Des hordes de sinistrés affluaient vendredi dans les refuges d'urgence ouverts par le gouvernement philippin, après le passage du typhon Bopha qui a fait près de 500 morts dont les corps entassés formaient par endroits de véritables charniers à ciel ouvert.
Bopha, le plus puissant typhon observé en 2012 aux Philippines, a balayé une bande de terre large de 700 km sur l'extrême sud de l'archipel, provoquant inondations et coulées de boue qui ont fait au moins 484 morts et 383 disparus.
Le président Benigno Aquino est arrivé vendredi matin dans la région afin d'organiser l'aide d'urgence et rencontrer les survivants qui ont souvent tout perdu.
Autour de New Bataan, épicentre de la catastrophe sur l'île de Mindanao, plus de 300.000 personnes privées de toit comptaient leurs morts dans un paysage de désolation où les cadavres gorgés de boue pourrissaient au milieu des enfants fiévreux.
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Le président Aquino a survolé la zone en hélicoptère pour constater les dégâts considérables occasionnés par le typhon aux villes et villages ainsi qu'aux nombreuses plantations de banane anéanties par les pluies torrentielles et les vents dépassant 200 km/h.
"Nous voulons savoir comment cette tragédie a pu se produire et comment éviter qu'elle ne se répète. Je suis ici pour obtenir des explications", a affirmé M. Aquino à son arrivée à New Bataan.
"Le temps n'est pas aux accusations mais au travail", a-t-il toutefois ajouté avant de superviser la remise de colis alimentaires à 2.000 rescapés amassés dans un gymnase, rare édifice encore debout dans cette ville meurtrie de 48.000 habitants.
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"Le typhon a détruit nos vies. Nous n'avons plus rien. Nous espérons que des amis ou de la famille nous accueilleront", a confié à l'AFP Violy Saging, une agricultrice de 38 ans réfugiée dans le gymnase où s'insinue l'odeur âcre des corps entreposés à ciel ouvert sur un parking attenant.
Trois de ses jeunes enfants, dont l'un souffre de fièvre, sont auprès d'elle. Mais Roger, son fils aîné de 15 ans, a été retrouvé sans vie en haut d'un cocotier grâce auquel il pensait pouvoir échapper aux eaux montantes.
Le sol du gymnase est couvert de boue et le toit est béant par endroits, exposant les sinistrés aux pluies intermittantes ou aux brûlures du soleil tropical. La famille Saging partage un petit espace avec un couple qui a perdu six enfants.
Dehors, les rescapés défilent devant les corps bouffis. Un mouchoir sur le nez, Medarda Opiso, 47 ans, soulève péniblement un pan du drap recouvrant l'un d'eux. Sa belle-fille et sa petite-fille sont manquantes.
Aide internationale d'urgence
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"Mon fils est désespéré. Il ne parle à personne. J'ai peur qu'il perde la tête", dit-elle.
Les Nations unies, les Etats-Unis, le Japon et Singapour ont proposé une aide. La Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge a fait un appel aux dons pour répondre aux besoins en nourriture, tentes, purificateurs d'eau et médicaments.
Les Philippines subissent une vingtaine de tempêtes ou typhons majeurs chaque année, survenant pour la plupart pendant la saison des pluies entre juin et octobre.
En 2011, 29 typhons avaient causé la mort de 1.500 personnes, dont 1.200 à Mindanao après le passage de la tempête tropicale Washi.
L'impact économique est par ailleurs souvent lourd pour ce pays pauvre de 90 millions d'habitants.
Les Philippines sont le troisième exportateur de bananes et une grande partie des plantations sont situées à Mindanao, généralement moins sujette aux typhons. Selon un organisme professionnel, Bopha a détruit 10.000 hectares de bananeraies, soit un quart de la surface cultivée du pays.
La plupart des victimes étaient des migrants très pauvres venus travailler dans de petites mines d'or susceptibles de se transformer à tout moment en tombeau pour leurs travailleurs.
Le gouvernement avait interdit la construction de logements sur plusieurs de ces sites, jugés trop dangereux, mais les autorités locales continuent d'émettre des permis de creuser.
"Ils n'auraient pas dû construire de maisons ici", a déploré le ministre de l'Intérieur, Mar Roxas, promettant que les responsabilités seraient établies.