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Billets trop chers, tarifs des hôtels en hausse, élections législatives... Les troublantes similitudes entre les JO de Paris de 1924 et ceux de 2024

Malgré les nombreuses similitudes entre les deux éditions parisiennes, la cérémonie d'ouverture 1924 ne s'est pas déroulée sur la Seine. [©PA Images/Icon Sport
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La fin du compte à rebours approche avant le lancement officiel des JO. Marqués par de nombreuses polémiques autour de l'organisation des jeux et d'élections législatives, les mois précédant les Jeux présentent des similitudes troublantes avec ceux de Paris en 1924.

Réquisition de logements étudiants, billets hors de prix, élections législatives... Les parallèles entre les éditions de 1924 et 2024 se multiplient. Les sujets qui font la une des journaux depuis des mois concernant la préparation des Jeux Olympiques font étrangement écho aux titres de la presse de 1924.

C'est ce que révèle la Bibliothèque nationale de France qui conserve des archives de ces articles qui pourraient aisément figurer dans la presse d'aujourd'hui. Lorsqu'on les épluche les sujets, les problématiques et les inquiétudes des Franciliens ou des Français il y a un siècle semblent identiques aux diverses difficultés rencontrées au cours de l'année pour l'organisation des Jeux de 2024.

Un climat d'élections législatives

En 1924, la France vient d'élire son nouveau président de la République, Alexandre Millerand. Des élections législatives sont donc organisées. A l'époque, les forces de gauche s'étaient unis pour former un «Cartel des gauches» qui a remporté une victoire écrasante avec plus de 327 sièges sur les 581 à pourvoir. Ce revers a conduit à la démission du président, dès le premier tour des législatives, et son parti, le Parti républicain-socialiste, fut défait.

En 2024, Emmanuel Macron dissout l'Assemblée nationale après la défaite de la majorité présidentielle aux élections européennes. L'organisation d'élections législatives anticipées et les campagnes tumultueuses des différents partis font passer les Jeux Olympiques au second plan. Fait notable : comme en 1924, une coalition de gauche s'est formée pour contrer la majorité présidentielle.

Prix des billets : une question toujours épineuse

Un article du 4 avril 1924 dans La Patrie raconte l'anecdote d'un ami fortuné de Serge Veber : «J'ai reçu les prix des places et j'ai reculé d'horreur». Pourtant, considéré comme aisé à l'époque, il détaille : «Si je veux assister aux épreuves d'athlétisme, de tennis, de boxe et de natation, par exemple, eh bien, je ne m'en tirerai pas à moins de 1.100 francs ! (1.158,76 euros)». Il précise ensuite qu'il n'achètera pas l'abonnement mais se contentera d'assister aux finales. Précisons, qu'il s'agit-là de places VIP pour accéder à certains événements.

Selon Le Figaro du 16 avril 1924, Paul Dubonnet dénonce le manque de communication sur les prix avant de s'en indigner : «Leur prix est beaucoup trop élevé dans certains cas où les engagements n'ont pas été aussi nombreux qu'on le supposait. Par exemple, on demande 1.400 francs pour une loge de polo (1.474,79 euros). Or, il n'y aura que trois ou quatre matches».

Des propos qui font étrangement écho à ceux tenus dans la presse il y a quelques mois. Pourtant, Tony Estanguet avait promis des Jeux «populaires et ouverts à tous». Pour les Jeux de Paris 2024, les billets variaient entre 24 et 2.700 euros pour le grand public. Si des milliers de billets permettent d'accéder à certaines épreuves pour des prix relativement modestes, certaines compétitions exigent toutefois de débourser plusieurs centaines d'euros pour y assister en bonne place. Les plus fortunés ont pu se procurer des places à plusieurs milliers d'euros pour profiter des loges et des packages VIP.

