Les voix qui dénoncent des violences sexuelles et sexistes perpétrées à l'Ecole normale supérieure (ENS) de Lyon sont arrivées jusqu'aux oreilles du gouvernement. Mercredi 24 mars, le ministère de l'Enseignement supérieur a décidé d'ouvrir une enquête au sein de l'établissement.
L'Inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche (IGESR) a été saisie pour mener les investigations. Selon franceinfo, l'objectif est notamment d'«évaluer les mesures qui sont concrètement mises en oeuvre en matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles». A ce sujet, les étudiants et syndicats de l'ENS Lyon soulignent justement l'absence de dispositif d'écoute et d'accompagnement des victimes.
Pourtant, en 2017, dans le sillage du mouvement #MeToo, Frédérique Vidal, ministre de l'Enseignement supérieur, avait demandé à toutes les universités et grandes écoles de se doter d'une cellule dédiée aux questions de harcèlement et de violences sexistes et sexuelles, et ce dès la rentrée de septembre 2018. Selon les chiffres du ministère, «95% des universités» disposaient d'une telle structure en octobre 2019. L'ENS Lyon, elle, y travaille toujours.
Aussi, la libération de la parole au sein de Sciences Po, en début d'année, a encouragé les étudiants de l'ENS Lyon à se faire entendre. Le 25 février dernier, une cinquantaine d'entre eux se sont rassemblés pour dénoncer «le déni de la présidence».
Ils s'appuient notamment sur les résultats d'une enquête menée en interne par les élus CGT en 2019, au travers d'un questionnaire envoyé au personnel et aux étudiants de l'ENS Lyon. Les 165 réponses obtenues montrent que 46% des femmes ayant participé ont déjà vécu des discriminations sexistes. 25% font état de blagues répétées à connotation sexuelle, y compris de la part de supérieurs hiérarchiques, et 15% des interrogées se disent victimes d'agressions sexuelles.
11 signalements depuis septembre
Ces chiffres, relayés par franceinfo, ont été présentés à la direction de l'établissement le 5 février dernier, lors du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Mais les élus étudiants comme les syndicats estiment ne pas avoir été entendus. Déplorant des procédures disciplinaires «mises sous le tapis», ils affirment avoir recueillis 11 signalements de violences depuis le mois de septembre.
Ce n'est pas la première fois que l'ENS Lyon est mise en cause dans des affaires de violences sexistes et sexuelles. En 2018, une enquête de Mediacités relatait déjà trois cas de harcèlement sexuel au sein de l'école, jugeant la direction «frileuse» et «soucieuse de préserver la réputation d'excellence de l'établissement».
Avec l'ouverture de cette enquête, le ministère de l'Enseignement supérieur a l'intention d'«identifier les freins et les lacunes» en matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles au sein de l'ENS Lyon afin de pouvoir, à terme, «formuler des recommandations à destination de l'établissement».