Une entreprise espagnole a été condamnée ce vendredi à verser plus de 80 millions d’euros à l’Urssaf pour avoir fraudé des organismes sociaux français en envoyant des milliers d'ouvriers agricoles étrangers dans des exploitations françaises en violation des règles sur le travail détaché.
Le tribunal de Marseille a tranché. La société espagnole Terra Fecundis a été condamnée à reverser 80 millions à l’Urssaf, organisme français chargé de la collecte des cotisations salariales et patronales, «en réparation du préjudice financier», à cause d’un défaut de paiement des contributions dues à la France. L’entreprise a en effet fraudé les organismes sociaux pendant plusieurs années.
Terra Fecundis, entreprise d’intérim, a envoyé pendant quatre ans plus de 26.000 ouvriers, originaires d'Amérique du Sud, d'Equateur pour la plupart, dans des exploitations agricoles françaises, dans le Gard, les Bouches-du-Rhône ou la Drôme.
«C'est une décision très satisfaisante et en même temps frustrante car les travailleurs agricoles qui n'osent pas agir par peur des représailles n'ont pas de réparation directe. Mais, c'est une victoire symbolique importante grâce à laquelle la voix des travailleurs a été entendue», a réagi Me Vincent Schneegans, avocat du syndicat CFDT, partie civile.
Déjà deux précédentes condamnations par la justice française
Il s’agit de la troisième condamnation en moins d’un an de cette société par la justice française. L’entreprise avait déjà condamnée en juillet 2021 par le tribunal de Marseille à 500.000 euros d’amende pour «dumping social». Quatre ans de prison avec sursis et 100.000 euros d'amende avaient également été prononcés contre les trois dirigeants espagnols.
Terra Fecundis a en effet rémunéré ses travailleurs au salaire minimum français, mais a payé ses charges sociales en Espagne, où elles sont 40% moins élevées qu’en France, rendant cette main-d'œuvre vulnérable moins chère pour les agriculteurs français.
Plus récemment, au mois d’avril, la société espagnole a aussi été condamnée, par le tribunal correctionnel de Nîmes, pour violation des règles européennes du travail détaché, à 375.000 euros d’amende. L’entreprise a aussi été frappée d’une interdiction définitive d'exercer toute activité liée au travail temporaire en France. Par ailleurs, sept agriculteurs français ayant fait appel aux services de cette société avaient également été condamnés pour «travail dissimulé» et «emploi illégal de travailleurs étrangers». Les conditions de travail des travailleurs détachés ont également été jugées déplorables.