Il a signé plus de 500 musiques de films. Le compositeur et chef d'orchestre italien Ennio Morricone est mort le 6 juillet dernier à l'âge de 91 ans, des suites d'une mauvaise chute.
Le fidèle compagnon du réalisateur et maître du western spaghetti Sergio Leone («Le Bon, la Brute et le Truand») est décédé dans une clinique de Rome où il était hospitalisé. Il souffrait d'une fracture du fémur.
«Ennio Morricone s'est éteint à l'aube du 6 juillet avec le réconfort de la foi. (…) Pleinement lucide et d'une grande dignité jusqu'au dernier moment», a expliqué l’avocat et ami de la famille, Giorgio Assuma, dans un communiqué.
Ce maestro et bourreau de travail laissera son empreinte grâce aux inoubliables bandes-originales des œuvres de Pier Paolo Pasolini, de Brian de Palma ou encore de Terrence Malick ou d'Oliver Stone. Sa composition la plus mémorable restera sans doute le lancinant air d'harmonica joué par Charles Bronson dans «Il était une fois dans l'Ouest» (1968).
Un enfant précoce et ambitieux
Né le 10 novembre 1928 à Rome, Ennio Morricone a commencé à composer à seulement six ans. A dix ans, il est inscrit au cours de trompette de la prestigieuse Académie nationale Sainte-Cécile à Rome, où il est remarqué par le grand professeur Goffredo Petrassi. Il a également étudié la composition, l'orchestration, l'orgue et s'initie à la musique sérielle. Après avoir débuté par la musique dite «sérieuse», il a commencé en 1961 à 33 ans au cinéma avec «Mission ultra-secrète» de Luciano Salce.
Trouvant les musiques de films italiens médiocres et mièvres, il souhaitait les renouveler et imposer un style plus «américain». La célébrité arriva avec «Pour une poignée de dollars» (1964) de Sergio Leone. Sa collaboration fructueuse avec le maître du western spaghetti lui a apporté ensuite une réputation internationale.
Mais Morricone ne se cantonnait pas au western. Ce Romain composait des bandes-originales pour des films d'époque comme «1900» ou «Vatel», des comédies telles que «La cage aux folles» et mettait en musique des films engagés : «Sacco et Vanzetti» («Here's to You» chanté par Joan Baez), «La classe ouvrière va au paradis» ou «La bataille d'Alger». La recette de son succès : «Quand on entre dans un film, la musique frappe à la porte, elle doit préparer le spectateur et sortir sans claquer la porte, sur la pointe des pieds».
Entre grand orchestre et tradition populaire
Discret et casanier, Ennio Morricone sortait peu de sa maison proche du Capitole à Rome. Un brin timide, il était mal à l'aise face aux applaudissements lors de ses concerts. Pendant toute sa carrière, l'homme a jonglé entre «musique légère» et classique, cinéma et télévision. L'histoire du cinéma retiendra surtout, outre «Il était une fois dans l'Ouest», «Il était une fois en Amérique» et «Le bon, la brute et le truand» de Sergio Leone, ou encore «Théorème» de Pier Paolo Pasolini. Souvent d'ailleurs, ces chefs-d’œuvre ont d'abord été connus et aimés pour leurs musiques. Le génie d'Ennio Morricone résidait dans l'impureté, ses emprunts apparemment anachroniques au néoclassicisme et au jazz, ou même au pop-rock.
Il comptait aussi à son actif près de 80 compositions classiques, de musique de chambre et pour orchestre. Membre du Gruppo di Improvvisazione Nuova Consonanza, il a composé en particulier pour piano. S'il avait souvent l'air inquiet, derrière ses lunettes sévères, le maestro dirigeait aussi avec brio de grands orchestres, comme celui de Milan. Grand amoureux de la chanson, il s'est associé à la star portugaise de fado Dulce Pontes le temps d'un disque, «Focus» (Universal), et à la chanteuse française Mireille Mathieu pour l'album «Mireille Mathieu chante Ennio Morricone» (1974).
Le composition et chef d'orchestre avait reçu en 2007 un Oscar pour l'ensemble de sa carrière, «une belle surprise» à laquelle il ne s'attendait plus, puis un autre en 2016 pour le film «Les huit salopards» réalisé par Quentin Tarantino.