Où sont les noirs américains ? Alors que l'élection présidentielle américaine se tiendra dans un an, le 3 novembre 2020, le sort de la communauté qui vote à 90% pour le parti démocrate semble avoir été légèrement mis de côté.
Et pour cause, la seule candidate noire qui semblait avoir une chance dans la prochaine élection s'est complètement effondrée dans les sondages. En octobre 2019, Kamala Harris est descendue sous les 5% d'intentions de votes, bien loin du trio de tête Biden, Warren et Sanders. Si l'on regarde les sondages, c'est Joe Biden, très largement, qui est le favori dans la communauté noire, avec 36%, contre 15% chez Elizabeth Warren deuxième, et seulement 7% pour Kamala Harris. «Sa mère est indienne et son père jamaïcain. Pour les afro-américains, elle ne les représente pas directement», explique Nicole Bacharan, géopolitologue spécialiste des États-Unis et auteur de Le monde selon Trump.
Ces sondages sont bien loin d'être anodins. Les noirs américains, et en particulier les noires américaines, sont devenus le vote essentiel pour remporter une élection, ou du moins l'investiture démocrate. C'est ce qui a fait pencher la balance en faveur d'Hillary Clinton en 2016, alors que cette dernière se faisait inlassablement rattraper par Bernie Sanders.
Est-ce parce qu'Hillary Clinton, et Joe Biden aujourd'hui, représentent le mieux les attentes des noirs américains ? Oui... et non. L'ancien vice-président fait bien campagne sur certaines préocupations importantes de cette communauté, mais il est surtout très lié à un bon nombre de leaders noirs, à commencer par Barack Obama. «Joe Biden a toujours eu une fibre très sociale, et a toujours été proche des afro-américains», explique Nicole Bacharan. Il se vend avant tout comme l'héritier du premier président noir des États-Unis, et n'hésite pas à s'attaquer aux suprémacistes blanc lors d'un discours en Alabama, ce qui semble fonctionner si l'on en croit les sondages.
Des attentes variées
Mais quelles sont les préoccupations des noirs américains justement ? Si l'on en croit un sondage qui se concentre avant tout sur les femmes de la communauté publié en septembre 2019 par BWR/ESSENCE Survey, ce sont dans l'ordre : une réforme de la justice criminelle, une sécurité sociale abordable, la montée du racisme, l'égalité des droits et de salaires et, enfin, les violences liées aux armes à feu.
«Tous les programmes ont des parties qui portent sur des préoccupations de la communauté noire, mais aucun débat ne s'adresse à eux directement», analyse Nicole Bacharan. Pour l'instant, seuls 4 candidats ont décidé de présenter des projets sur la justice, pourtant l'intérêt numéro 1 des noirs américains : Joe Biden, Kamala Harris, Cory Booker et Amy Klobuchar. Mais pour autant, ce n'est pas vers ce débat que les discussions et les discours sont orientés.
«Ne pas avoir de plan pour la réforme de la justice est une réelle faiblesse pour Bernie Sanders et Elizabeth Warren, d'autant plus que, en tant qu'élus d'Etats majoritairement blancs, ils sont relativement inconnus auprès de l'électorat noir», affirme Nicole Bacharan. Il faudra donc que la sénatrice change sa stratégie si elle veut continuer à progresser dans les sondages. En attendant, il restera difficile de déloger Joe Biden de sa place de grandissime favori.