En Géorgie, un projet de loi contre les «agents de l'étranger» suscite une forte contestation. Le texte est similaire à une loi russe utilisée pour réprimer les oppositions.
Un projet de loi controversé
Le Parlement géorgien a adopté mardi 7 mars en première lecture un projet de loi qui prévoit que les organisations recevant plus de 20% de leur financement de l'étranger soient obligées de s'enregistrer en tant qu'«agents de l'étranger», sous peine d'amendes.
Selon ses détracteurs, ce texte est liberticide. Et rappelle surtout une loi similaire adoptée en Russie en 2012, que le Kremlin utilise pour réprimer des médias, des organisations d'opposition ou des associations de défense des droits de l'homme, considérés comme des «agents étrangers».
de grandes manifestations
Mardi soir, des milliers de personnes ont exprimé leur colère, dans la capitale Tbilissi, lors de protestations dispersées à coups de gaz lacrymogènes et de canons à eau.
Police using water cannon against peaceful demonstrator waving EU flag outside the Georgian Parliament protesting the adoption of the Russian-style anti-NGO law. pic.twitter.com/AXS1HyzC9Y
— Formula NEWS | English (@FormulaGe) March 7, 2023
Le ministère géorgien de l'Intérieur a affirmé qu'au moins 66 personnes avaient été interpellées pendant cette manifestation, précisant qu'une cinquantaine de policiers et des «civils» avaient été blessés lors de heurts. Selon lui, des protestataires ont jeté des pierres et des «cocktails Molotov» sur la police, en tentant de mener une «attaque organisée» contre le Parlement géorgien.
L'opposition géorgienne, rejointe par des ONG, a appelé à de nouvelles manifestations ce mercredi. «A partir de 15h, les Géorgiens vont se réunir sur l'avenue Roustavéli (à Tbilissi, ndlr) et cela va continuer tous les jours. L'avenue sera géorgienne et pas russe, jusqu'à la victoire», a indiqué mardi soir Nika Melia, figure du Mouvement national uni (MNU), formation d'opposition créée par l'ex-président emprisonné Mikheïl Saakachvili.
l'adhésion à l'UE compromise
La Géorgie, ex-république soviétique marquée par une guerre contre la Russie en 2008, ambitionne de rejoindre l'UE et l'Otan. Mais plusieurs récentes mesures du gouvernement, dont ce projet de loi controversé, pourraient compromettre les aspirations du pays. Le chef de la diplomatie de l'Union européenne, Josep Borrell, a ainsi condamné mercredi le projet de loi, le jugeant «incompatible» avec les valeurs de l'UE.
La Géorgie a déposé sa candidature pour l'UE avec l'Ukraine et la Moldavie quelques jours après l'invasion russe du territoire ukrainien le 24 février 2022. En juin, l'UE avait accordé un statut officiel de candidat à l'Ukraine et à la Moldavie, mais demandé que la Géorgie procède à plusieurs réformes avant d'obtenir un statut similaire.
La présidente géorgienne, Salomé Zourabichvili, a réclamé que la loi sur les «agents de l'étranger» soit «abrogée» et promis d'y apposer son veto. Mais celui-ci pourra être surmonté par le parti au pouvoir «Rêve géorgien» qui contrôle plus de la moitié des sièges au Parlement.
Le texte suscite par ailleurs l'inquiétude outre-Atlantique. L'ambassade américaine en Géorgie a dénoncé mardi le projet, estimant qu'il s'agissait d'un «jour sombre pour la démocratie géorgienne». «La poursuite de ces lois nuira aux relations de la Géorgie avec ses partenaires stratégiques», a aussi averti l'ambassade.