Après leur sommet annuel au Brésil, les dirigeants des Brics ont rendez-vous mercredi avec plusieurs chefs d'Etat d'Amérique latine, sensibles à l'alternative proposée par les puissances émergentes face à l'influence des Etats-Unis.
Un marathon de réunions attend la présidente brésilienne Dilma Rousseff et ses homologues de Russie, d'Inde, de Chine et d'Afrique du Sud, qui ont annoncé la veille la création d'une nouvelle banque de développement doté d'un capital de 50 milliards de dollars et d'un fond de réserves de 100 milliards.
Mme Rousseff a convié tous ses pairs latino-américains à une rencontre commune inédite, à Brasilia, avec ses partenaires des Brics, soulignant que l'accord conclu au sommet de Fortaleza (nord-est) concernerait aussi les "autres économies en développement".
"C'est une opportunité pour le Brésil de montrer qu'il n'est pas seulement intéressé par les Brics mais qu'il fait aussi le pari de l'intégration pour le bénéfice de toute la région", a expliqué à l'AFP Oliver Stuenkel, professeur en relations internationales à la Fondation Getulio Vargas de Sao Paulo.
Nombre d'invités ont déjà répondu à l'appel, dont la Chilienne Michelle Bachelet, l'Equatorien Rafael Correa, le Colombien Juan Manuel Santos, le Vénézuélien Nicolas Maduro ou encore l'Argentine Cristina Kirchner, qui s'est rendue dès mardi soir dans la capitale brésilienne.
La position des Brics, qui entendent faire contrepoids aux institutions comme la Banque Mondiale ou le Fond Monétaire international, séduit en particulier les autorités de Buenos Aires, plongées dans la crise de la dette, après la décision de la justice américaine en faveur des "fonds vautours".
- "Vision ouverte et généreuse" -
Lors d'une conférence de presse suivant le sommet de Fortaleza, Mme Rousseff a souligné que les Brics avaient une "vision ouverte et généreuse". "Si l'Argentine peut en bénéficier ou non, c'est un sujet que nous examinerons", a-t-elle dit.
Le chef de cabinet du gouvernement argentin, Jorge Capitanich, a qualifié le sommet de "fondamental".
"Nous avons besoin de banques de développement, érigés en outil pour financer les infrastructures, augmenter la compétitivité, et non des banques de développement pratiquant l'extorsion auprès des pays plus développés", a-t-il lancé.
Figure de la gauche latino-américaine, le président équatorien ne devrait pas lui non plus manquer l'occasion de dénoncer l'hégémonie américaine.
Avant de s'envoler pour le Brésil, M. Correa, a fustigé les dangers du "capital spéculatif", appelant à l'union régionale contre les "abus commis au détriment du peuple argentin".
Du côté des émergents, le rendez-vous de Brasilia illustre tout l'intérêt que représente l'Amérique latine, à la fois riche en matières premières et où le besoin d'infrastructures se fait fortement sentir.
Dans un entretien à l'agence Prensa Latina, le président russe Vladimir Poutine, satisfait d'avoir rompu son isolement diplomatique infligé par les Etats-Unis et l'Europe suite à la crise ukrainienne, a réaffirmé son intérêt pour "créer des alliances pleines" avec la région, mentionnant notamment les secteurs des hydrocarbures et du nucléaire civil.
La Russie envisage notamment de participer à projet de construction de la centrale nucléaire argentine Atucha III, la quatrième du pays, située dans le nord de la province de Buenos Aires.
Des rumeurs font aussi état d'une possible participation du géant gazier russe Gazprom avec Wintershall, filiale du groupe chimique allemand BASF en Argentine.
En tournée latino-américaine pour la seconde fois depuis son investiture l'an dernier, le président chinois Xi Jiping poursuit également son opération de séduction en Amérique latine, où Pékin a investi près du cinquième de ses investissements étrangers l'an dernier.
La Chine, qui est devenue le deuxième partenaire commercial de nombreux pays de la région et le premier du Brésil en 2009, devant les Etats-Unis, a prévu d'organiser jeudi à Brasilia un forum spécial avec la Celac (Communauté d'Etats d'Amérique latine et des Caraïbes).