Ce vendredi 6 décembre, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, entend faire avancer l’accord de libre-échange UE-Mercosur à Montevideo, en Uruguay. Cependant, un bloc de pays autour de la France entend bloquer les discussions, notamment l’Italie.
Un traité très controversé. Si la Commission européenne est seule négociatrice des accords commerciaux au nom des Vingt-Sept, tout texte signé avec les cinq pays membres du Mercosur doit encore obtenir sa ratification en gagnant l’approbation d’au moins 15 États membres, représentant au moins 65% de la population de l’UE, puis en réunissant une majorité au Parlement européen. Mais une minorité de blocage peut stopper toute ratification.
Un combat mené par la France et Emmanuel Macron, qui, dans un appel téléphonique jeudi 5 décembre, a «redit» à Ursula von der Leyen que le projet d’accord commercial était «inacceptable en l’état», a affirmé l’Élysée. Après le Premier ministre polonais Donald Tusk, qui affirmait fin novembre qu’il n’accepterait pas le projet «sous cette forme», l’Italie a rejoint jeudi le front de refus.
«Les conditions ne sont pas réunies pour souscrire au texte actuel», ont affirmé des sources gouvernementales italiennes, relayées par l'AFP. Rome a estimé que «la signature peut avoir seulement lieu à condition que des protections adéquates et des compensations en cas de déséquilibres pour le secteur agricole» soient mises en place.
Et le trio déclaré n’est pas seul, puisque l’Autriche ou encore les Pays-Bas ont déjà exprimé des réticences.
Pour empêcher l’adoption du texte, la France avait besoin de rallier trois autres pays représentant plus de 35% des habitants l’UE, un seuil aisément franchi avec l’appui de Rome et de Varsovie.
La menace Trump presse les discussions
Avant son arrivée en Uruguay jeudi, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, avait affirmé sur X que «la ligne d’arrivée de l’accord UE-Mercosur» était «en vue». Elle doit donner ce vendredi une conférence de presse commune avec les présidents du Brésil, Luiz Inacio Lula Da Silva, de l’Argentine, Javier Milei, de l’Uruguay, Luis Lacalle Pou et du Paraguay, Santiago Peña.
Touchdown in Latin America
The finish line of the EU-Mercosur agreement is in sight.
Let’s work, let’s cross it.
We have the chance to create a market of 700 million people.
The largest trade and investment partnership the world has ever seen.
Both regions will benefit.— Ursula von der Leyen (@vonderleyen) December 5, 2024
Le projet de traité vise à supprimer la majorité des droits de douane entre l’Union européenne et le Mercosur, afin de créer un vaste marché de plus de 700 millions de consommateurs. Il s’agirait du «plus grand partenariat commercial et d’investissement jamais vu. Les deux régions en tireront profit», a affirmé Ursula von der Leyen.
Mais en Europe, les partisans de l’accord soulignent le besoin de débouchés pour les exportateurs et la nécessité de ne pas laisser le champ libre à la Chine, rival avec qui les relations commerciales se sont considérablement tendues.
L’accord permettrait à l’UE, déjà premier partenaire commercial du Mercosur, d’exporter plus facilement ses voitures, machines et produits pharmaceutiques. De l’autre côté, il permettrait aux pays sud-américains concernés d’écouler vers l’Europe de la viande, du sucre, du riz, du miel ou encore du soja.
Mais de nombreuses ONG et militants de gauche ont estimé que la création de cette vaste zone de libre-échange accélérerait la déforestation en Amazonie et aggraverait la crise climatique en augmentant les émissions de gaz à effet de serre. Greenpeace a dénoncé un texte «désastreux» pour l’environnement, sacrifié pour privilégier «les profits des entreprises».
En France, les agriculteurs craignent une concurrence déloyale des produits sud-américains, notamment brésiliens. Ils multiplient donc les manifestations depuis le mois de novembre.
Sous l’influence du Brésil côté sud-américain, de l’Allemagne et de l’Espagne côté européen, les deux blocs souhaitent pourtant finaliser les discussions avant l’arrivée en janvier de Donald Trump à la Maison Blanche et ses menaces d’augmentation des droits de douane tous azimuts.