L’heure de la reprise a sonné. A l'arrêt depuis le 14 mars 2020, le célèbre cabaret du boulevard de Clichy à la façade rougeoyante rouvrira ses portes vendredi 10 septembre, quelques jours avant le Lido et quelques semaines avant le Crazy Horse.
Une réouverture qu’il prépare depuis trois mois. Sur scène, en coulisses, plus de 450 personnes s’activent. Il faut relancer la machine, préparer les corps à la reprise de l’activité, retrouver ses marques, se réapproprier les chorégraphies, finaliser les costumes. Un travail de longue haleine amorcé en juin, explique Jean-Victor Clerico, directeur général du Moulin rouge. « Les danseurs répètent depuis le mois de juin. Il nous faut cinq à six semaines de répétitions pour remettre le spectacle en route. Entre juin et aujourd’hui, nous avons fait revenir tout le personnel, tous mis au chômage partiel depuis le 14 mars », souligne-t-il.
Cours de danse cinq jours par semaine, remise en forme intensive, le programme des 80 artistes est chargé depuis mi-juin, et il s’accélère depuis une semaine avec «une répétition générale chaque soir», note-t-il. «Nous avons plus de 60 artistes sur scène, il faut que tout le monde soit en symbiose». De leurs côtés, les costumiers s’affairent sur les 1000 costumes et 800 paires de chaussures que compte l’Institution.
Sans compter qu’il « fallait relancer la billetterie », poursuit Jean-Victor Clerico. « Il fallait un minimum de réservations et elles sont assez encourageantes », constate-t-il, précisant cependant être « loin de ce que l’on faisait avant ». L’établissement accueille 550 000 spectateurs par an, dont 55 % de clientèles étrangères et 45 % de clientèle française. « A l’heure actuelle, il y a une forte baisse de la clientèle étrangère mais les intentions de commandes de fin d’année et pour le printemps 2022 regroupent pas mal de nationalités », explique-t-il. Et il se veut optimiste : « Paris ne souffre pas d’une image négative, qui pourrait limiter le flux de voyageurs et les spectateurs ont envie de retrouver les salles ».
Une réouverture quatre jours par semaine
Dans ce contexte, le Moulin Rouge présentera à nouveau deux spectacles par soir dès vendredi, mais seulement quatre jours par semaine - du jeudi au dimanche - contre 7 jours sur 7 habituellement. Autre aménagement, la jauge a été baissée. En cause, la configuration de la salle, inhérente aux spectacles de cabarets, qui accueillent un public attablé. « Normalement nous accueillons 850 personnes. Là nous accueillerons entre 450 et 500 personnes. Avant sur une même table, nous pouvions mettre des spectateurs qui ne se connaissaient pas. C’est aussi ça, l’esprit de convivialité du cabaret. Pour la reprise, nous ne mélangeons pas les spectateurs, de ce fait, mécaniquement, cela fait baisser la jauge ». Pour les fêtes de fin d’année, l’institution compte bien, en revanche, retrouver un rythme de croisière plus traditionnel et proposera deux spectacles par soirs, sept jours sur sept.
Nouveaux décors et nouveaux costumes
En attendant, les retrouvailles avec les spectateurs se feront avec la revue « Féérie », sans oublier l’emblématique French Cancan, « le tableau le plus compliqué, le plus exigeant pour les corps, qui demandent le plus de temps de répétition », précise son directeur. Un spectacle qui sera doté de nouveaux décors et costumes. « On a profité de la fermeture imposée pour faire des améliorations dans la salle, des travaux d’agrandissement de la cage scénique, refaire les loges. On a refait des décors et des jeux entiers de costumes ». Des costumes et des cuirs de chaussures qui, remisés au placard pendant un an et demi, ont séché, craquelé, faute d’être utilisés. Il faut dire que jamais le Moulin Rouge n’avait été fermé aussi longtemps depuis le début du 20e siècle, et l’incendie qui a frappé l’établissement en 1915. Une fermeture aux conséquences financières lourdes. « Habituellement notre chiffre d’affaires est de 60 millions. L’année dernière nous avons perdu 85 % du chiffre d’affaires et un peu plus de 90 % cette année, car on rouvre avec moins de spectateurs », souligne Jean-Victor Clerico, qui n’attend pas un retour à l’équilibre avant 2023.
Mais pour l’instant, l’heure est aux réjouissances et à l’excitation des retrouvailles. Jean-Victor Clerico compte ainsi les heures avant la réouverture de l'un des plus fameux cabarets parisiens. Il sera suivi par le Lido, le 16 septembre prochain, qui célèbrera cette année ses 75 ans, et le Crazy Horse, dont la réouverture annoncée pour le 9 septembre sera finalement repoussée de quelques semaines. Que la fête recommence.