A trois jours de l'arrivée du pape à Bethléem et Jérusalem, pèlerins, commerçants et responsables locaux mettent la dernière touche aux préparatifs, mais le cœur n'y est pas, face à la déception d'une présence aussi brève.
"Je suis heureux de la venue du pape mais aussi inquiet, je me demande s'il va faire passer un message suffisamment fort de soutien aux chrétiens palestiniens", s'interroge Louis Michel, un vendeur de souvenirs installé derrière la basilique de la Nativité de Bethléem, en Cisjordanie, lieu de naissance de Jésus, selon la tradition chrétienne.
Frustré, il attend toujours de savoir s'il aura une invitation pour la grand-messe dimanche sur la place de la Mangeoire. Un total de 9.603 tickets ont été distribués, dont 800 places assises.
Ce commerçant n'attend aucune manne économique de ce pèlerinage éclair de 48 heures, tant, dit-il, "il sera compliqué de circuler ou de prendre le temps de faire des achats". Dans sa boutique, on ne trouve d'ailleurs ni T-shirts ni bimbeloteries à l'effigie de François.
En revanche, les habitants espèrent des retombées politiques favorables.
"C'est la Palestine, où religion et politique sont interconnectées", explique la maire de Bethléem, Vera Baboun, venue surveiller l'avancée des préparatifs, confiés par la municipalité à 200 employés locaux.
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Accrochés aux façades de la place, d'immenses photomontages --juxtaposant chefs d’œuvre de la peinture religieuse baroque et images d'actualité-- dressent un parallèle saisissant entre des épisodes bibliques et le quotidien des Palestiniens: barrière de séparation, démolitions...
Les visuels ont été réalisés par le futur Musée de Palestine qui ambitionne de "faire réfléchir" sur le sort de la minorité chrétienne sous l'occupation israélienne.
Dans une lettre au pape François, un dirigeant palestinien emprisonné en Israël, Marwan Barghouthi, souligne que "pendant l'apartheid en Afrique du Sud, l'Eglise a joué un rôle essentiel en mettant son énorme poids moral dans la fin de l'apartheid. Nous sommes confiants que cette voix morale contribuera à la fin de l'occupation".
Condamné à perpétuité pour son implication dans la deuxième Intifada (2000-2005), Marwan Barghouthi prévient, dans cette missive dont l'AFP a obtenu copie, que "s'il est permis à Israël d'y continuer ses actions, Jérusalem deviendra la ville éternelle de la guerre", et non de la paix comme le signifie son nom en hébreu.
- 'Communauté fantôme' -
Dans le quartier chrétien de la Vieille ville de Jérusalem, les décorations de bienvenue se font plus discrètes que les amas de barrières métalliques disposées par la police israélienne qui craint que des extrémistes juifs ne tentent de perturber la visite papale.
"Ils disent que c'est sécuritaire, mais c'est surtout politique, les Israéliens veulent donner l'impression au pape que nous sommes une communauté fantôme", déplore Elias, propriétaire d'une épicerie à l'intérieur des remparts.
La police israélienne va mobiliser 8.500 agents, un dispositif baptisé "Opération soutane blanche".
De l'autre côté de la rue, dans son bureau de l'institut pontifical Notre-Dame de Jérusalem, le frère Pietro Felet, secrétaire général de l'Assemblée des évêques catholiques de Terre sainte, s'occupe d’accueillir les membres de la délégation papale qui commencent à affluer.
"C'est ma quatrième visite avec un souverain pontife à Jérusalem, alors je n'ai plus de quoi céder à la +papolâtrie+. De toute façon, je n'ai pas le temps, j'ai trop de travail", confesse-t-il griffonnant une liste d'arrivants.
"Celui-là, on lui avait pris une place pour la rencontre œcuménique au Saint-Sépulcre (point d'orgue de la visite du pape, NDLR) et il ne viendra même pas pour le pèlerinage!", peste-t-il.
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Le pape François, qui s'est forgé une réputation d'homme simple, passera son unique nuit à Jérusalem dans la résidence du délégué apostolique du Vatican pour Jérusalem et la Palestine.
"Ce que je peux vous dire, c'est que peu importe l’intérieur, ce que le pape appréciera le plus c'est la vue de l’extérieur", glisse l'un des responsables du lieu.
De ce bâtiment en pierre blanche sur la pente du Mont des Oliviers, à Jérusalem-Est, entouré de jardins en terrasse, il pourra contempler un panorama de 360° sur la Ville sainte avec, au loin, le mur de béton gris qui isole Jérusalem de la Cisjordanie.