Destinés aux musulmans, juifs ou chrétiens, aux intellectuels, motards ou geeks, les sites de rencontres "par affinités" se multiplient et se communautarisent.
Précurseur, Mektoube.fr, "numéro 1 de la rencontre musulmane et maghrébine", est né en 2006. Il compte "un million d'inscrits, Français d'origine maghrébine à 90%, âgés de 25 à 35 ans", se réjouit Laouari Medjebeur, son fondateur avec Thomas Nomaksteinsky.
Ouvert aux non musulmans, il répond à une "vraie demande des internautes qui recherchent sur google des sites de rencontre musulmans, terme avant tout culturel", explique M. Medjebeur à l'AFP.
Les célibataires qui le fréquentent - 50% d'hommes et 50% de femmes dont "20% de divorcés avec enfants" - "recherchent une certaine endogamie (obligation pour les membres de certaines tribus de se marier dans leur propre tribu, ndlr), culturelle et religieuse", explique-t-il, réfutant tout sectarisme.
C'est "le manque de respect de certains hommes sur les sites généralistes" et "le nom du site, +Mektoube=le destin+" qui a poussé Djamila, 32 ans, auxiliaire puéricultrice, à s'y inscrire il y a quatre ans.
"Cela n'a rien à voir avec la religion", assure-t-elle à l'AFP, s'imaginant bien mariée à un non musulman "pourvu qu'il soit ouvert à (sa) religion".
A l'instar de Mektoube, où seuls les hommes payent, sont nés JDate, "premier site de rencontres pour les célibataires juifs" proposant de rencontrer des partenaires de confession judaïque, et Theotokos, un site chrétien "pour donner du sens à vos rencontres".
"Les solitudes se banalisent. Le sentiment amical ou amoureux semble être entré dans l'ère de la consommation", déplorent les fondateurs de Theotokos sur la page d'accueil.
Ils expliquent avoir voulu créer un "site différent", "au climat serein" pour favoriser "des échanges riches et profonds sous le regard de Dieu". Interrogée par l'AFP, une de ses représentantes assure que chrétiens et non chrétiens y "sont accueillis d'abord dans la joie".
Extraconjugal
A chacun sa religion: rencontre-motard.com s'adresse aux "passionné(e)s des 2 roues, célibataires avant tout !" et avec Geekmemore.com, les passionnés de culture 2.0 les plus timides peuvent "rencontrer leur moitié, sans avoir à se prendre la tête !".
Happy Few Concept s'adresse lui aux "intellos": diplômés des grandes écoles et représentants des professions libérales. Elitiste ? Lors de sa création en 2011, sa fondatrice Soizic Bertrou disait assumer pleinement cette critique.
L'idée, soulignait-elle, est "d'offrir un cadre qui leur inspire confiance" car "plus les centres d'intérêt sont proches, plus les chances de s'entendre sur la durée sont élevées".
"Faux", répond à l'AFP le sociologue Jean-Claude Kauffmann, qui a beaucoup travaillé sur le couple. "Ces sites, dit-il, reposent sur la croyance très répandue qu'on aurait plus de chance de trouver le bon partenaire en restant dans le même milieu culturel. Or ceci n'est vrai qu'à moitié, car tout couple repose sur un système complexe qui mélange une complicité et des complémentarités qui nécessitent de la différence".
"Le pire, ajoute-t-il, est que cette croyance génère une illusion gigantesque: on pourrait rester le même, et rajouter l'autre dans sa vie, sans changer (puisqu'on le choisit comme s'il était une sorte de double de soi). Or ceci est strictement impossible".
Car, souligne-t-il, la construction du couple "repose sur le goût de l'autre et l'acceptation de la différence, auxquels ne préparent pas du tout ces sites communautaires".
L'un des derniers nés, Gleeden.com, "1er site de rencontres extraconjugales pensé par des femmes", se targue d'ailleurs d'avoir "déjà 1,3 million de membres".