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Tout savoir sur le très critiqué accord de libre-échange UE-Mercosur

Depuis le lundi 18 novembre, les agriculteurs français manifestent massivement contre l'accord UE-Mercosur. [Christophe SIMON / AFP]

Le 28 juin 2019, l'Union européenne et le Mercosur, une alliance économique et politique rassemblant plusieurs pays d'Amérique du Sud, ont conclu un protocole d'accord de libre-échange. Depuis, certains pays comme la France bloquent son adoption définitive. Voici tout ce qu'il faut savoir sur ce traité qui inquiète les agriculteurs français et européens.

plus de 90 % des droits de douane supprimés

L'accord prévoit la suppression de 91 % des droits de douane imposés par le Mercosur sur les produits européens (ce qui représente 4 milliards d'euros d'économies par an selon la Commission européenne) de manière progressive sur 10 ans (ou 15 ans pour certains secteurs comme l'automobile). En sens inverse, l'UE s'est engagée à éliminer 92 % des taxes actuellement appliquées sur les biens sud-américains qui arrivent sur son sol.

Dans le détail, les droits de douane appliqués par le Mercosur seront progressivement éliminés sur les voitures, les pièces détachées, les équipements industriels, la chimie, l'habillement, les produits pharmaceutiques, le vin ou encore le chocolat. En échange, l'UE a accepté d'ouvrir son marché agricole aux produits sud-américains, par le biais de quotas.

Cela signifie que le Mercosur pourra exporter chaque année vers l'Europe 99.000 tonnes de viande bovine à un droit de douane réduit à 7,5 %. Les pays sud-américains concernés pourront également exporter en Europe 180.000 tonnes de sucre, 180.000 tonnes de volailles, 25.000 tonnes de porc et 45.000 tonnes de miel sans aucune taxe.

cible des critiques en france

Dès l'annonce de la conclusion de cet accord de libre-échange, en négociations depuis vingt ans, les critiques pleuvent contre le texte en France. Dès le départ, en 2019, les agriculteurs français ont dénoncé la future concurrence déloyale des «usines à vidande» sud-américaine. Depuis ce lundi 18 novembre, «l'acte 2» de la mobilisation des agriculteurs français, débutée en janvier 2024, a été lancé partout en France pour demander l'arrêt définitif de l'accord de libre-échange entre l'UE et le Mercosur.

L'ensemble de la classe politique est au diapason des agriculteurs. Dès 2019, la gauche, et plus particulièrement les écologistes, se sont opposés à cet accord. Alors député européen, Yannick Jadot, avait dénoncé les conséquences potentiellement néfastes du texte, notamment sur l'environnement. A son initiative, plus de 600 parlementaires allant de LFI au RN en passant par la macronie, ont rédigé une tribune au «Monde» le 12 novembre dernier afin d'appeler la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a ne pas signer l'accord avec le Mercosur.

Si Emmanuel Macron avait salué un «bon» accord lors de sa signature en 2019, le chef de l'Etat est revenu sur sa position, assurant que «la France ne soutiendra pas l'accord UE-Mercosur dans sa version actuelle». Une position identique à celle de son gouvernement d'opposition dirigé par Michel Barnier (LR). La ministre de l'Agriculture Annie Genevard a ainsi rappelé l'opposition de la France à cet accord et sa volonté de ne pas «livrer en pâture» les agriculteurs français.

Une adoption loin d'être acquise

Avant de pouvoir entrer en application, l'accord UE-Mercosur va devoir passer plusieurs étapes législatives, qui rendent sa ratification incertaine. Normalement, pour un texte si important, le traité doit être adopté à l'unanimité des 27 pays-membres de l'Union européenne au Conseil de l'UE, par le Parlement européen, avant d'être ratifié par chacun des 27 parlements nationaux. La France peut donc y opposer son véto.

Mais la Commission européenne, qui est favorable à cet accord, pourrait décider de diviser son approbation, le volet commercial relevant directement de ses attributions. Un vote à la majorité qualifiée, regroupant au moins 15 Etats-membres représentants 65% de la population de l'UE, suffirait pour adopter le texte. Soutenu par l'Allemagne, l'Espagne ou encore les Pays-Bas, le texte aurait de bonne chance d'être voté.

Pas le premier grand accord de libre-échange conclu par l'UE

L'accord UE-Mercosur vient compléter deux autres traités de libre-échange récemment conclus par l'UE.

Il y a d'abord eu le CETA, signé en octobre 2016 entre l'UE et le Canada et approuvé en février 2017 par le Parlement européen. Depuis, 95% de ses mesures dont la réduction des droits de douane sont provisoirement appliquées. Mais cela pourrait ne pas durer. En mars dernier, le Sénat a rejetté la ratification du CETA, au grand dam du gouvernement.

Depuis, l'accord de libre-échange doit repasser devant les députés, qui y sont majoritairement hostiles. Idem au niveau européen où seule une poignée de d'Etat-membre a ratifié le texte. Un blocage qui risque de faire tomber le CETA dans les années à venir.

Un accord de libre-échange entre l'UE et le Japon - appelé JEFTA - est de son côté entré en vigueur en février 2019. Il avait été conclu en juillet 2018 et avait été voté par le Parlement européen en décembre. Il constituait au moment de sa signature l'accord de libre-échange le plus important jamais scellé par l'UE, puisqu'il concerne plus de 630 millions de personnes et près d'un tiers du PIB mondial.

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