Le commandant des Forces démocratiques syriennes (FDS), dominées par les Kurdes, a accusé vendredi la Turquie de saboter un accord de cessez-le-feu dans le nord de la Syrie, en empêchant le retrait des combattants FDS de la ville assiégée de Ras al-Aïn.
L'accord de trêve négocié par Washington et annoncé jeudi implique un retrait des forces kurdes de la région frontalière en échange de l'arrêt de l'offensive turque lancée le 9 octobre contre elles dans le nord de la Syrie.
L'accord «contient un point essentiel stipulant l'ouverture d'un couloir sous le parrainage des Etats-Unis», a affirmé Mazloum Abdi dans un entretien téléphonique avec l'AFP.
Mais les «Turcs empêchent le retrait du secteur de Ras al-Aïn, ils empêchent la sortie de nos forces, des blessés et des civils» de la ville, a-t-il assuré.
«Les Turcs continuent d'attaquer nos forces et les Américains portent l'entière responsabilité de ces attaques car ils ne font pas pression sur la Turquie», a ajouté M. Abdi.
Il a assuré que les FDS sont engagées à se retirer, comme le stipule l'accord, d'une zone frontalière entre Ras al-Aïn et Tal-Abyad de 30 km de profondeur, dès que les Turcs les laisseront sortir de Ras al-Aïn.
Mais il a prévenu que «si l'accord n'est pas respecté, nous considérerons que ce n'était qu'une manoeuvre entre Américains et Turcs pour dire que nos forces ne se sont pas retirées et nous considérerons qu'il s'agit d'un complot contre nos forces».
Ankara a de son côté également accusé samedi les forces kurdes de violer la trêve, alors que «les forces armées turques respectent totalement l'accord», selon le ministère turc de la Défense.
Reprise des opérations anti-EI
M. Abdi a affirmé la reprise des opérations des FDS contre le groupe Etat islamique (EI), avec le soutien de la coalition internationale antijihadiste dirigée par Washington dans l'est de la Syrie, trois jours après avoir annoncé leur suspension.
«Nous avons relancé les opérations militaires contre les cellules de l'EI à Deir Ezzor, nos forces y travaillent avec celles de la coalition», a assuré Mazloum Abdi.
Quant aux milliers de détenus membres présumés de l'EI dans les prisons des FDS dans le nord de la Syrie, il a assuré que «notre position est très claire à ce propos, nous travaillons avec tous les Etats membres de la coalition sur ce dossier».
«Mais si (les) forces (de la coalition) se retirent de nos secteurs, nous ne serons plus obligés de continuer à travailler avec elle», a ajouté le commandant des FDS. «Nous ferons ce qui est dans notre intérêt, le dossier des détenus est de notre ressort».
Durant les longues années de lutte contre l'EI, les FDS ont bénéficié du soutien de la coalition emmenée par Washington, depuis accusé de les avoir abandonnées dans le nord de la Syrie et d'avoir permis l'offensive lancée par Ankara.
Rôle américain
M. Abdi a affirmé samedi l'importance du maintien d'une présence américaine en Syrie.
«Nous voulons que les Américains aient un rôle en Syrie, pour ne pas que les Russes et d'autres monopolisent le terrain», a-t-il dit.
«Il est de notre intérêt que les forces américaines restent ici pour l'équilibre des forces en Syrie», a-t-il assuré.
«Si la coalition laisse le terrain aux Russes et autres, cela affectera considérablement nos forces et notre présence administrative», a-t-il poursuivi, les Kurdes ayant instauré une autonomie de facto dans le nord et le nord-est de la Syrie à la faveur du conflit déclenché en 2011.
Une telle absence américaine donnerait lieu «à de nouveaux dangers», a-t-il prévenu.
Il a dit que la confiance des FDS vis-à-vis des Américains «n'était plus la même qu'autrefois. (...) Les Américains n'ont pas rempli leurs promesses» de les protéger.
Le commandant des FDS a par ailleurs rappelé que l'annonce d'un retrait américain de la zone frontalière avec la Turquie a poussé les Kurdes à demander l'aide de Damas.
Le régime syrien a déployé cette semaine en vertu d'un accord parrainé par Moscou des troupes dans des secteurs proches de la frontière turque, notamment de Kobané et Minbej.