L'Argentine et les fonds spéculatifs américains n'ont pas réussi à se mettre d'accord mercredi sur la dette de Buenos Aires, qui se retrouve de facto en situation de défaut de paiement.
L'agence de notation Standard and Poor's (S&P) avait abaissé la note de l'Argentine d'un cran à "défaut sélectif" un peu avant que le ministre argentin de l’Économie Axel Kicillof n'annonce à la presse depuis New York que les deux parties s'étaient séparées sans accord.
Ce scénario pousse mécaniquement l'Argentine, troisième économie d'Amérique latine, en défaut de paiement sur un montant minime pour un État, 539 millions de dollars.
"Malheureusement, aucun accord n'a été trouvé et la République d'Argentine va se retrouver de manière imminente en situation de défaut" de paiement, a déclaré Daniel Pollack, le médiateur désigné par la justice américaine pour mener les négociations.
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C'est la deuxième fois en 13 ans que ce scénario se produit en Argentine.
Selon les analystes, une des premières conséquences du défaut de paiement est d'éloigner durablement l'Argentine de l'accès aux marchés internationaux des capitaux, dont elle est exclue depuis sa faillite en 2001.
Selon S&P, le "défaut sélectif" signifie que "l'emprunteur n'a pas honoré une certaine partie de ses obligations ou une émission spécifique mais qu'il continue de payer ses autres types d'emprunts dans les temps".
La bourse de Buenos Aires a peu réagi à la nouvelle, l'indice Merval s'adjugeant +6,94% à la clôture.
A l'issue de la réunion, M. Kicillof a assuré que les fonds spéculatifs "ont essayé de nous imposer quelque chose d'illégal (...). L'Argentine est prête à dialoguer, à trouver un consensus. Nous allons chercher une solution juste, équilibrée et légale pour 100% de nos créanciers".
Buenos Aires "va rembourser" les porteurs de bons issus de la dette restructurée, mais "à des conditions raisonnables, sans tentative d'extorsion, sans pression, sans menace", a-t-il ajouté, niant que son pays soit en situation de défaut de paiement.
"L'argent est là, bien évidemment si nous étions en défaut, il ne serait pas là", a-t-il expliqué avant de rentrer pour Buenos Aires.
-"Ils veulent plus"-
L'Argentine avait obtenu un délai de 30 jours qui expirait mercredi pour régler les 539 millions de dollars à des créanciers ayant consenti une remise de dette de 70% après la crise économique de 2001.
Mais le juge américain Thomas Griesa bloque ce paiement parce qu'il a ordonné à l’État argentin de payer d'abord 1,3 milliard de dollars à NML et Aurelius, deux fonds "vautours" spécialisés dans le rachat de dette à risque et détenteurs de moins de 1% de la dette concernée.
Le ministre de l'Economie a attribué la responsabilité de cette situation "inédite" au juge Griesa.
"L'Argentine a payé, elle a de l'argent, elle va continuer à payer. C'est le juge Griesa le responsable", a-t-il martelé en référence à l'argent bloqué par le magistrat.
Pour la première fois les négociateurs argentins avaient rencontré directement les représentants de NML et Aurelius autour d'un médiateur à New York pour sortir de l'impasse -- sans résultat.
Le médiateur Daniel Pollack a qualifié les échanges de "francs", et les fonds spéculatifs, en position de force, n'ont pas cédé.
"Nous leur avons fait une offre. Nous leur avons proposé de faire un gain de 300%. Ca n'a pas été accepté, parce qu'ils veulent plus et ils le veulent maintenant", a dit Axel Kicillof.
Le juge Griesa s'est montré hermétique aux demandes du gouvernement argentin, refusant le sursis à exécution du jugement qui permettait à Buenos Aires de payer sans s'exposer à une avalanche de poursuites des autres créanciers.
La directrice générale du FMI Christine Lagarde a pour sa part minimisé l'impact d'un défaut. "Même si un défaut est toujours regrettable, nous ne pensons pas qu'il aura des conséquences majeures en dehors" du pays, a-t-elle estimé.
Cette solution permettrait de contenter NML et Aurelius, et éviterait que les autres créanciers ne reviennent à la charge pour demander l'intégralité de leur dû.