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«Boléro» de Ravel : la question des droits d’auteurs examinée par la justice française ce lundi

Les pouvoirs de la Sacem sont au coeur de la décision à venir. [JEAN-PIERRE MULLER / AFP]

Alors que les héritiers d’Alexandre Benois, un collaborateur de Maurice Ravel, tentent de faire reconnaître leur aïeul comme l’un des auteurs du «Boléro», pour la Sacem, il ne s’agit que d’une œuvre de fiction. La décision de la justice est attendue dans la journée.

Le «Boléro» une œuvre collaborative ? Cette épineuse question a été abordée mercredi 18 juin au tribunal judiciaire de Nanterre, dans le cadre de l'affaire des droits d'auteur liés à l'une des pièces de musique classique les plus diffusées au monde. Pour les ayants droit d'Alexandre Benois, proche collaborateur de Maurice Ravel (1875-1937), refuser de reconnaître leur aïeul comme coauteur de ce succès planétaire n'est pas un droit que la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem) peut s'arroger.

Le «Boléro», arguent-ils en citant plusieurs éléments historiques, est une «œuvre de collaboration» avec le peintre et décorateur russe. Ces héritiers avaient d’ailleurs assigné la Sacem en 2018 après le refus – à deux reprises - de l’institution d’inscrire Alexandre Benois comme coauteur de l’œuvre.

«Fiction» historique, «imagination» débordante, «évitement du débat initial», a répliqué la Sacem.

Une succession de preuve

L'enjeu est de taille : si la Sacem accède à cette demande, le «Boléro», tombé dans le domaine public en 2016, serait selon elle protégé jusqu'au 1er mai 2039, Alexandre Benois étant décédé en 1960. D’après les ayants droit de d’Alexandre Benois, le «Boléro» est à l'origine la musique d'un ballet créé à l'Opéra de Paris en 1928.

La présence du nom de Benois sur l'argument de deux ballets représentés le soir de la première de l'œuvre de Maurice Ravel en 1928, les déclarations de Louis Laloy, secrétaire général de l'Opéra de Paris, qui écrit dans Le Figaro qu'Alexandre Benois était «l’auteur» des trois spectacles, ou encore le courrier d'un directeur juridique de la Sacem dans les années 1980 mentionnant la collaboration avec la chorégraphe du ballet, Bronislava Nijinska... Avec cette succession de preuve il y a en outre très peu de place pour le doute. Pour l’avocat de la succession Benois, la musique de ballet est l’œuvre non pas d’un, mais bien de plusieurs artistes.

La Sacem, une simple «chambre d’enregistrement»

Au-delà des éléments historiques, l'enjeu principal de l'audience s'est révélé être le rôle de la Sacem dans la reconnaissance d'un éventuel coauteur de la célèbre œuvre. «Pour la Sacem il y a le droit d'auteur et le droit du Boléro. A œuvre d'exception, régime d'exception», a expliqué l’avocat de la succession Benois.

La pièce de musique a été protégée pendant 78 ans et quatre mois, car en France, les droits d'une œuvre tombent 70 ans après la mort de l'auteur - 1938 dans le cas de Maurice Ravel. La loi prévoit néanmoins des prorogations qui visent à compenser le manque à gagner des artistes français durant les deux guerres mondiales, ce qui portait la protection jusqu'au 1er mai 2016. La Sacem aurait-elle dû agir en simple «chambre d'enregistrement» comme le demandent les requérants, ou était-elle fondée à refuser qu'Alexandre Benois soit reconnu comme coauteur ?

Alors que «Boléro», le biopic sur Maurice Ravel est actuellement à l’affiche, le dénouement de cette bataille judiciaire est proche. La décision du tribunal judiciaire de Nanterre est en effet attendu dans la journée.

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