Un levier pour sortir de la crise. Un an jour pour jour après le retrait des États-Unis de l'accord sur le nucléaire iranien, Téhéran a décidé de renoncer à certains de ses engagements. Ainsi, l'Iran cessera de limiter ses réserves d'eau lourde et d'uranium enrichi. Une manière de ne pas se laisser faire alors que les Américains et Donald Trump continuent de sanctionner économiquement Téhéran.
Ces sanctions causent d'ailleurs une crise économique quasi sans précédent dans le pays. Selon les estimations du FMI, le PIB va diminuer de 6% en 2019. En 2018, il s'était déjà réduit de 3,9%. Et les États-Unis ne souhaitent pas lâcher du lest. En effet, jusqu'au 22 avril, ils autorisaient huit pays à acheter du pétrole iranien sans sanction. Une dérogation qui a été révoquée. Cette situation se ressent d'ailleurs sur le pouvoir d'achat des citoyens iraniens, puisque l'inflation est estimée à 51% depuis mai 2018.
Téhéran souhaite donc, avec le renoncement sur certains engagements, mettre la pression sur les autres signataires de l'accord de 2015. En effet, la Chine, la Russie, la France, l'Allemagne et la Grande-Bretagne n'ont pas trouvé de solutions pour contourner les sanctions américaines, et ainsi sauver ce qui restait du deal. Les trois pays européens ont tenté, en créant un montage financier basé sur le troc, de manière à continuer le commerce avec l'Iran. Mais ce système n'a pas encore fait ses preuves.
La Russie est quant à elle sortie de son silence pour se ranger du côté de l'Iran ce 8 mai. Vladimir Poutine a en effet assuré que les décisions «irréfléchies et arbitraires, menant à une pression déraisonnable sur l'Iran, provoqueraient des mesures fâcheuses par la suite, auxquelles nous sommes confrontées aujourd'hui». Cependant, malgré le fait que les pays signataires souhaitent l'application du traité, en opposition aux États-Unis, rien de concret n'a pour le moment vu le jour. Ce qui explique potentiellement la montée de ton du pays moyen-oriental ce 8 mai.
Un haussement de voix qui n'est que «symbolique» pour Robert Kelley, expert en nucléaire à l'Institut international de Stockholm pour la recherche sur la paix (Sipri). «Il s'agit pour eux de sauver la face. Ils sont entre le marteau et l'enclume. (...) Ils estiment devoir continuer de produire de l'uranium pour sauver la face, même si en réalité ils n'en ont pas vraiment besoin», assure le spécialiste. Reste que pour convaincre le monde de leur sérieux dans ce dossier, Téhéran a assuré que de nouvelles mesures seront prises dans 60 jours si rien n'évolue. Difficile de savoir si la marche de manoeuvre des autres signataires face aux États-Unis leur permettra de faire le geste attendu par l'Iran et son économie.