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Joe Biden : toute une année à la recherche de l’unité

La mission d'unité n'est pas encore réussie pour Joe Biden La mission d'unité n'est pas encore réussie pour Joe Biden. [ANDREW CABALLERO-REYNOLDS / AFP]

Ce sont au total 365 jours de violences, d'incertitudes, de divisions et de peurs. Le 3 novembre 2020, les Américains se réveillaient en espérant connaître leur nouveau président des Etats-Unis après une campagne particulièrement intense. Joe Biden, qui sera déclaré vainqueur plusieurs jours plus tard, avait, dès cette date, choisi le costume de l'unificateur face à un Donald Trump prêt à tout pour renverser le résultat de l'élection.

Dès sa première prise de parole, tard dans la nuit de l'«Election Day», le démocrate s'attelait déjà à remercier tous les Américains qui s'étaient déplacés pour voter, sans tenir compte des partis. Alors que son rival déclarait à la surprise générale qu'il estimait avoir remporté le scrutin, Joe Biden était resté modéré, demandant à tout le monde d'être patient. Il faut dire qu'il s'apprêtait à prendre les commandes d'un pays très loin de s'unir malgré une crise sanitaire, économique, et bientôt une crise démocratique. 

À l'occasion du 1er janvier, l'ancien vice-président s'était dit particulièrement optimiste pour l'avenir du pays. Pourtant, moins d'une semaine plus tard, les Etats-Unis ont connu un épisode qui reste un traumatisme pour Washington D.C. Après un discours organisé par Donald Trump, qui continuait de revendiquer sa victoire en dépit des faits qui ne cessaient de lui donner tort, des contestataires avaient marché vers le Capitole, qui abrite les parlementaires. Particulièrement remontés, les participants avaient commencé à s'en prendre au bâtiment, puis à rentrer à l'intérieur. Dans le tumulte, une manifestante était tuée, certains élus avaient eu très peur et la nation a, pendant un temps, cru à une véritable insurrection. 

Le pays toujours fracturé

Alors que de nombreux politiciens s'en sont pris à l'électorat républicain, à Donald Trump ou aux élus conservateurs, leur reprochant d'avoir laissé ce genre d'événement se produire, Joe Biden est resté plus mesuré. Tout en parlant d'un «jour sombre» pour l'histoire du pays, il n'a pas pointé de direction particulière, estimant avant tout que «les scènes de chaos au Capitole ne représentent pas la vraie Amérique». 

Le ton aura finalement été le même pendant son discours d'investiture quelques jours plus tard. Tous les observateurs ont souligné à ce moment-là que l'unité était le vrai fil rouge du nouveau chef. «Officiellement et dans sa rhétorique, c'est ce qui définit sa conception de la présidence, que cela se concrétise ou non dans les faits. Et cela n'est d'ailleurs pas seulement lié à la politique intérieure, il vise également l'union avec ses alliés étrangers, comme on a pu le voir ces derniers jours à la COP26 de Glasgow», note Françoise Coste, historienne et spécialiste des Etats-Unis.

Il ne fallait cependant pas s'attendre à ce que cette unité soit acquise en une petite année. Les sondages montrent que le pays reste polarisé dans tous les secteurs. D'après une enquête d'opinion YouGov pour The Economist datée du 26 octobre, 86% des démocrates sont satisfaits de Joe Biden, quand 86% des républicains sont mécontents. Des chiffres qui s'expliquent notamment par le fait que 74% des conservateurs estiment que le président n'a pas remporté légitimement l'élection de 2020. 

Des obstacles importants

Car il faut dire que son prédécesseur ne lâche pas l'affaire, et n'a pas disparu après sa défaite. «L'unité est un vœu sincère pour Joe Biden, qui fait beaucoup d'efforts en ce sens, mais il est pieux. Il se cogne contre le mur de la réalité, à savoir le poids que fait peser Donald Trump sur les républicains avec un potentiel retour en 2024», analyse Françoise Coste. Ainsi, les élus conservateurs, qui ont besoin de la base d'électeurs très loyaux de Donald Trump, continuent de s'opposer frontalement à Joe Biden, ce qui rend les négociations difficiles.

À cet obstacle s'ajoutent les tensions au sein même du parti démocrate. Avec une minuscule majorité au Sénat, le président doit composer avec les envies des progressistes et des modérés, qui peinent à s'entendre sur les gros dossiers. Le plus important étant le gros plan d'investissement souhaité par Joe Biden avec un volet infrastructure et un volet plus social. «S’il réussit à faire cela, c’est une réussite historique. Il s'agirait du plus grand plan d’action et dépenses gouvernementales depuis les années 1960. Ce serait un pas pour la santé, la petite enfance, la garde des enfants, le congé maternité... Des grandes réformes qui chambouleraient la vie des Américains», assure Françoise Coste.

Mais après des semaines de négociations acharnées, si un accord n'est plus très loin, les discussions avancent lentement. «Joe Biden doit faire le casque bleu dans son propre camp», résume l'historienne. Mais ces efforts pourraient être récompensés. En cas de réussite, le camp démocrate pourra crier victoire, montrant la capacité de négociation et d'unification de Joe Biden. S'il échoue, en revanche, il sera difficile de s'en relever. Le politologue et spécialiste des Etats-Unis Jean-Eric Branaa avait expliqué il y a quelques semaines sur CNEWS que si le président rate son coup, «son mandat est fini». De quoi mettre la pression alors qu'il reste encore trois ans de Maison Blanche à Joe Biden. Si ce n'est plus. 

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