Le Pérou traverse une grave crise politique. La situation est à ce point sous tension que le président du pays, Pedro Castillo, se trouvait ce jeudi 8 décembre en détention dans une base de la police à Lima, au lendemain de sa destitution et de son arrestation. Une révocation qui renvoie à une crise plus profonde traversée par le pays.
La cocotte-minute péruvienne, sur fond de crise sociale et économique, a fini par avoir eu raison du président Pedro Castillo. Destitué de ses fonctions à la tête du pays, il se trouvait ce jeudi emprisonné après avoir été arrêté, alors que sa vice-présidente Dina Boluarte a été investie à la tête du pays. Les clés pour comprendre la crise.
un président destitué pour «incapacité morale»
Ce mercredi, Pedro Castillo a tenté la manoeuvre politique de trop. En annonçant la dissolution du Parlement, qui tentait de le faire tomber, le désormais ex-président du Pérou s'est de nouveau attiré les foudres des élus du pays. De plus, le dirigeant de gauche avait également annoncé la mise en place «d'un gouvernement d'urgence exceptionnel» et la convocation d'un nouveau Congrès doté de pouvoirs constituants.
Ainsi, la destitution pour «incapacité morale» a été décidée et approuvée par 101 des 130 parlementaires, dont 80 dans son opposition.
Ne pouvant plus exercer, Pedro Castillo aurait, selon la police péruvienne, eu l'intention de se réfugier à l'ambassade du Mexique et d'y demander l'asile. Ce dernier a cependant été arrêté et transféré par hélicoptère vers une base des forces spéciales de la police à Lima, où il devrait être détenu pour une durée maximale de quinze jours.
Un mandat compliqué
La présidence de dix-sept mois de Pedro Castillo a été marquée par de nombreuses péripéties.
En effet, lors de sa prise de fonction, il avait promis d'en finir avec la corruption au Pérou. Néanmoins, ses décisions n'ont pas fait l'unanimité. Au cours de son mandat, il a d'ailleurs échappé à deux motions de destitution pour «incapacité morale». Une procédure qui avait auparavant fait chuter deux présidents en exercice, Pedro Pablo Kuczynski (droite) en 2018 et Martin Vizcarra (centre) en 2020.
En un peu plus d'un an Pedro Castillo a d'ailleurs effectué près de 80 changements de ministres, ne faisant que croître le manque de confiance du peuple à son égard.
Issu du parti Pérou Libre se revendiquant du marxisme-léninisme, il a beaucoup promis durant la campagne présidentielle : un million d'emplois en un an, des investissements publics pour réactiver l'économie, une nouvelle constitution, le renforcement des secteurs de la santé, de l'éducation et de l'agriculture pour améliorer le sort des Péruviens les plus démunis.
Mais son ignorance de la politique, les luttes internes du nouveau parti au pouvoir, les attaques incessantes de l'opposition et de permanentes dissensions au sein de ses différents gouvernements ont réduit à zéro ses réalisations.
En plus de ce chaos, la justice a ouvert plusieurs enquêtes pour des soupçons de corruption ou de trafic d'influence impliquant directement le président Castillo ou son entourage.
Une nouvelle présidence
A l'issue d'une nouvelle journée de rebondissements au Pérou, la vice-présidente Dina Boluarte a été investie à la tête du pays. Elle est ainsi devenue la première femme à le diriger.
Lors d'une cérémonie d'investiture devant le Parlement où elle a été ceinte de l'écharpe présidentielle pour devenir la première femme présidente du Pérou, Dina Boluarte a elle aussi répété qu'il y avait «eu une tentative de coup d'Etat promue par Pedro Castillo qui n'a trouvé aucun écho dans les institutions de la démocratie ni dans la rue».
Cette dernière a également assuré qu'elle assumerait sa nouvelle fonction jusqu'en «juillet 2026», lorsque devait prendre fin le mandat de Pedro Castillo.
Dina Boluarte s'est également engagée «à remettre sur les rails le pays, plongé dans une crise politique qui s’est aggravée ces derniers mois». Elle compte aussi s'attaquer à la corruption «une promesse perpétuellement non tenue», a estimé le journal péruvien El Comercio.