Le sort du Brexit va se jouer cette semaine, avec d'ultimes et laborieuses tractations entre le Royaume-Uni et l'Union européenne pour tenter de parvenir à un accord de divorce, à 17 jours de la sortie prévue du bloc européen.
Le Premier ministre britannique Boris Johnson mettra l'accent sur sa volonté de réaliser le Brexit le 31 octobre en présentant lundi son programme de politique nationale lors du traditionnel discours de la reine Elizabeth II, qui marque l'ouverture d'une nouvelle session parlementaire.
Mais Londres et l'UE se sont montrés prudents dimanche sur leurs chances de divorcer à l'amiable, des négociations intensives à Bruxelles durant le week-end n'ayant pas permis d'enregistrer de percée sur la question clé de la frontière irlandaise après le Brexit.
«Il reste beaucoup de travail à faire» pour sortir de l'impasse, a estimé dimanche Michel Barnier, négociateur de l'UE sur le Brexit.
Constat identique chez Boris Johnson. Il a estimé qu'un accord de Brexit était toujours possible - un scénario qui a sa préférence même s'il est prêt à sortir son pays de l'UE sans accord -, mais qu'il restait toujours «un travail considérable à accomplir pour y parvenir».
«L'horloge tourne»
Un diplomate européen a confirmé à l'AFP qu'il n'y avait «pas encore de percée», suggérant que Londres devrait lâcher du lest: «si le gouvernement britannique veut une solution, il doit agir vite. L'horloge tourne».
Des discussions techniques se poursuivront lundi, mais il reste très peu de temps aux deux camps pour réussir.
Les dirigeants européens se réuniront jeudi et vendredi pour un sommet à Bruxelles, présenté comme celui de la dernière chance pour éviter une sortie de l'UE sans accord aux conséquences douloureuses, ou un troisième report prolongeant l'incertitude sur le chemin que prendra le Royaume-Uni après 46 ans dans le giron européen.
Dans l'idéal, les 27 voudraient avoir une proposition complète sur laquelle voter d'ici là.
Londres et Bruxelles ne parviennent pas à s'entendre sur la manière d'éviter, après le Brexit, un retour à une frontière physique entre la province britannique d'Irlande du Nord et la République d'Irlande, qui restera membre de l'UE, et d'ainsi préserver la paix sur l'île, qui a connu plusieurs décennies de violences.
Depuis que son plan de Brexit présenté début octobre a été rejeté par les Européens, Boris Johnson a présenté de nouvelles propositions à son homologue irlandais Leo Varadkar jeudi.
Mais peu de détails ont filtré sur la manière concrète dont Londres et Bruxelles comptaient surmonter les points de désaccord persistants, notamment sur la manière d'éviter la mise en place de contrôles douaniers et le droit de regard donné aux autorités nord-irlandaises dans le mécanisme.
Selon des informations de presse, Londres a proposé que l'Irlande du Nord forme une union douanière avec la Grande-Bretagne tout en appartenant à une sorte de zone douanière avec l'UE. Inacceptable pour l'UE comme pour l'allié nord-irlandais du gouvernement minoritaire britannique, le parti unioniste DUP.
Convaincre le Parlement
S'il parvient à conclure un accord, Boris Johnson aura encore la lourde tâche de convaincre le Parlement, très divisé sur le Brexit, entre partisans du maintien de liens étroits avec l'UE et zélateurs d'une coupure nette.
Les députés, qui avaient rejeté trois fois l'accord négocié par l'ex-Première ministre Theresa May, siégeront lors d'une séance extraordinaire le 19 octobre, potentiellement décisive pour le Brexit, pour la première fois un samedi depuis la guerre des Malouines en 1982.
«Comparé au Parlement britannique, un sphinx égyptien est un livre ouvert», a commenté le président sortant de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker.
Faute d'accord d'ici samedi, une loi adoptée en septembre impose à Boris Johnson de demander un report de trois mois. Le dirigeant l'exclut catégoriquement, après déjà deux reports du Brexit depuis qu'il a été voté par référendum en juin 2016. Il n'a cependant jamais dit comment il pourrait s'y soustraire.
Cette demande de report devra être approuvée à l'unanimité des autres Etats membres, une requête qu'il serait judicieux d'accepter si elle était soumise, a estime M. Juncker.
La profondeur de la crise politique est telle au Royaume-Uni que des élections générales anticipes apparaissent inéluctables dans les prochains mois.