«Allergie» ou empoisonnement. La question se pose après l'hospitalisation de l'opposant russe Alexeï Navalny. Si le motif de l'allergie est la raison officielle de son état de santé préoccupant, son médecin a assuré qu'il pouvait s'agir d'un empoisonnement via «un certain agent toxique». Cette affaire est la plus récente d'une série un peu étrange, et dont les services de renseignements russes sont toujours au centre.
Sergueï Skripal et sa fille
Cette affaire n'a pas créé qu'un scandale, mais aussi une crise diplomatique entre la Russie et l'Angleterre. Le 4 mars 2018, l'ex-agent russe Sergueï Skripal et sa fille sont empoisonnés par un agent neurotoxique. Retrouvés sur un banc dans la ville de Salisbury, dans le sud de l'Angleterre, ils s'en sortiront finalement au prix d'un traitement assez lourd. Pour Londres, aucune hésitation, les responsables de la tentative d'assassinat sont «des officiers du service de renseignements militaire russe, le GRU». Une accusation rejetée par la Russie.
Cependant, quelques mois après l'événement, l'un des hommes accusés d'avoir organisé l'attentat est identifié comme appartenant bien au GRU. L'Union a d'ailleurs sanctionné des pontes du service de renseignements du pays dirigé par Vladimir Poutine. À l'heure actuelle, un mandat d'arrêt européen contre les deux suspects est lancé, l'affaire n'est toujours pas jugée et une douzaine de lieux de la ville ont été décontaminés.
Alexandre Litvinenko
Ce n'est cependant pas la première fois que la Grande-Bretagne était le théâtre d'une telle tentative d'assassinat. En 2006, Alexandre Litvineko, un ex-agent russe, devenu opposant, est empoisonné au polonium. Cet agent hautement toxique est radioactif. S'il est facilement détectable sur les corps, il est plus difficile à repérer lorsque l'on tente de lui faire traverser les frontières. D'où son utilisation régulière.
En 2006, le polonium a été versé dans une tasse de thé au Millenium Hotel, à Londres, alors que Litvinenko rencontrait deux de ses compatriotes pour discuter affaires. Une nouvelle fois, les services de renseignements russes ont nié toute implication dans cet assassinat, malgré une accusation directe de la victime quelques jours avant sa mort.
Victor iouchtchenko
Une maladie qui tombe bien. En 2004, en pleine campagne présidentielle le candidat ukrainien Viktor Iouchtchenko, ouvertement opposé à la Russie, tombe malade. Quelques mois après le début de cette maladie, qui déforme son visage, des médecins autrichiens affirment qu'il a été victime d'un empoisonnement à la dioxine. Si les voisins russes semblent les suspects idéaux dans cette affaire, rien ne prouve qu'ils sont à l'origine de l'affaire.
Si cela ne l'a pas empêché de remporter l'élection en janvier 2005, la thèse de l'empoisonnement est régulièrement remise en cause. C'est notamment David Jvania, ancien bras droit du président pendant la campagne. Ce dernier l'assure : «tant qu'il n'aura pas été prouvé juridiquement qu'il s'agit d'un empoisonnement, et qu'on n'aura pas établi avec certitude l'endroit et la date des faits, je ne parlerai pas d'empoisonnement».
ALEXEÏ NAVALNY
Le cas d'Alexeï Navalny semble donc très proche des autres assassinats ou tentatives d'assassinat que l'on a pu voir par le passé. L'utilisation de poison alors que la victime est actuellement dans une prison russe, le fait qu'il soit un opposant connu, et que la répression du mouvement anti-Poutine s'accentue crééent un réseau d'indice pouvant soutenir la thèse d'une tentative d'assassinat politique. Il sera néanmoins encore plus difficile que pour les autres de faire la lumière sur l'affaire, étant donné qu'il est en Russie, ce qui ne garantit pas une enquête totalement indépendante.