Les vagues de chaleur et la sécheresse déstabilisent les productions de fraises. Mûries en avance à cause de la météo exceptionnelle du moi de mai, certaines variétés peinent à trouver des acheteurs aux marges rentables pour les producteurs.
Agriculteurs et producteurs du Tarn-et-Garonne témoignent. Avec des températures largement au-dessus des moyennes de saison, la maturation des fraises se fait deux fois plus vite qu'en temps normal, les obligeant à jeter la moitié de leur récolte au mois de mai. Une situation devenue invivable.
«On n'arrive pas à suivre, on est dépassé ! Ça fait 12 ans que je fais des fraises, je n'ai jamais vu ça», assure Laurent Dirat face à ses 100.000 fraisiers répartis sur cinq hectares. La quarantaine de cueilleurs de toutes les nationalités, sur le pied de guerre depuis 7h, s'active entre les rangs de fraisiers. Il faut trier les fraises pour ne conserver que celles qui n'ont pas encore trop mûri.
«Un épisode caniculaire, c'est le pire, il vaut peut-être mieux qu'il pleuve», se désole également Jean-Pascal Mourgues, responsable de la coopérative Mourgues Fruits qui expédie les fraises récoltées dans les champs de Laurent Dirat, à Gramont.
«Crise conjoncturelle»
Habituellement, les cueilleurs passent une fois par semaine dans chaque rang. Pour suivre la cadence de maturation, ils devraient y passer tous les deux jours. «C'est impossible, donc ça nous contraint à abandonner une partie de la parcelle», explique le Tarn-et-Garonnais qui assure avoir dû jeter «les deux tiers de la récolte sur les quatre derniers jours».
Xavier Mas, président de l'Association d’organisations de producteurs nationale de fraises, n'hésite pas à parler de «crise conjoncturelle» après près de deux semaines de fortes chaleurs dont les répercussions sur les prix fragilisent la filière. «Les prix sont 20% plus bas que sur la moyenne des cinq dernières années à la même époque», souligne-t-il.
Le constat est confirmé par Philippe Navarro, posté derrière son stand de fruits et légumes dans le centre de Toulouse, comme tous les jours depuis 35 ans. «Plus il fait chaud, plus les prix sont élevés car il faut écouler les volumes rapidement», explique ce primeur. Une offre qui explose et des critères rigides, pour pouvoir en vendre le maximum, qui forcent les producteurs à écarter une bonne partie de la récolte.
«On a eu des retours de clients faisant état de gros problèmes de qualité», explique Jean-Pascal Mourgues dont la société travaille avec une douzaine de producteurs répartis en Tarn-et-Garonne, Lot-et-Garonne et Dordogne. Les températures «réduisent la taille du fruit, dégradent sa tenue et ont un impact sur la qualité», décrit Xavier Mas. Ainsi, les cultivateurs arrosent plus qu'à l'accoutumée pour lutter et ralentir la maturation.