Un manque de temps pour les infrastructures

Dans un article du 2 mai 1924 publié dans Le Petit Journal, Jacques Mortane s'interroge sur la capacité de Paris à accueillir l'événement international. Il décrit : «Nous sommes allés faire une visite à Colombes (premier village olympique) et nous avons constaté que si la tâche du Comité olympique est terminée en ce qui concerne le stade, il est loin d'en être de même pour les voies d'accès». Le journaliste poursuit : «Même par le soleil, parvenir au stade dans l'état actuel des choses sera un exploit». Il continue sa critique en relevant les défauts des grands axes routiers de ce premier village olympique.

Ces écrits qui résonnent comme les doutes émis par certains organismes en début d'année. Des incertitudes planaient sur les délais de construction du centre aquatique et du village olympique. En effet, en mars dernier, le chantier du bassin d'entraînement de natation d'Aubervilliers a connu plusieurs arrêts de travaux, en septembre 2023 et en mars dernier. Le projet du Grand Paris Express a également été retardé et ne sera pas achevé avant 2030. Heureusement, pour l'heure, l'intégralité des infrastructures sportives liées au JO devrait être opérationnelle le jour J.

des tarifs en hausse dans l'hôtellerie

En 1924, le secteur de l'hôtellerie-restauration a connu une augmentation de 15% durant les JO, comme le souligne Paul Dubonnet dans un article du Figaro : «On a appliqué une hausse qui atteint théoriquement 15%. Je dis théoriquement, car dans certains hôtels, les chambres de 35 francs se paient maintenant 45 francs». Une somme considérée comme importante pour l'époque.

Dans L'Homme libre du 4 mai 1924, Pierre Delafuye raconte qu'une famille américaine a dû retourner aux États-Unis après que le propriétaire de l'hôtel où ils logeaient a augmenté le prix en découvrant qu'ils étaient étrangers.

En 2024, l'augmentation des prix des hôtels, et plus largement de l'hébergement, a également été constatée. Selon une étude de l'association UFC-Que Choisir publiée en décembre 2023, certains hôtels ont augmenté leurs tarifs jusqu'à 226%.

En moyenne, il faut débourser 1.033 euros pour une chambre d'hôtel pendant les Jeux Olympiques. Les prix des locations sur Airbnb ont également explosé pendant la période des Jeux. Toujours selon l'étude, le prix d'une nuit passée en Île-de-France passerait de 169 euros en moyenne en juillet 2023 à 669 euros pendant la période olympique. Cependant, ces dernières semaines, les prix ont tout de même chutés en raison d'un grand nombre de places encore à pourvoir.

Des logements étudiants réquisitionnés

Sous le titre «La bagarre des Jeux Olympiques : pour loger les athlètes, on commence par expulser les étudiants», le journal L'Homme libre du 22 février 1924 aborde un sujet toujours d'actualité, cent ans après. Alors que Pierre Delafuye décrit Paris 1924 comme «une ville surpeuplée, archi-comble», il ne mâche pas ses mots pour dénoncer le choix des organisateurs pour loger les dizaines de milliers de visiteurs attendus. Le journaliste fustige : «Au lieu d'avoir à y applaudir, comme nous l'espérions, il nous faut au contraire nous élever contre, avec toute la force réunie du bon sens, de la justice et de l'indignation».

Des propos qui auraient pu être écrits récemment, tant le problème est similaire avec, non pas des expulsions, mais des réquisitions. «En l'absence de cours, l'été correspond à une période durant laquelle de nombreux logements publics gérés par le Crous ne sont pas occupés, alors que les besoins seront exceptionnellement très élevés dans cette période», avait annoncé le Crous sur son compte Twitter.

Une décision concernant 3.000 logements en Île-de-France avait indigné de nombreux étudiants, notamment après les propos de la ministre des Sports : «On a tous besoin de faire, de temps en temps, des efforts pour que l'organisation des JO puisse être la plus fluide possible». Les 2.000 étudiants concernés devraient recevoir deux places pour les JO ainsi qu'un chèque de 100 €.

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