Au moins 164 défenseurs de l'environnement se battant contre des projets miniers, forestiers ou agro-industriels ont été tués en 2018, selon le bilan annuel de l'ONG Global Witness.
Selon ce rapport publié mardi, d'«innombrables» autres ont été réduits au silence à travers le monde par la violence, l'intimidation et l'utilisation ou le dévoiement de lois anti-manifestation.
Le pays de loin le plus dangereux l'an dernier pour ces militants et les leaders autochtones défendant leurs terres a été les Philippines, avec 30 meurtres, a indiqué l'ONG.
La Colombie et l'Inde ont elles compté 24 et 23 morts en 2018. Avec 16 meurtres confirmés, le Guatemala est de son côté le pays avec le plus de morts comparés au nombre d'habitants.
«C'est un phénomène que l'on peut voir partout dans le monde: les défenseurs de l'environnement et des terres, dont un nombre important sont des représentants de peuples autochtones, sont considérés comme des terroristes, des voyous ou des criminels pour défendre leurs droits», a dénoncé dans le rapport Vicky Tauli-Corpuz, rapporteur spécial de l'ONU pour les droits des peuples autochtones.
«Cette violence représente une crise pour les droits de l'Homme mais également une menace pour tous ceux qui sont dépendants d'un climat stable», a-t-elle ajouté.
Le nombre de morts est en baisse par rapport à 2017, année la plus meurtrière avec 207 morts, mais Global Witness note que le nombre pourrait être sous-évalué, notamment parce que certains événements se produisent dans des lieux très reculés.
L'événement le plus mortel rapporté par l'ONG en 2018 a eu lieu dans l'Etat du Tamil Nadu, dans le sud de l'Inde, où elle assure que 13 personnes ont été tuées après une manifestation contre une mine de cuivre.
Au moins huit militants impliqués dans des conflits terriens avec des représentants de l'industrie du soja ont été tués en 2018 dans l'Etat brésilien de Para à lui seul, selon l'ONG.
Aux Philippines, qui ont pris la place du Brésil comme pays le plus meurtrier, c'est neuf cultivateurs de canne à sucre, dont des femmes et des enfants, qui ont été abattus par des hommes armés sur l'île de Negros, assure Global Witness, qui ajoute que l'avocat représentant les familles des victimes a été tué quelques jours plus tard.
Alors que le groupe d'experts de l'ONU sur le climat (Giec) doit publier la semaine prochaine un rapport sur l'utilisation des terres qui devrait souligner l'importance des peuples autochtones dans la protection de la nature, l'ONG dénonce également une «tendance inquiétante» vers l'intimidation et l'emprisonnement des défenseurs de l'environnement.
Le rapport dénonce aussi le rôle des investisseurs, y compris les banques de développement, dans des projets controversés, et désigne nommément certaines entreprises accusées de faciliter les violations des droits.
«Il n'est pas suffisant pour les multinationales liées à des confiscations de terres de plaider l'ignorance», insiste-t-il. «Elles ont une responsabilité de s'assurer de façon préventive que les terres dont elles profitent ont été louées légalement, avec le consentement des communautés qui y vivent depuis des générations»