D’après une étude chinoise, les personnes qui ont été infectées par le nouveau coronavirus voient leurs anticorps fortement baisser deux mois après leur guérison.
Dans cette enquête, publiée jeudi dans Nature Medicine, les chercheurs avertissent des risques d'instituer des «passeports d'immunité» qui seraient censés assurer que leurs détenteurs sont protégés contre la maladie.
L'étude décrit sur le plan immunologique et clinique, le cas de 37 personnes sans symptômes dont l'infection a été diagnostiquée par un test virologique (RT-PCR par prélèvement naso-pharyngé) dans le district de Wanzhou (sud-ouest de la Chine) avant le 10 avril dernier.
Parmi ces 37 patients asymptomatiques, 22 étaient des femmes et 15 des hommes, âgés de 8 à 75 ans.
Les auteurs, Ai-Long Hua de l'Université médicale de Chongqing et ses collègues, ont constaté que ces patients, mis à l'isolement en hôpital, avaient une durée médiane d'excrétion virale de 19 jours, contre 14 jours chez 37 patients présentant des symptômes (fièvre, toux, essoufflement...). Cette durée d'excrétion n'équivaut pas cependant à une infectiosité, qui reste à évaluer.
Huit semaines après la sortie de l'hôpital, les niveaux d'anticorps neutralisants, qui confèrent a priori une immunité contre le virus, avaient diminué chez 81,1% des patients sans symptômes, contre 62,2% chez les patients symptomatiques.
poursuivre la recherche «de tout urgence»
Pour élucider davantage la réponse immunitaire, les chercheurs ont mesuré certaines substances (cytokines et chimiokines) dans le sang et observé leurs bas niveaux chez les patients asymptomatiques, montrant une réponse inflammatoire réduite. «Nous avons observé que les taux d'IgG et d'anticorps neutralisants chez une forte proportion de personnes qui se sont rétablies d'une infection par le SRAS-CoV-2 commencent à diminuer dans les 2 à 3 mois suivant l'infection», ont ajouté les scientifiques.
Ces données, ainsi que des analyses précédentes des anticorps neutralisants, mettent en évidence les risques potentiels d'utiliser des «passeports d'immunité» et plaident en faveur des interventions de santé publique (distanciation sociale, hygiène, isolement des groupes à haut risque, dépistage généralisé), d'après les auteurs.
Ils prônent de poursuivre la recherche «de tout urgence» sur des groupes plus importants de patients avec et sans symptômes pour déterminer la durée de l'immunité provenant des anticorps.
En dépit du petit nombre de patients, «cela correspond à certaines préoccupations selon lesquelles l'immunité naturelle aux coronavirus peut être de courte durée», selon le professeur d'immunologie britannique Danny Altmann, qui n'a pas participé à cette étude.