À situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle ? Certains semblent penser que oui. Dans plusieurs pays, la lutte contre l'épidémie de Covid-19 a entraîné des lois et des décisions qui peuvent sembler anti-démocratiques. De quoi inquiéter les défenseurs des droits, d'autant que les pays concernés n'en sont pas forcément à leur coup d'essai.
C'est notamment le cas en Hongrie. L'administration de Viktor Orban a déposé un projet de loi visant à imposer un état d'urgence illimité. Cela donnerait la possibilité au Premier ministre de mettre en place toutes les mesures qu'il estime nécessaire, à moins que le gouvernement en décide autrement. Les pouvoirs du chef d'Etat, déjà importants, prendraient encore un peu plus d'ampleur, au point que certains partis d'opposition s'alarment d'un «chèque en blanc» donné à Viktor Orban.
Alors qu'Amnesty International a dénoncé le projet de loi, estimant que «des pouvoirs illimités n'étaient pas la solution», l'Union Européenne a également communiqué sur le sujet. Dans son langage policé, un porte-parole de la commission européenne a refusé de nommer la Hongrie, mais a assuré que «toute mesure d'urgence prise en réponse à la crise doit être conforme aux obligations internationales et européennes concernant les droits de l'Homme et doit en particulier être proportionnée et nécessaire».
Ces mesures politiciennes se retrouvent également en Israël. L'inquiétude grandit dans le pays alors que Benjamin Netanyahou, toujours Premier ministre par intérim, semble manoeuvrer pour conserver son poste le plus longtemps possible. Après trois élections législatives en un an, qui n'ont toujours pas donné de vainqueur clair, l'opposition dénonce une utilisation du coronavirus par le chef d'Etat pour repousser son procès pour corruption. À quelque jours de la tenue de celui-ci, il a en effet rapidement annoncé la fermeture des tribunaux.
Autre pays d'Europe de l'Est qui interpelle sur ses choix : la Pologne. Le pays dirigé par l'ultra-conservateur Andrzej Duda refuse de repousser les élections présidentielle prévues en mai, alors que les campagnes sont rendues impossibles par le confinement. Dans ce cas précis, seul le président sortant bénéficie d'une visibilité médiatique, ce qui déséquilibre la campagne selon ses opposants.
Surveille de masse
Mais ce n'est pas la seule mesure pour laquelle le chef d'Etat est critiqué. Toutes les personnes en quarantaines doivent télécharger une application et envoyer régulièrement des selfies afin de prouver qu'ils sont bien chez eux. Une surveillance qui n'est pas sans rappeler des tactiques utilisées par la Chine pour contrôler l'épidémie, mais qui peut surprendre dans un pays démocratique.
Plusieurs autres pays comme Israël ont mis en place la possibilité de tracer les citoyens par le GPS de leur téléphone, quand la France y songerait fortement. La Russie, elle, a opté en plus de cela pour un système de vidéosurveillance des confinés avec reconnaissance faciale. Les exemples se multiplient donc au fil des jours, ce qui fait écho à des scénarii de fictions dystopiques. Des évolutions que les ONG vont continuer de surveiller après la fin de la crise sanitaire, pour s'assurer qu'elles n'étaient bien que temporaires.