Amnesty International a épinglé mercredi la réaction "honteuse" des pays européens à la crise des migrants ainsi que la réponse "liberticide" de la France aux attentats terroristes de 2015 dans son rapport annuel sur la situation des droits de l'Homme dans le monde.
Plutôt habituée à fustiger les dictatures pour leurs abus, l'organisation cible cette année le Vieux Continent, qui "se targue d'avoir le système de protection des droits le plus sophistiqué de la planète", selon son directeur pour l'Europe John Dalhusien. "C'est toujours le cas mais les jours où on pouvait croire cela comme acquis sont révolus", a-t-il déploré devant la presse.
Salil Shetty, le secrétaire général d'Amnesty, a qualifié de "honteuse" l'attitude des pays européens face à la crise des migrants qui fuient la guerre au Proche-Orient.
A lire aussi : L'Autriche instaure un quota journalier de migrants
"L'UE, qui compte plus de 500 millions d'habitants et qui constitue l'ensemble politique le plus riche de la planète, s'est singulièrement montrée incapable d'apporter une réponse cohérente, humaine et respectueuse des droits humains", insiste Amnesty dans son rapport. "Seule l'Allemagne a fait preuve d'une volonté politique à la mesure de l'importance du problème", estime l'ONG.
"La plupart des dirigeants européens ont préféré prêter l'oreille aux discours tonitruants hostiles aux immigrés, motivés par la peur de l'insécurité et d'une perte de souveraineté nationale. Résultat: les seules mesures sur lesquelles ils ont pu s'entendre sont celles qui visaient à renforcer la "forteresse Europe", ajoute-t-elle.
La France ciblée
Amnesty critique aussi la réponse politique aux attentats sanglants qui ont frappé Paris en janvier et en novembre 2015. Selon l'organisation, ces attaques "ont donné une nouvelle impulsion en France en particulier, mais également ailleurs en Europe, à toute une série de mesures représentant une menace pour les droits humains".
Dans le cadre de l'état d'urgence décrété depuis novembre par Paris, "les autorités françaises ont, en l'espace de quelques semaines, réalisé 2 700 perquisitions sans autorisation judiciaire, qui ont débouché sur l'ouverture de seulement deux informations judiciaires en lien avec des actes terroristes". "Tout au long de l'année, elles ont initié des poursuites contre des personnes accusées 'd'apologie du terrorisme', une infraction définie en termes vagues. Dans un certain nombre de cas, ces poursuites constituaient manifestement une atteinte au droit à la liberté d'expression", ajoute l'ONG.