À moins de deux mois des élections européennes, et avec seulement 7% des intentions de vote selon les derniers sondages, quelle est la marge de manœuvre de la liste de François-Xavier Bellamy bloquée entre la majorité et le Rassemblement national ?
Un scrutin complexe pour la droite traditionnelle. À quelques mois des élections européennes, Les Républicains (LR) se retrouvent coincés entre la liste menée par Jordan Bardella pour le RN et celle de la majorité présidentielle menée par Valérie Hayer. Alors de quelle marge de manœuvre dispose François-Xavier Bellamy ?
Ex æquo avec les Écologistes à la quatrième place des intentions de votes avec 7%, la liste des Républicains est pour le moment à la peine. Cette dernière n'est devancée que de 4 points par le Parti socialiste (11%), elle l'est de 14 points par la majorité présidentielle (21%) et 23 points par le RN (30%) selon le dernier rapport de l'Ifop.
D'après le politologue Luc Gras, grâce à sa forte avance dans les sondages, le Rassemblement national pourrait «bénéficier de ce que l'on appelle en sciences politiques le banc de wagon, c'est-à-dire que lorsqu'un parti est en tête, il y a toujours des électeurs qui le rejoignent pour voter pour le futur vainqueur», laissant LR en mauvaise passe.
Le spécialiste ajoute que bien que le taux d'intentions de vote soit encore faible, «la famille LR n'a jamais été très forte aux élections européennes parce que ce n'est pas un sujet qui est très porteur pour elle qui est plutôt souverainiste».
Séduire les anciens électeurs du parti
Gratifié de seulement 4% des voix lors de l'élection présidentielle de 2022, l'ancien parti de pouvoir estime qu'il peut encore s'en sortir et remonter la pente et retrouver un électorat fort.
«On sait que notre base militante n’est pas à 4% à la suite de l’élection présidentielle durant laquelle il y a eu quelques couacs et c’est aujourd’hui derrière nous», a expliqué à CNEWS, Emmanuelle Brisson, chargée de communication de la campagne de François-Xavier Bellamy.
«Le socle est large donc il nous faut premièrement parler à nos électeurs et deuxièmement pour récupérer l’électorat qui a été déçu par les LR, notamment ceux qui ont voté pour Emmanuel Macron. Parce que le programme de Valérie Hayer, et elle le revendique, est à 90% identique à celui du Parti socialiste et qu’ils ne se reconnaissent pas dedans», a-t-elle ajouté.
«Les électeurs qui ont déserté sont partis pour une part vers Renaissance paradoxalement et vers Reconquête et pas tant que cela au Rassemblement national», a précisé Luc Gras. Ainsi, si les LR jouent sur le tournant à gauche de la majorité, ils pourraient espérer retrouver certains transfuges.
François-Xavier Bellamy, une figure assez charismatique ?
Se pose également la question de l'incarnation de cette liste menée par François-Xavier Bellamy. L'élu européen a-t-il une personnalité assez forte pour rivaliser avec celle de Jordan Bardella ?
Pour Les Républicains, François-Xavier Bellamy n'a pas besoin d'être une figure médiatique aussi forte que le président du Rassemblement national pour faire gagner la droite traditionnelle.
«François-Xavier Bellamy s'est fait connaître pour la première fois il y a cinq ans. Il est sorti de la société civile, ça n'était pas un homme politique à l'époque. Il n'est peut-être pas aussi médiatisé que Jordan Bardella mais il siège à Bruxelles et à Strasbourg contrairement à lui», a balayé Emmanuelle Brisson.
Si son bilan fait sa force aux yeux des Républicains, François-Xavier Bellamy est aussi proche des Français, assure-t-elle.
«Sur notre liste, nous avons des Français comme tout le monde. Notre tête de liste est professeur, notre numéro 2, Céline Imart est agricultrice et notre numéro 3, Christophe Gomart est général. Ils sont connectés à la réalité et veulent mettre en avant les problématiques des Français», a rappelé la chargée de communication de la campagne LR.
Cependant, Luc Gras a estimé que pour pouvoir réussir à «avoir un score plus favorable que 7%, la tête de liste doit être charismatique. Ce qui n'est pas encore le cas de François-Xavier Bellamy, qui jouit néanmoins de l'image de quelqu’un de compétent et d’honnête».
«C’est incontestablement quelqu’un de qualité qui a une cohérence d’ensemble dans sa politique mais force est de constater qu’il n’a pas ce côté "punchy". Mais peut-être qu’il ne souhaite pas se prêter à ce jeu-là», a poursuivi l'expert.
Des mesures précises pour convaincre
«La deuxième chose, c'est évidemment qu’à chaque élection, les partis qui gagnent sont ceux qui arrivent à se faire identifier une ou deux idées et pour l’instant, on les attend», a aussi précisé le politologue.
Le Parti socialiste qui est gratifié de 13% des intentions de vote dans certains sondages suit cette logique, «la grande thématique de Glucksman, c’est l’Ukraine. Il est très fort sur la politique étrangère et du coup, ça l’identifie et il récupère des électeurs de Renaissance».
De leur côté, les Républicains s'étaient d'abord démarqués sur le sujet de l'agriculture. Lors du Salon 2024, François-Xavier Bellamy et sa colistière agricultrice avaient mis en avant leur envie de faire évoluer les choses à Bruxelles en faveur du monde agricole.
Autre sujet très abordé par la droite traditionnelle, la question du logement, «aujourd'hui se loger devient très compliqué, en particulier pour les jeunes», a rappelé Emmanuelle Buisson, qui ajoute que le pouvoir d'achat, la sécurité feront partie de leurs priorités.
Ainsi, pas un ou deux grands sujets mais l'ensemble des sujets qui préoccupent les Français. Une stratégie qui peut s'avérer dangereuse aux dires de Luc Gras.
Reste maintenant à voir si les Républicains menés par François-Xavier Bellamy réussiront à convaincre les Français le 9 juin prochain.