Une carrière et une longévité incroyables. Après 22 ans au plus haut niveau, le basketteur Amara Sy s’apprête à ranger ses sneakers pour de bon. L’ailier fort à la carrière prolifique tire sa révérence à la fin de la saison. Né dans la capitale française, l’international malien quitte les terrains dans un club de sa ville natale, le Paris Basketball.
Une retraite à 40 ans, après avoir remporté de multiples distinctions : deux titres de champion de France, deux Coupes de France, trois Leaders Cup et notamment un titre de champion du monde de 1 contre 1 en 2004.
Revenu sur ses terres natales en 2019, après deux saisons à Monaco, «L’Amiral» conclut en beauté une longue carrière fondée sur le travail et la passion. Pour CNEWS, il s’est confié sur le formidable chemin parcouru, le championnat de France, mais également sur son rendez-vous manqué avec les Bleus.
Amara, 22 ans de carrière professionnelle c’est extraordinaire. Vous attendiez-vous à une telle longévité ? Quel est votre secret ?
Déjà, je ne m’attendais pas du tout à faire une carrière aussi longue. A la base, quand j’ai commencé, je ne m’attendais même pas à faire une carrière. Plus de 22 ans de basket professionnel, je suis béni ! J’en suis conscient et c’est pour ça que j’en profite chaque jour. Le secret ? Beaucoup de travail mais aussi de la passion forcément. C’est beaucoup moins dur quand on aime ça. Si ce n’est pas le cas, c’est compliqué de se lever le matin. Les entraînements c’est dur et pas évident mais ça reste quand même du basket. On va dire que ça compense.
D’où vient cette passion, cet amour pour le basket ?
C’est venu au fil des années. A la base je suis plutôt un footballeur. J’ai découvert le basket à Cergy car tout le monde ne jouait qu’à ça dans mon quartier. J’ai ensuite pris ma première licence à 14 ans. C’est passé vite mais j’ai autant d’amour et de passion qu’à mes débuts.
Le Mali avait plus besoin de moi que l'Equipe de France
Vous avez joué pour la sélection du Mali. Cepedant, vous avez aussi été sollicité par les Bleus. Avez-vous des regrets de ne pas avoir répondu à cet appel ?
Non non non ! J’ai de très bons souvenirs avec la sélection du Mali. On a connu des hauts et des bas avec des souvenirs assez folkloriques (rires). Mais j’ai apprécié la découverte du basket africain, les nouvelles rencontres et les expériences. Ce sont des choses qui vont rester gravées en moi. Je n’ai pas de regret non plus concernant les Bleus. J’aurais pu y jouer en 2008 car la sélection française poussait pour que je les rejoigne mais je jouais déjà pour le Mali depuis 2001. Je ne me voyais pas leur tourner le dos, déjà pour une question de principe. Quand on se croise avec Vincent Collet (sélectionneur de l'équipe de France), à chaque fois il me fait la réflexion (rires). Comme je lui ai dit, à l’époque, «le Mali avait plus besoin de moi que l’équipe de France».
Vous avez côtoyé la NBA sans pouvoir y jouer. De quoi avez-vous manqué ?
Il a peut-être manqué une opportunité ou de la chance. Après comme ils disent là-bas (aux Etats-Unis) : «il faut être au bon endroit au bon moment». J’ai fait des workouts et ils étaient contents de moi. J’ai même joué en G League mais je n’ai pas été assez patient et je suis revenu en Europe au bout de deux mois. Je n’ai pas de regret car j’ai toujours tout donné. Quand on a fait appel à moi j’ai répondu présent. On va dire que ce n’était pas pour moi, à chacun son destin. Si j’étais resté en G League j’aurais peut-être eu une chance, peut être que j’aurais mal tourné en NBA (rires). On ne peut pas savoir ! Je ne regrette pas la carrière que j’ai eue. Je sais d’où je viens, j’ai commencé assez tard. Je sais que je suis béni.
