De nombreux maires en France se plaignent de loyers impayés de la part de la gendarmerie nationale. Pour se justifier, l'Etat met en avant la «situation budgétaire» française. Le ministre du Budget veut «normaliser» la situation.
La gendarmerie nationale est-elle un locataire insolvable ? Plusieurs municipalités françaises sont confrontées aux loyers impayés des locaux et logements de fonction attribués à ces militaires, qui relèvent d'une fonction régalienne de l'Etat. Dans certaines communes, le montant dû a atteint plusieurs centaines de milliers d'euros.
C'est le cas à Cabestany, ville des Pyrénées-Orientales, où, d'après la maire interrogée par France bleu, la gendarmerie doit «236.388 euros de retard de loyers». Cette somme «équivaut presque à la moitié» de la «dotation globale de fonctionnement» de la ville selon Edith Pugnet, qui craint de ne pas pouvoir boucler son budget 2024.
Elle n'est pas la seule à se retrouver en difficulté puisque l'association des maires de France (AMF), a recueilli des témoignages similaires dans toute la France, notamment dans l'Yonne, en Mayenne, en Savoie et en Charente-Maritime. France Bleu évoque «des centaines» de municipalités concernées.
«Ces communes se sont endettées pour pouvoir construire les locaux de gendarmerie et les loyers leur permettent de payer les annuités d'emprunt. Si l'Etat ne paye pas ce qu'il doit, elles se retrouvent en grosse difficulté», déplore Edmond Jorda, président de l'association des maires des Pyrénées-Orientales.
Pour obtenir des explications, la sénatrice LR des Pyrénées-Orientales, Lauriane Josende, a saisi le ministère de l'Intérieur. On lui a répondu que «la gendarmerie n'était plus en capacité de payer ses loyers sur l'ensemble du territoire» en raison de «la situation budgétaire [...] bien plus grave que prévu» dont a hérité la nouvelle équipe gouvernementale de Michel Barnier.
Identifier les communes les plus en difficulté
«Il manquerait environ 200 millions d'euros dans les fonds attribués à la gendarmerie pour l'année 2024» et «la législation en vigueur ne permettrait pas au gouvernement de transférer des fonds d'un service à un autre», développe Lauriane Josende.
Auprès de l'AFP, le ministère de l'Intérieur a également cité les «dépenses engagées en raison des événements en Nouvelle-Calédonie qui n'avaient pas été anticipées» ainsi que le «paiement des dépenses liées à la sécurisation» des Jeux olympiques, qui «n'avaient pas été évaluées à leur juste niveau».
L'exécutif dit avoir été contraint de «prioriser pour les semaines à venir les dépenses liées à l'activité opérationnelle», comme le carburant. Le paiements des loyers de septembre, octobre et novembre a donc été «reporté à décembre», au moment où sera votée «la loi de fin de gestion et l'ouverture de nouveaux crédits en décembre», qui prévoit une enveloppe de 320 millions d'euros.
"Les collectivités territoriales sont des alliées. On a évidemment un redressement à faire ensemble à la hauteur de ce qui est possible pour les collectivités", affirme Laurent Saint-Martin. pic.twitter.com/FInLxFg5kV
— franceinfo (@franceinfo) October 8, 2024
«Seuls les bailleurs dont la trésorerie est en mesure de supporter ces retards» se verront imposer le report de paiement, a assuré le ministère. Les «"petits" bailleurs, particuliers et plus petite collectivités» seront épargnés, de même que les territoires d'outre-mer. Les autorités locales, notamment les préfets de zone, ont pour consigne de «réagir immédiatement» au moindre problème pour un «bailleur fragile».
Invité sur franceinfo ce mardi 8 octobre, le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, a promis de «regarder avec précision» ce dossier. «Les collectivités territoriales ne sont pas responsables de l'état de nos finances publiques, a-t-il souligné. Il faut que tout cela se normalise.»