Antonio Herder a presque tout perdu dans l'incendie qui a fait rage pendant trois jours dans le nord-est de l'Espagne: son camping de sept hectares et ses 70 bungalows. "La vie continue", assure-t-il pourtant en contemplant l'étendue calcinée et les décombres.
Dans la région de l'Alt Emporda, dévastée par les flammes, les habitants qui avaient fui rentrent chez eux pendant que les pompiers maîtrisent les derniers foyers.
Certains ont perdu leur maison, d'autres leur bétail. Quatre personnes sont mortes et 14.000 hectares de végétation ont été réduits à l'état de cendres.
Antonio et son épouse Mercedes ont perdu leur camping situé à une quinzaine de kilomètres du départ du feu, à la limite entre la France et l'Espagne.
"Cela a été très rapide, en trois heures le feu est arrivé de la frontière jusqu'ici", se souvient Antonio, un Néerlandais de 69 ans, installé en Espagne depuis 40 ans. Il y a 12 ans, il a ouvert ce camping, "Les Pedres", dans le village de Capmany.
"Nous avons tout perdu. Toute notre vie était là", confie Mercedes, les yeux fixés sur l'amas de ferraille, tout ce qui reste des bungalows et des caravanes. Le couple évalue ses pertes à deux millions d'euros.
Mais Antonio ne veut pas céder à l'abattement. Il a déjà appelé à la rescousse électriciens et plombiers, pour remettre sur pied l'installation.
"La mairie va nous donner une autorisation pour couper tous ces arbres, et je vais transformer tout cela en un espace vert", affirme-t-il en désignant les squelettes calcinés de ce qui fut un bois de pins et de chênes verts.
"Nous devons tout relancer", ajoute-t-il, en espérant "pouvoir ouvrir à nouveau en septembre".
Un objectif qui paraît impossible au vu de ce paysage de désolation. Tordus par le feu, des voitures, des armatures de caravanes, des restes de meubles, de cuisines, de machines à laver, même des bonbonnes de butane, jonchent le terrain.
"Il ne reste rien. Tout a été détruit", affirme Alan, un Britannique de 61 ans qui a l'habitude de passer ses étés à "Les Pedres". Aujourd'hui, il est venu donner un coup de main à Antonio.
"J'ai perdu mon bungalow. Il ne me reste rien. Je n'ai que le linge que je porte sur moi, plus ce que j'ai acheté hier", explique-t-il.
Pourtant, au milieu des cendres et des débris, trône une caravane blanche et solitaire.
"Elle est restée intacte, comme si elle était neuve", s'exclame Alan, qui s'efforce de colmater une fuite d'eau dans un tuyau percé.
A côté de la caravane miraculeusement préservée, Elena Walkley, sa propriétaire, est perplexe.
Elle et son mari Mikel ont été évacués dimanche avec 50 ou 60 vacanciers qui se trouvaient dans le camping quand les flammes se sont approchées dangereusement.
"Quand finalement nous nous sommes arrêtés, nous avons regardé en arrière, nous avons vu que c'était devenu un incendie très grand", se souvient cette Ecossaise de 67 ans. "Le sol avait une teinte rouge brillante et le ciel était de plusieurs couleurs, pourpre, orange, et là-bas il y avait de la fumée noire, très noire."
D'autres campeurs, surtout des Britanniques, Allemands et Néerlandais, étaient sortis au moment de l'évacuation et n'ont pu revenir que deux jours plus tard, pour découvrir qu'ils avaient tout perdu.
"Quand nous sommes revenus, j'ai pris peur, à cause de l'énormité de ce qui s'était passé", raconte Elena, qui n'en revient toujours pas. "Plus de 70 caravanes et bungalows étaient partis en fumée, transformés en métal tordu et là il y avait la nôtre."
"La télévision est à sa place, même les livres sont là, près du lit où nous lisions. Je ne sais pas ce qui s'est passé. C'est plus que de la chance", ajoute-t-elle.
Antonio n'a pas eu cette chance. "Mais je ne veux pas me plaindre", dit-il. "Il faut faire tout ce qui est possible pour qu'il puisse redémarrer son affaire", ajoute Alan, à côté de lui.