La cour d’Avignon a recueilli l’expertise psychiatrique ainsi que les témoignages de la famille de Jean-Pierre Maréchal. Âgé de 63 ans, l’accusé est le seul à ne pas être jugé pour le viol de Gisèle Pelicot, mais pour ceux de sa propre compagne, perpétrés avec Dominique Pelicot avec un cocktail de drogues fourni par ce dernier.
Un autre individu au profil inquiétant. Le troisième jour de la deuxième semaine du procès des viols de Mazan devait être consacré à l’audition de Dominique Pelicot. Malade et inapte à témoigner semblerait-il, le sexagénaire jugé pour avoir drogué et violé son épouse Gisèle avec d’autres hommes de 2011 à 2020, n’a pas pris la parole ce mercredi 11 septembre.
Par conséquent, c’est sur l’un des accusés, un certain «Rasmus», que s’est concentrée la Cour. «Rasmus» était le pseudo utilisé par Jean-Pierre Maréchal, 63 ans, sur la plate-forme Coco, fermée en juin dernier. C’est en 2015 que ce père de six enfants y serait entré en contact avec Dominique Pelicot, accusé d'y avoir recruté des complices pour son projet sordide.
Le sexagénaire aurait alors demandé à son interlocuteur mazanais une série de conseils sur son mode opératoire criminel, jusqu’à ce que celui-ci lui fournisse le fameux cocktail de médicament permettant à Pelicot et Maréchal de violer la conjointe de ce dernier.
«On avait des relations normales», témoigne-t-elle
Jean-Pierre Maréchal est ainsi accusé d'avoir été le disciple de Dominique Pelicot entre 2015 et 2020, à travers une dizaine de viols qui ont brutalement pris fin durant l’été : «Je me réveille en sursaut un homme debout avec une lampe qui clignote mon mari à côté de moi», a témoigné ce mercredi la victime, dont le prénom n’a pas été rendu public.
Mais son témoignage relate que Dominique Pelicot aurait pris la fuite, avant même qu'elle ne puisse se lever : «Je demande à mon mari ce que c’est, il me dit que c’est pour voir mes sous-vêtements», a-t-elle poursuivi à la barre, dans des propos relayés par RMC sur X.
L’épouse de Jean-Pierre Maréchal n’a pas cru à cette version, mais elle était pour autant à mille lieux d’imaginer le degré d’horreur de la situation : «De là à douter qu’il s’agissait de viols, j’étais habillée je pensais à des photos», a-t-elle témoigné.
La femme de 53 ans - qui est la troisième compagne de l’accusé - a décrit un cadre de vie équilibré, avec un mari qui ne l’a jamais «forcé» à quoi que ce soit : «On avait des relations normales (...) quand je disais non c’était non», assure-t-elle lorsqu’on lui demande si elle avait observé des changements dans les cinq années précédant son interpellation.
Désormais, la quinquagénaire ne sait quel sera l’avenir de son couple, après ce qu’elle ne «peut pas pardonner» : «Je reste mariée pour des raisons de finances, je ne travaille pas et j’ai deux enfants à l’école», a déclaré celle qui n'a pas souhaité se porter partie civile, pour protéger ses enfants.
Le «pilier de la coopérative» et un bon père
Ancien chauffeur routier dans une coopérative agricole, Jean-Pierre Maréchal était perçu comme un homme bien sous tous rapports, aussi bien par ses collègues qui le considéraient comme «le pilier de la coopérative», que par les membres de sa famille qui ont toujours vu en lui un père exemplaire, n'ayant jamais eu un geste déplacé à l'égard de ses enfants.
«Mon père tout petit ne me faisait pas pisser aux toilettes. Il était très pudique, il ne nous donnait pas la douche», a même confié son fils aîné à la barre ce mercredi 11 septembre. Issu d’une précédente union, ce dernier fait même état d’un cadre sain chez son père, par rapport au fonctionnement dysfonctionnel de la famille de sa mère, la première compagne de Jean-Pierre Maréchal.
Une pudeur héritée d’une enfance sous fond de violences et d’inceste ? Car en effet, l’enquête de personnalité décrit le père du sexagénaire comme un homme «violent, violeur et incestueux avec ses enfants», selon des éléments rapportés par plusieurs membres de sa famille.
Influencé par Pelicot... ou pas, selon l’expert
Pour autant, nul ne sait si l’accusé, avant-dernier d’une fratrie de dix enfants, a lui-même été victime des violences sexuelles de son père. «La mère aurait été consciente et emmenait ses enfants en forêt pour les protéger. Ils se cachaient dans les clapets à lapin», a relaté le président de la cour du Vaucluse.
À l’époque, les trois sœurs de Jean-Pierre Maréchal avaient même été placées, pour les protéger. Ce lourd passé pourrait-il expliquer l’attirance de l’homme pour un scénario aussi sordide ?
Dans tous les cas, l’expert psychiatre est catégorique : «Rasmus» n’a aucune pathologie mentale et malgré quelques traits d’inhibition, sa personnalité est «dans la norme».
De son côté, le fils aîné de Jean-Pierre Maréchal estime que son père - dont il est très proche - aurait été influencé par Dominique Pelicot, tout comme sa sœur de 28 ans : «Je pense que s’il n’avait pas connu cet homme-là, il n’aurait jamais rien fait», pense cette dernière.
Pourtant, l’expert psychiatre donne un autre son de cloche : «Monsieur est proactif. Il y a des temps de latence ou Dominique Pelicot ne venait pas à son domicile il aurait pu arrêter, malgré son inhibition», a-t-il tranché.