Le Jeu de Paume accueille une riche rétrospective consacrée au photographe Philippe Halsman. Fidèle collaborateur de Salvador Dalí et de Marilyn Monroe, signature majeure de la presse magazine d’après-guerre, il a fait du portrait un format résolument moderne.
Les cheveux à l’air libre, la pose incontrôlée, elle est plus relâchée que d’ordinaire. Moins sophistiquée, moins fausse aussi. Sur la photo prise en 1959 par Philippe Halsman, Marilyn Monroe, alors au faîte de sa gloire, est saisie devant un fond bleu, enveloppée dans une scintillante robe noire frangée, de profil et en l’air. Improbable position pour une star.
Après une première expérience peu appréciée par Marilyn en 1954, il a fallu toute la persévérance du photographe pour la convaincre de s’adonner à nouveau à une séance de “jumpology” devant son objectif. Derrière ce terme, se cache l’une des innovations-phares de Philippe Halsman : demander au sujet de sauter afin qu’il cesse d’être dans le contrôle de son image et révèle, dans le mouvement, quelque chose de sa tempérament. Grace Kelly, Fernandel, Sophia Loren et même le Duc et le Duchesse de Windsor se sont, entre autres, prêtés au jeu.
A 101 reprises à la une de “Life”
Halsman a traversé son époque en parvenant à un sans-faute professionnel, auteur d’images populaires et apprécié de la critique. Suffisamment créatif pour ne pas signer des portraits convenus. Suffisamment talentueux pour approcher et mettre en scène André Gide, Marc Chagall, Winston Churchill, Jean Cocteau, Alfred Hitchcock, Audrey Hepburn, Mohamed Ali, Louis Armstrong, Andy Warhol…
Né en 1906 à Riga, en Lettonie, il ouvre son studio à Paris en 1932 avant de s’exiler à New York lorsque la guerre éclate. Sa carrière décolle avec l’ascension de la presse magazine qui, pour vendre, recherche toujours de nouvelles images originales de célébrités pour recouvrir ses unes. Halsman travaille pour les titres de mode américains “Vogue” et “Harper’s Bazaar”, pour les hebdomadaires français “Vu” et “Le Monde Illustré”. Mais c’est le magazine “Life” qui fait sa réputation en mettant à cent une reprises l’une de ses photos en couverture.
[Dalí Atomicus, 1948. © 2015 Philippe Halsman Archive / Magnum Photos. Fundacio Gala-Salvador Dalí, Figueres, 2015.]
“Atteindre l’essence même des choses”
L’exposition du Jeu de Paume regroupe de très nombreuses oeuvres de Halsman, depuis ses débuts parisiens jusqu’à sa fructueuse collaboration de plus de trente-cinq ans avec Salvador Dalí, achevée uniquement à la mort du photographe.
On trouve là parmi les plus passionnantes créations de Halsman : avec Dalí comme sujet, ses idées visuelles fourmillent davantage, son humour et son excentricité sortent renforcés. Fasciné par les moustaches du peintre espagnol, il a su faire ce qu’il s’était fixé comme suprême objectif : “atteindre l’essence même des choses”, capter une personnalité.
"Philippe Halsman : Etonnez-moi !", jusqu’au 24 janvier 2016, Jeu de Paume (8e).