Le Premier ministre roumain Victor Ponta, accusé de violer l'Etat de droit dans son pays, était sur le gril jeudi à Bruxelles, où il poursuivait sa campagne d'explication auprès des responsables de l'UE pour éviter des mesures de rétorsion.
Il devait être reçu en début d'après-midi par le président du Conseil de l'Union européenne Herman van Rompuy, puis immédiatement après par le président de la Commission européenne José Manuel Barroso.
Les deux dirigeants européens se sont déclarés "très préoccupés" par "les actions qui semblent destinées à limiter les pouvoirs d'institutions indépendantes comme la Cour constitutionnelle".
"Le Président Barroso va écouter les explications de M. Ponta sur l'Etat de droit et le respect de l'indépendance de la Justice", ont expliqué jeudi ses services.
Mais la tonalité était très dure à la Commission avant la rencontre. Victor Ponta ne convainc pas et sous couvert de l'anonymat, des membres de l'exécutif bruxellois dénoncent un "coup d'Etat" constitutionnel en Roumanie.
En l'espace d'une semaine, la majorité parlementaire de centre gauche a en effet réussi à suspendre de ses fonctions le président Traian Basescu, son principal rival politique (centre droit) après avoir réduit par décret les pouvoir de la Cour Constitutionnelle et remplacé par surprise le médiateur, seul habilité à contester les décrets du gouvernement.
La destitution de Traian Basescu ne sera définitive que si elle est validée le 29 juillet par un référendum, dont les conditions d'organisation suscitent déjà la controverse.
La Commission, gardienne des traités européens, veut marquer sa désapprobation. Elle devrait dans un premier temps décider de prolonger le mécanisme de coopération et de vérification (MCV, nom donné à la surveillance exercée par l'UE pour vérifier les progrès de la Roumanie dans le respect de l'Etat de droit, ndlr).
La mesure est préconisée par la Commissaire en charge de la Justice, Viviane Reding. Elle devrait être décidée lors de la prochaine réunion de l'exécutif bruxellois le 18 juillet, après la publication le rapport sur l'Etat de droit en Roumanie et en Bulgarie, cinq ans après l'adhésion de ces deux anciens pays communistes à l'UE, a-t-on appris jeudi de source communautaire.
Viviane Reding a rencontré mercredi le ministre roumain de la Justice Titus Corlatean pour préparer la rencontre entre MM. Ponta et Barroso. A l'issue de cette rencontre, M. Corlatean a dit s'attendre à la prolongation de la mise sous surveillance de son pays.
Le rapport de la Commission va influer sur l'entrée de la Roumanie dans Schengen, l'espace sans visas qui réunit actuellement 22 des 27 membres de l'UE. Et il aura également des conséqictor Pontauences pour la Bulgarie, car les adhésions des deux pays sont liées.
"Au départ il était très favorable à la Roumanie, mais tout a changé depuis", a confié à l'AFP une source proche du dossier.
Le gouvernement néerlandais, qui bloque le processus, décidera en septembre sur la base de ce rapport s'il lève ses réserves. Or l'unanimité des Etats membres est nécessaire pour de nouvelles adhésions à Schengen.
Victor Ponta souffle le chaud et le froid. Il a renouvelé jeudi sa volonté de se plier aux demandes de Bruxelles et s'est dit prêt à "agir immédiatement" si les décisions prises pour destituer le chef de l'Etat "ne correspondent pas aux critères européens" au cours d'un point de presse organisé avant ses rencontres avec Herman van Rompuy et José Manuel Barroso.
Mais dans le même temps, il a dénoncé la "propagande politique", y compris "au niveau européen".
"Lier l'accession à Schengen à une bataille politique qui va être résolue par le peuple roumain est quelque chose qui n'est pas juste et qui j'espère ne se produira pas", a-t-il dit.