Poursuivie pour «esclavage» et «traite d'êtres humains», l'influenceuse bien-être brésilienne Kat Torres vient d'être condamnée à huit ans de prison mardi 16 juillet. Prostitution, séquestration... L'ancienne mannequin aurait fait plus d'une vingtaine de victimes en miroitant une vie de rêve.
Elle accumulait un million d'abonnés sur Instagram. Hier, mardi 16 juillet, loin du glamour des réseaux sociaux, l'influenceuse brésilienne Kat Torres a été condamnée à huit ans de prison dans son pays pour «trafic d'êtres humains» et «esclavage». Plusieurs femmes ont ainsi déclaré avoir été escroquées, ou même exploitées par elle (Katiuscia Torres Soares de son vrai nom). Dans l'affaire, c'est surtout le cas de deux jeunes brésiliennes, portées disparues en 2022, qui a fait grand bruit.
une success story étalée sur les réseaux sociaux
Ancienne mannequin dans les années 2010, Kat Torres s'est reconvertie en influenceuse «bien-être», prodiguant des conseils pour améliorer la vie privée et la carrière de ses abonnés. Au programme du gourou : séances d'hypnoses, de méditations et exercices physiques dans le but d'attirer argent, amour et estime de soi.
À l'aide de son site web, elle offrait un abonnement payant pour ses services. La jeune femme de 31 ans affirmait même pouvoir résoudre les problèmes de ses fans, avec une simple consultation dite «premium», facturée 150 dollars, soit plus de 130 euros.
C'est avec ces promesses d'une vie meilleure que la Brésilienne serait parvenue à appâter plusieurs jeunes femmes chez elle, toutes attirées par l'histoire de sa vie, qu'elles pensaient pouvoir recréer. Des quartiers pauvres des favelas au monde de la mode, Kat Torres a en effet été mannequin chez Elite Model management à Paris, jusqu'à une prétendue relation avec l'acteur américain Leonardo DiCaprio.
Selon l'ancien colocataire de Kat Torres interrogé par la BBC, c'est lorsqu'elle a intégré la sphère hollywoodienne que l'influenceuse aurait changée, notamment après ses premières utilisations de l'ayahuasca, la «drogue du chamane», un hallucinogène qui provoque des visions et des états de transe.
Désillusion, désordre et urine de chat
Aux États-Unis, Kat Torres aurait commencé à proposer plusieurs postes «d'assistantes» à domicile. «Elle représentait l'espoir pour moi», a ainsi expliqué Ana à la BBC. Si elle ne compte pas parmi les deux femmes portées disparues en 2022, elle a néanmoins été l'une des victimes de l'influenceuse quelques années plus tôt, et a été un élément clé dans l'affaire.
Arrivée à New York pour rejoindre Kat Torres en 2019, Ana aurait vite déchanté : elle qui avait laissé ses études derrière elle, a été accueillie dans un appartement dont émanait une forte odeur. Les lieux étaient sales, en désordre, méconnaissable comparé à l'habitat parfait présenté sur les reseaux sociaux par l'influenceuse.
Ana était ainsi obligée de se rendre disponible à n'importe quel moment pour Kat Torres, qui semblait «incapable d'être seule» ou d'exécuter des tâches simples. Ana ne dormait que quelques heures, sur un canapé couvert d'urine de chat. Après trois mois, la jeune femme s'est finalement enfuie, sans n'avoir jamais reçu de salaire.
la peur de ses «pouvoirs» spirituels
Trois ans plus tard, en 2022, Kat Torres continuait toujours d'engager des «assistantes» pour vivre à ses côtés. Mariée et vivant alors dans une grande maison au Texas, elle a recruté trois femmes, dont Desirrê et Letícia.
Cette fois, les sévices de l'influenceuse brésilienne sont allé encore plus loin : les jeunes femmes n'avaient pas le droit de communiquer entre elles, étaient forcées de travailler en tant que strip-teaseuse ou de se prostituer. L'argent récolté, lui, était directement redonné à Kat Torres, qui pouvait les laisser dormir dans la rue si les montants n'étaient pas assez élevés.
Si les deux «assistantes» n'ont pas fui, à l'instar d'Ana, c'est parce qu'elles craignaient les «pouvoirs» spirituels de l'influenceuse. En effet, l'ancienne mannequin prétendait être capable de faire des prédictions, ou de les maudire.
une vingtaine de victimes
Sans nouvelles depuis plusieurs mois, les familles de Desirrê et Letícia se sont tournées vers les réseaux sociaux pour passer un appel au secours, ensuite repéré par les médias. Ana, l'une des premières victimes, est alors entrée en contact avec les autorités et le FBI.
Retrouvées grâce à des profils sur des sites d'escorte et de prostitution, les autorités américaines ont pris plusieurs semaines pour convaincre les deux victimes de se rendre à un rendez-vous de contrôle dans un commissariat, en novembre 2022.
Rapidement, le mois suivant, les jeunes femmes ont été rapatriées vers le Brésil, alors que Kat Torres, elle, a été expulsée des États-Unis pour son jugement.
Au total, plus de vingt femmes accuseraient l'ancienne mannequin, et beaucoup font l'objet d'un suivi psychiatrique. L'avocat de Kat Torres a déclaré à la BBC qu'elle ferait appel, et maintient son innocence.