Il est abhorré des Occidentaux, accusé d'annexer les terres des uns et d'interférer dans les élections des autres. Mais en Russie, Vladimir Poutine reste un président aimé et soutenu, certain de remporter le 18 mars un nouveau mandat.
Crédité d'environ 70% d'intentions de vote par l'institut public VTSIOM, le président a selon ses détracteurs consolidé son pouvoir en plaçant les médias sous contrôle et réduit les libertés publiques au cours de ses 18 années au pouvoir.
Son principal opposant, Alexeï Navalny, a ainsi été déclaré inéligible jusqu'en 2024 en raison d'une condamnation judiciaire, orchestrée selon lui par le Kremlin.
Mais pour des millions de Russes, Vladimir Poutine est l'homme qui a ramené la stabilité après le chaos politique et économique des années 1990, et restauré l'autorité et le rôle de Moscou dans l'arène internationale, perdus après l'humiliante chute de l'URSS.
«Poutine est un miroir et chacun voit en lui ce qu'il souhaite», remarque auprès de l'AFP l'analyste politique Konstantin Kalatchev. «Pour certains, il est l'homme qui a relevé la Russie à genoux, remis à niveau l'armée et l'industrie militaire. Pour d'autres, il a élevé leur niveau de vie et s'est assuré que leurs retraites soient versées sans retard».
A l'étranger, c'est l'inverse: Vladimir Poutine apparaît souvent à la Une des journaux comme le représentant du mal absolu.
«Le fait qu'il soit considéré comme le principal ennemi de l'Occident, c'est la reconnaissance de son statut de principal homme politique», note M. Kalatchev. «S'ils ont peur de vous, c'est qu'ils vous respectent».
«Président fort' -
La réputation de Vladimir Poutine à l'étranger a été ternie par le rôle de la Russie dans le conflit ukrainien, qui lui vaut d'être sous le coup de sanctions des Etats-Unis et de l'Union européenne dès 2014.
La Russie est également régulièrement pointée du doigt pour son soutien militaire au régime syrien de Bachar al-Assad. Et la révélation d'un vaste système de dopage de ses athlètes, menant à son exclusion des JO-2018 n'a pas aidé à remonter la cote de popularité du président russe.
Aux yeux de Vladimir Poutine, tous ces reprochent montrent en réalité que l'idée d'une Russie forte gêne les Occidentaux. C'est justement avec le leitmotiv d'un «président fort pour un pays fort» que Vladimir Poutine fait campagne pour être réélu le 18 mars.
Début mars, lors d'un discours devant le Parlement, il a ainsi présenté les nouvelles armes «invincibles" de la Russie, lançant aux Occidentaux: «Ecoutez-nous maintenant!»
Le président joue le rôle de «l'axe du mal» autour duquel les Occidentaux «se consolident et se mobilisent», a déclaré avec un sourire de connivence un journaliste russe qui interrogeait le président à la télévision. «Imaginez comment ils se débrouilleraient sans vous!».
Pas de choix
Sauf énorme surprise, Vladimir Poutine obtiendra le 18 mars un quatrième mandat, le portant au pouvoir jusqu'en 2024. Son plus proche rival, selon les sondages, est le candidat du Parti communiste, le millionnaire Pavel Groudinine, qui récolte près de 8% des intentions de vote.
Poutine «exploite adroitement toutes les peurs et les complexes de la population», affirme M. Kalatchev, ajoutant que la peur principale des Russes est un retour à l'instabilité des années 1990. «Les gens ont peur de perdre ce qu'ils possèdent, et cette peur est particulièrement forte en province où la vie est difficile».
Lors de la présidentielle de 2012, Vladimir Poutine, alors Premier ministre du président Dmitri Medvedev, avait fait campagne en promettant d'améliorer le quotidien des Russes. Mais au final, son dernier mandat a été marqué par une récession économique et une baisse du niveau de vie.
Pour Alexeï Navalny, les 70% d'intentions de vote pour le président russe ne s'expliquent pas par un véritable soutien à son programme politique, mais par le sentiment qu'il n'existe pas de véritable choix.
En province, «ils se disent (...) il n'y a personne d'autre que Poutine, je vais voter pour lui!», a-t-il déclaré récemment lors d'un entretien à l'AFP.
A Moscou, pendant une manifestation de soutien au président, des partisans de Vladimir Poutine semblaient partager le même ressenti.
«Je ne vois pas d'autre candidat qui puisse être notre commandant en chef», a ainsi déclaré le cinéaste Nikita Mikhalkov devant une foule de 100.000 personnes. «C'est le seul. Poutine est notre président»