Le président nigérian Goodluck Jonathan se rendra vendredi à Chibok, la petite ville du nord-est du Nigeria où le groupe islamiste armé Boko Haram a enlevé plus de 200 lycéennes, son premier geste politique fort alors que les Etats-Unis critiquent durement sa gestion de la crise depuis un mois.
Après une réunion avec les chefs de l'armée et des services de sécurité, les députés nigérians ont approuvé jeudi soir à l'unanimité la prolongation de l'état d'urgence déjà en vigueur depuis un an dans les trois Etats du nord-est du pays, principaux théâtres de l'insurrection de Boko Haram.
Le Sénat devra à son tour se prononcer mardi sur cette prolongation de six mois réclamée par le président.
Après sa visite à Chibok, M. Jonathan se rendra à Paris pour participer samedi au sommet international convoqué à l'initiative de la France pour dessiner une stratégie de lutte globale contre Boko Haram.
Alors que les 223 lycéennes sont retenues depuis plus d'un mois par le groupe islamiste radical, une source à la présidence a annoncé jeudi soir que Goodluck Jonathan se rendra ce vendredi à Chibok, petite ville de l'Etat de Borno, fief historique de Boko Haram, avec les Etats voisins de Yobe et d'Adamawa placés sous état d'urgence.
Cette visite apparaît comme le premier geste politique fort dans cette crise du président Jonathan, critiqué tant dans son pays par l'opposition, la société civile et les familles des victimes, que sur la scène internationale, notamment aux Etats-Unis.
De fait, c'est seulement à la suite de la diffusion le 5 mai d'une vidéo d'Abubakar Shekau, le chef de Boko Haram, menaçant de traiter les lycéennes kidnappées comme des "esclaves", qui a soulevé une indignation mondiale et provoqué la réaction de Barack Obama, que le pouvoir nigérian a semblé s'émouvoir du sort des jeunes filles.
"En dépit des offres d'assistance des Etats-Unis et d'autres partenaires internationaux, la réponse du gouvernement nigérian à cette crise a été d'une lenteur tragique et inacceptable", a tonné jeudi Robert Menendez, président de la commission des Affaires étrangères du Sénat américain.
- Encore deux écoles incendiées -
Washington est en pointe dans la mobilisation mondiale en faveur des jeunes Nigérianes kidnappées : ils ont dépêché au Nigeria une trentaine d'experts civils et de militaires, ainsi que des drones et des avions de surveillance qui survolent le nord-est du pays pour recueillir du renseignement.
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Les Etats-Unis considèrent le géant d'Afrique de l'Ouest comme un "partenaire stratégique" et s'alarment, avec la France, de la menace régionale que pose Boko Haram, inscrit depuis novembre 2013 sur leur liste noire des "organisations terroristes étrangères". Ils offrent une prime de 7 millions de dollars pour la capture d'Abubakar Shekau.
Deux écoles ont encore été incendiées dans deux villages du nord du Nigeria, a indiqué jeudi la police, selon un mode opératoire habituel à Boko Haram, qui condamne comme un "péché" l'éducation occidentale, en particulier pour les filles. Le groupe a attaqué ces dernières années des centaines d'écoles, n'hésitant pas à massacrer élèves et étudiants.
Par ailleurs, un des cerveaux présumés de l'attentat du 14 avril à Abuja, revendiqué par Boko Haram et qui avait fait 75 morts dans une gare routière, a été arrêté au Soudan. Il s'agit d'Aminu Sadiq Ogwushe, né en Grande-Bretagne, interpellé alors qu'il demandait un visa à l'ambassade de Turquie de Khartoum, au Soudan, a rapporté une source proche du dossier à l'AFP. Cinq hommes avaient déjà été arrêtés cette semaine en lien avec cet attentat, le plus meurtrier jamais perpétré à Abuja, mais les deux cerveaux étaient en fuite.
C'est pour définir une stratégie de lutte globale contre le groupe islamiste que se réuniront samedi à Paris les dirigeants des Etats de la région (Nigeria, Cameroun, Niger, Tchad, Bénin) autour du président français François Hollande, et avec des représentants des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et de l'Union européenne.
Pour Paris, il s'agit d'encourager les pays de la sous-région à coopérer avec Abuja dans la lutte contre Boko Haram et "voir comment les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France peuvent apporter leur soutien".