La politique de forte taxation des cigarettes classiques n'aurait pas d'impact significatif sur la baisse de la consommation de tabac. Par ailleurs, 83% des Français craignent qu'une hausse des taxes puisse favoriser la contrebande, selon une étude Povaddo dévoilée ce mardi 4 avril.
Il s'agit de l'une des études les plus vastes menée autour du tabagisme. Commandée par le groupe cigarettier Philip Morris International, et réalisée par l'institut de sondage Povaddo, une enquête, menée en novembre 2022, a passé au crible le comportement de plus de 13.000 citoyens parmi 13 pays de l'Union européenne, dont la France. Les résultats ont été partagés ce mardi 4 avril au Hub Institute à Paris.
Il en ressort notamment que les Français sont plus sceptiques que leurs voisins européens quant au rôle que peut jouer une politique de taxation forte du tabac censée faire prendre des choix meilleurs pour la santé. Pire, plus de huit Français sur dix (83%) craignent qu’une hausse importante des taxes puisse inciter à développer le commerce illicite.
Une crainte qui semble se traduire dans les faits. En 2021, 15,1 milliards de cigarettes illicites ont été vendues dans l'Hexagone, soit l'équivalent de 29% du marché de la vente de tabac, un chiffre important puisqu'en 2017 cette proportion n'était que de 13%, selon des chiffres du cabinet de conseil KPMG.
Un boom du marché de la contrebande qui indique un report important de la consommation basée sur des commerces illicites où les paquets de cigarettes sont vendus à des prix plus attractifs, alors que le prix du paquet a dépassé les 10 euros dans notre pays. A titre de comparaison, chez nos voisins italiens cette proportion de la contrebande n'est que de 2,2%.
Un manque d'information pointé du doigt
Parallèlement, l'étude semble démontrer que la politique publique menée contre le tabagisme resterait au point mort. «69% des Français souhaitent que les fumeurs adultes reçoivent des informations précises et scientifiquement fondées sur la moindre nocivité des alternatives sans combustion», explique le document.
En outre, «64 % pensent que les gouvernements devraient avoir des politiques qui informent sur ces produits de substitution et moins d’un fumeur sur deux (41%) connaît la différence entre les cigarettes électroniques, les cigarettes électroniques jetables et le tabac chauffé», ajoute William Stewart, président de Povaddo. Et de préciser que : «56 % pensent que la politique du gouvernement n’est pas adéquate, tandis que 72% des fumeurs interrogés ne pensent pas arrêter de fumer».
«Il y a pourtant des politiques publiques en faveur de la santé qui portent leurs fruits, comme "les 5 fruits et légumes par jour", "les 10.000 pas par jour", "évitez de manger gras et trop sucré", mais qu’en est-il de la politique de lutte contre la consommation de tabac ? Les gens ont conscience de ce qui est fait, mais l’étude montre que cela ne porte pas ses fruits. Il y a également une perception que la taxation n'est pas pour réduire "ma" consommation mais pour accroître les finances publiques», abonde Jean-Daniel Lévy, directeur délégué chez Harris Interactive.
Une position des Français à mettre en corrélation avec la question du pouvoir d'achat qui n'a jamais été aussi présente. Lors des trois dernières élections présidentielles cette question a beaucoup évolué jusqu'à devenir centrale. «Le pouvoir d'achat était une des préoccupations chez 36% des Français en 2012, puis 31% en 2017 avant d'atteindre 52% en 2022», souligne encore Jean-Daniel Lévy. Et de poursuivre : «mais la lutte contre la consommation de tabac n’est quasiment pas un sujet qui préoccupe les Français. Ce type de débat n’est pas présent pendant la présidentielle et il n'y a toujours pas de confrontation forte autour de ce sujet».
D'où ce besoin d'information et d'accompagnement réclamé par les sondés. «Pour les fumeurs, d’autant plus que pour les Français (54% vs 49%), l’Union européenne et les gouvernements devraient prendre des mesures réellement faites pour eux et qui puissent améliorer leur vie», précise l'étude de Povaddo.