Le Burundi ordonne l'expulsion d'ici à vendredi du représentant de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) dans le pays, au moment où le gouvernement est soupçonné de minimiser l'ampleur de la pandémie à quelques jours de la présidentielle.
Le ministère burundais des Affaires étrangères, dans une lettre adressée au bureau africain de l'OMS et consultée par l'AFP, a annoncé l'expulsion du Dr Walter Kazadi Mulombo, représentant de l'organisation au Burundi. Il a également ordonné l'expulsion de deux autres experts employés de l'OMS et d'un consultant.
En avril, le ministère des Affaires étrangères de ce pays d'Afrique de l'Est avait déjà engagé la même procédure contre les quatre experts. Mais il l'avait suspendue après des échanges entre le chef de l'Etat Pierre Nkurunziza et le directeur général de l'OMS, selon des sources diplomatiques et administratives.
«C'est toute l'équipe de l'OMS chargée d'appuyer le Burundi dans sa riposte contre le Covid-19 [...] Ils sont expulsés alors que le ministre de la Santé a exclu totalement l'OMS de celle-ci en l'accusant d'ingérance inacceptable dans sa gestion du coronavirus», a expliqué à l'AFP un responsable burundais, sous couvert de l'anonymat. A quelques jours des élections présidentielle et législatives, le gouvernement, déjà vivement critiqué pour sa gestion de l'épidémie, a déclenché des réactions indignées des autorités sanitaires africaines.
La directrice du bureau africain de l'OMS, le Dr Matshidiso Moeti, a indiqué chercher «à clarifier et comprendre les raisons de cette décision» et s'est dite prête «à continuer à collaborer avec le Burundi». Quant à la Commission d'enquête de l'ONU sur le Burundi, elle dit «profondément regretter» cette annonce et réitérer sa «préoccupation» sur la manière dont l'épidémie est gérée par le pays.
Un nombre de cas sous-declares presume
Au Burundi, 27 cas et un décès sont officiellement recensés au 14 mai 2020. Mais les autorités sont accusées par des médecins et l'opposition de cacher des cas de Covid-19, en les attribuant à d'autres maladies comme la pneumonie. Des sources médicales ont également assuré à l'AFP que des personnes présentant tous les signes du coronavirus, dont la détresse respiratoire, sont signalés dans plusieurs hôpitaux de Bujumbura, sans qu'elles soient testées.
D'autant plus que les meetings organisés dans le cadre de la campagne électorale attirent des milliers de personnes : «Nous avons vu dans les pays qui ont maintenu les élections ou ont permis aux gens de se rassembler dans des réunions politiques que le nombre de cas a augmenté», regrette John Nkengasong, le directeur du Centre de contrôle et de prévention des maladies (CDC) de l'Union africaine.