raqqa n’éliminerait pas Daesh du pays, encore présent dans d’autres villes plus petites, et des zones rurales. Par ailleurs, le groupe terroriste a déjà prouvé, en Grande-Bretagne très récemment, que son idéologie n’avait pas de frontières. En cas de libération du bastion jihadiste, «les attentats se multiplieraient probablement dans les pays de la coalition», prévoit le spécialiste.