Selon le gouvernement, entre 7.000 et 10.000 mineurs sont aujourd’hui concernés par la prostitution en France. À l’occasion de la journée de lutte contre les violences faites aux femmes ce jeudi 25 novembre, la Seine-Saint-Denis annonce renforcer ses moyens pour la lutte contre cette forme de violence sexuelle et présente un rapport sur les conséquences désastreuses de la prostitution sur les jeunes filles.
L’Observatoire des violences envers les femmes de la Seine-Saint-Denis a en effet étudié les dossiers de 101 mineurs (99 filles et 2 garçons) du département qui ont été ou sont toujours pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance, dans lesquels des faits de prostitution ont été repérés.
«La prostitution ne relève pas de la sexualité mais constitue une violence envers les victimes, qui prend des formes multiples et est accrue par la vulnérabilité des enfants et des adolescentes. Elle ne résulte pas d’un choix éclairé qui serait libéré de tous les rapports de domination qui traversent la société : le système prostitutionnel allie rapports de sexe, d’origine et de classe», indiquent les experts qui ont étudié ces dossiers.
Leurs analyses mettent en évidence les violences subies dès le plus jeune âge. En effet, 99% des mineurs suivis ont subi des violences avant leur entrée dans la prostitution. Ces premiers traumatismes ont eu lieu entre 1 an et 17 ans, et l’âge médian de ces premières violences est 12 ans. «7 filles sur 10 ont subi des violences sexuelles avant la prostitution. Dans 8 cas sur 10, il s’agissait de viols ou de tentatives de viols», précise le rapport.
Des conséquences sur la santé et la scolarité
Sur l’ensemble des dossiers étudiés, les premiers actes prostitutionnels ont eu lieu entre 11 et 17 ans, avec un âge médian de 15 ans. «4 mineures sur 10 ne réalisent pas avoir subi des actes prostitutionnels», souligne l’Observatoire de la Seine-Saint-Denis, et pour 9 mineurs sur 10, un ou des proxénètes ont été repérés. Par ailleurs, «pour 1 mineure victime de proxénétisme sur 4, c’est celui qu’elle percevait comme son petit ami qui l’a prostituée.»
Des faits de violences sexuelles qui peuvent avoir de lourdes conséquences sur la scolarité et la santé de ces jeunes filles. 96% des mineurs étudiés ont indiqué avoir un mauvais rapport avec l’école, et 6 filles sur 10 sont ou ont été déscolarisées avant ou au moment de l’entrée dans la prostitution. «9 mineures sur 10 sont en mauvaise santé, avant ou après la prostitution, que les problèmes de santé soient physiques ou psychiques (infections sexuellement transmissibles, troubles de stress post-traumatiques tels que des troubles alimentaires ou de fortes crises d’angoisses...)», explique l’Observatoire des violences envers les femmes de la Seine-Saint-Denis, qui a également indiqué qu’une majorité de ces mineurs consomment régulièrement de l’alcool ou des drogues.
Un plan de 2,3 millions d'euros
«Alors que la crise et les confinements successifs ont vu le nombre de jeunes filles victimes de violences augmenter, nous agissons pour continuer de mettre notre action publique à la hauteur des enjeux», a déclaré Stéphane Troussel, Président du Département de la Seine-Saint-Denis dans un communiqué.
Ce ne sera probablement toujours pas suffisant, mais avec le Département de la @seinesaintdenis nous continuons d’accroître nos efforts, avec notre Observatoire départemental des violences faites aux femmes, créé en 2002 (9/10)
— Stéphane Troussel (@StephanTroussel) November 23, 2021
Face à ces constats, il a présenté un plan d’action de 2,3 millions d’euros pour l’année 2022. Objectifs : renforcer la prévention sur les risques de la prostitution dans les écoles et au sein des familles ; ouvrir des espaces d’accueil pour les victimes et notamment des consultations de traitement du psycho-traumatisme ; former les professionnels qui accueillent ces victimes mineures ; créer une permanence contre les violences pour les femmes sourdes et malentendantes. Par ailleurs, dès jeudi 25 novembre, 40.000 «violentomètres», qui permettent de mesurer le degré de violence au sein d’un couple et qui donne les numéros d’urgence, seront distribués dans le département sous forme d’emballages de baguettes ou de sacs à pain.
Le 15 novembre dernier, le gouvernement a également lancé un plan de lutte contre la prostitution des mineurs à l’échelle nationale qui repose sur la sensibilisation, l’amélioration du repérage et l’accompagnement des mineurs en situation prostitutionnelle.