Etre une locomotive du championnat
Vous effectuez votre dernière année au sein d’un club de votre ville, Paris Basketball. Vous êtes revenu alors que le club était en Pro B. Parlez-nous de ce projet…
Les dirigeants sont venus vers moi à Monaco en 2018, 2019. J’ai tout de suite accroché car c’est Paris déjà. J’ai toujours eu la volonté d’évoluer dans un club d’Ile-de-France mais ça ne s’est jamais fait hélas. Ils sont venus vers moi à un moment où je ne m’y attendais pas. J’étais bien apprécié à Monaco et ma famille s’y sentait bien. Je ne me voyais pas jouer en Pro B non plus. Mais quand ils m’ont expliqué leur projet, j’ai vu leur ambition et la possibilité de revenir au bercail. Je n’ai pas hésité et je ne regrette pas. On devait monter en 3 ans, on l’a fait en 2 saisons. On n'est pas dans la meilleure des positions actuellement (15e sur 18 après 15 journées), mais on travaille pour atteindre nos objectifs.
Quel sont les objectifs du club ?
Cette année, c’est de se maintenir et plus si affinités. Mais une fois bien installés dans le championnat, si on peut faire bonne figure au niveau européen et être une locomotive du championnat, comme l’ASVEL et Monaco, ça serait super.
Que manque-t-il pour le moment ?
De l’expérience, car il en faut un minimum. Même si c’est notre première saison au plus haut niveau, on a réussi quelque chose d’intéressant. Mais on a des prétentions, on vise le top et on ne se fixe surtout aucune limite sur et en dehors du parquet. Tout le monde au club veut repousser les limites. De plus, depuis le début de saison, on constate un engouement pas négligeable autour du club et pourtant on n’est pas le seul club parisien. En peu de temps on a réussi à créer une identité forte.
Après cette saison, resterez-vous tout de même au Paris Basket ?
C’est prévu que je reste au club, mais dans un autre rôle forcément. On va participer d’une autre manière pour pousser ce projet le plus haut possible.
Les deux clubs phares du championnat sont l’ASVEL et Monaco, deux clubs que vous connaissez bien pour y avoir évolué…
Ces deux clubs peuvent rivaliser avec le haut niveau européen. L’ASVEL mise plus sur la formation et accompagne des joueurs dès le plus jeune âge pour les amener au plus haut niveau. Ils ont de belles infrastructures, une nouvelle salle qui arrive et travaillent main dans la main avec l’Olympique Lyonnais. Quant à Monaco, je sais qu’ils ont pour ambition de rester en Euroligue. C’est pour ça qu’ils ont sollicité de gros sponsors pour rivaliser financièrement. Ils ont également des investisseurs intéressants sur le Rocher.
Je ne me vois pas coacher
Sur un plan plus personnel, vous êtes également président des Spartiates de Cergy. Quel est votre ambition ?
Le projet est clair : atteindre le plus haut niveau le plus rapidement possible. Pour l’instant on est en Nationale 1 (NM1) et il y a encore du chemin. On est une terre de basket. Sans formation, c’est l’une des villes qui a sorti le plus de professionnels. Il y a du potentiel et cela même dans le foot. Le club doit garder le côté indépendant de Cergy en restant dans notre coin dans le Nord ouest de Paris. Il y a de la place et on fait des choses pas mal. On souhaite aller vite mais sans brûler les étapes. J’en suis à ma 4e année de président, j’apprends et j’ai la chance d’avoir une belle équipe autour de moi, dévouée et qui ne rechigne pas. Forcément ça ne peut que me faciliter la tâche.
On ne risque pas de vous voir revêtir la tenue de Cergy pour boucler la boucle ?
Ça aurait été bon de porter le maillot de Cergy, c’était ma première tunique officielle ! Mais ça va être compliqué de jouer pour la 1, peut-être pour l’équipe 2. Je ne peux pas m’entraîner une fois par semaine et me pointer au match, ça ne serait pas le bon message à envoyer.
Votre avenir se dessine donc toujours dans le basket, mais pas au bord du terrain…
Oui, plus du côté de la direction. Je ne me vois pas coacher. Quand on a affaire à des mecs comme nous on n’est jamais content, on a de forts caractères. Si je suis coach et que je tombe sur un joueur comme moi… (rires)