L'armée syrienne a subi samedi une nouvelle attaque rebelle meurtrière dans le sud du pays, au moment où le Conseil national syrien (CNS) devait se prononcer à Doha sur un projet visant à fédérer l'opposition au président Bachar al-Assad.
Au moins 20 soldats de l'armée régulière ont été tués dans l'explosion de deux voitures piégées dans l'enceinte d'un club d'officiers de Deraa, a déclaré à l'AFP le président de l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane.
L'agence officielle Sana a confirmé l'explosion de deux voitures à Deraa, faisant état de victimes.
Entre-temps, dans le nord-est du pays, le régime perdait de plus en plus de terrain. Des combattants kurdes ont pris le contrôle dans la nuit de vendredi à samedi de deux villes, selon l'OSDH et des militants.
Des combattants du Comité de protection du peuple kurde "ont pris le contrôle de Derbassiyé et de Tal Nemer, après avoir encerclé pendant de longues heures les deux QG de la police et des sièges des renseignements des militaires et de la sécurité de l'Etat dans la province de Hassaka", a déclaré à l'AFP Rami Abdel Rahmane.
Non loin de là, les rebelles s'étaient emparés de leur côté de la ville de Rass al-Aïn, qui compte un poste-frontière piétonnier ouvert occasionnellement, après des combats féroces avec les forces du régime, d'après l'OSDH et des militants.
Dans le reste du pays, combats et bombardements se poursuivaient, notamment dans la province de Damas, théâtre d'intenses affrontements depuis plusieurs jours et où des renforts de l'armée ont été envoyés, selon l'OSDH.
Nouvelle réunion de l'opposition prévue à Doha
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Signe que les violences redoublent en intensité, 11.000 Syriens ont fui leur pays, dont 9.000 qui se sont réfugiés en Turquie, en l'espace de 24 heures, a indiqué vendredi Panos Moumtzis, responsable du Haut Commissariat de l'ONU aux réfugiés. Habituellement, quelque 2.000 nouveaux réfugiés syriens sont dénombrés chaque jour.
Le nombre total de réfugiés dans les quatre pays voisins de la Syrie (Turquie, Liban, Jordanie et Irak) s'élève à plus de 408.000, a-t-il précisé.
Pour sa part, le directeur de l'Office de l'ONU pour l'aide humanitaire, John Ging, a estimé que quatre millions de Syriens auraient besoin d'aide début 2013, un chiffre "en hausse par rapport aux 2,5 millions (jusque-là estimés)".
Alors que le conflit a fait plus de 37.000 morts en près de 21 mois et qu'aucune issue à la crise n'est en vue, le président Assad a mener une "guerre contre le terrorisme" et prôné un règlement par les urnes, dans un entretien à une chaîne russe.
De son côté, l'opposition, appelée par les pays arabes, les puissances occidentales et les rebelles sur le terrain à s'unifier, discute depuis jeudi à Doha sous l'égide du Qatar et de la Ligue arabe, un projet visant à la fédérer.
Le CNS, réservé sur cette initiative, a demandé à deux reprises un délai pour annoncer sa décision finale, arguant notamment qu'il devait d'abord élire son nouveau président.
Le chrétien Georges Sabra, un ancien communiste de 65 ans, a finalement été élu vendredi soir à la tête du CNS, une instance considérée aux premiers temps de la révolte par la communauté internationale comme un "interlocuteur légitime" mais ensuite vivement critiqué, notamment par l'administration américaine, pour son manque de représentativité.
Un groupe de militants quitte le CNS
L'initiative sur la table est largement inspirée d'un plan de l'opposant Riad Seif, prévoyant la formation d'une instance politique unifiée d'une soixantaine de membres représentant les différentes formations dont les groupes civils animant le soulèvement de l'intérieur et les formations militaires.
Cette instance doit à son tour constituer un gouvernement transitoire de dix membres, un conseil militaire suprême pour chapeauter les groupes armés, et un organe judiciaire.
Le CNS devait tenir une conférence de presse samedi et soumettre lors d'une nouvelle réunion élargie dans l'après-midi sa propre initiative, selon une source au sein du CNS.
Les Comités locaux de coordination (LCC), un important réseau de militants animant la révolte sur le terrain en Syrie mais ne disposant d'aucun représentant dans la nouvelle direction du CNS, élue cette semaine, ont claqué vendredi la porte de cette instance, accusant les Frères musulmans d'en avoir pris le contrôle.
Alors qu'ONG locales et internationales dénoncent régulièrement les "crimes" du régime, l'ex-procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Luis Moreno-Ocampo, a suggéré vendredi d'émettre un mandat d'arrêt international contre le président Assad afin de mettre un terme à la guerre civile en Syrie, estimant qu'il y aurait un "dossier solide" contre lui.