Trois victimes du terrorisme reprochent à Twitter de ne pas avoir collaboré avec la justice française dans des cas de harcèlement sur le réseau social. Le tribunal correctionnel de Paris doit rendre son jugement ce lundi 27 mars.
Leurs plaintes classées sans suite à cause de l’inaction de Twitter ? C’est ce qu’estiment Aurélia Gilbert, rescapée du Bataclan, Georges Salines, père d’une victime de l’attentat, et Nicolas Hénin, ancien journaliste et otage de Daesh en 2013, après avoir vu le réseau social ne pas répondre aux demandes de la justice française, alors qu’ils étaient la cible de message haineux.
Ce lundi 27 mars, le tribunal correctionnel doit rendre son jugement dans ce dossier.
Celui-ci avait démarré lorsque les trois avaient porté plainte après avoir été visés par des cyberharceleurs, en 2019 et 2020, alors qu’ils s’étaient prononcés en faveur du rapatriement des enfants de jihadistes présents dans les camps de Syrie. Des réquisitions avaient été adressées à Twitter, afin de permettre de remonter la trace des auteurs des messages. L’entreprise n’avait pas répondu ou refusé ces demandes, entraînant un classement sans suite des enquêtes.
«L’impunité de Twitter»
«Tout le monde a fait son travail et la justice est bloquée par Twitter, c’est inacceptable et insuffisant», avait pointé à l’audience Me Laura Ben Kemoun, pour les parties civiles. «(L'entreprise) décide tout simplement d’inventer des nouvelles règles du jeu». Aurelia Gilbert, dont le numéro de téléphone avait été diffusé sur la plate-forme, a de son côté dénoncé «l’impunité de Twitter».
La citation à comparaitre vise ainsi Twitter Incorporation (basée à San Francisco, aux Etats-Unis), Twitter International Company (Dublin, Irlande) et Twitter France (Paris) pour complicité d’injure et de provocation non suivie d’effet, et refus de déférer à une demande d’une autorité judiciaire. Il avait d’ores-et-déjà été acté, lors de l’audience, que les poursuites pour complicité d’injure et de provocation ne pouvaient être retenues, pour des questions de procédure. La procureure avait également indiqué que malgré le constat des parties civiles sur la difficulté à poursuivre les cyberharceleurs, qu’elle partageait, les procédures internationales s’imposaient au parquet.
L’avocat de Twitter, Me Karim Beylouni, a ainsi plaidé la relaxe, pointant que les entités françaises et américaines de l’entreprise n'avaient pas qualité d’hébergeur en France, et que seule l’entité irlandaise aurait dû être visée par les réquisitions. Pour les mêmes infractions, Twitter France avait d’ailleurs été relaxé, en mai 2022.
En revanche, au civil, des associations anti-discriminations avaient obtenu que Twitter détaille ses moyens de lutte contre la haine en ligne, en première instance puis en appel. Un pourvoi en cassation a été formé.