Les industriels européens de l'armement ont repris espoir de construire ensemble un drone de surveillance, alors qu'un projet franco-britannique prenait un coup dans l'aile mardi au salon aéronautique de Farnborough.
Au sein du groupe européen EADS comme chez l'Italien Finmeccanica, l'idée d'une coopération européenne pour produire un drone MALE (moyenne altitude, longue endurance) pour les armées européennes revient en force.
Se méfiant des grands projets intergouvernementaux, Paris et Londres s'étaient engagés l'année dernière dans une coopération bilatérale, décidant de confier au Britannique BAE Systems et au Français Dassault Aviation le développement d'un drone MALE à l'horizon 2020.
Mais les contrats n'ont toujours pas été signés et BAE, qui avait espéré conclure au salon de Farnborough, a annulé une conférence de presse mardi.
Dassault, qui propose de développer pour l'armée française un drone "intermédiaire" pour faire la soudure jusqu'à l'arrivée du drone franco-britannique, attend lui aussi confirmation de cette commande. Il s'est refusé à tout commentaire.
C'est que le nouveau ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian a décidé de "remettre ce dossier à plat" et cherche à relancer la coopération européenne en matière de défense, notamment avec l'Allemagne et l'Italie.
M. Le Drian en dira peut-être plus à Londres, où il est attendu le 24 juillet. Il viendra "pour approfondir encore nos relations sur les perspectives de coopération militaire, notamment concernant les drones..." a déclaré mardi le président français François Hollande, lors d'une visite dans la capitale britannique.
EADS, dont les drones Harfang équipent l'armée française, attend désormais une prolongation du contrat de support de ces engins qui expire en octobre 2013 et espère être chargé de les moderniser. "Je pense que ça va arriver", a déclaré un responsable du groupe sous le couvert de l'anonymat.
Il est moins sûr en revanche de se voir confier le développement d'un drone intermédiaire, d'autant que les militaires français préfèreraient acheter des drones américains, plus performants et déjà en service chez leurs homologues britanniques et italiens.
Mais à l'horizon 2020, gouvernements et industriels se rejoignent sur l'intérêt de développer un avion sans pilote européen, estime-t-on chez EADS comme chez Finmeccanica, le conglomérat italien de l'armement.
Alenia Aermacchi, filiale aéronautique de Finmeccanica, a déclaré à l'AFP "soutenir pleinement une alliance européenne dans le secteur des avions sans pilote". "Seule une large coopération permettra à l'industrie européenne de préserver savoir faire et capacités technologiques", a souligné le constructeur.
"Le ministre français a compris très rapidement que si on pouvait se le permettre, il fallait faire un drone européen", a estimé le responsable d'EADS.
Les pays européens, selon lui, conviennent de l'absurdité d'avoir des programmes de drones concurrents et se rapprochent sur la définition des besoins. "Les esprits sont prêts; je ne suis pas sûr que les portefeuilles le soient", reconnaît-il pourtant.
"Nous sommes confiants de trouver d'ici peu une solution européenne globale", assure Stefan Zoller, directeur de la branche défense d'EADS dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung de mercredi. "A la fin de l'année, début 2013 nous connaîtrons une percée", prévient-il.
En attendant, EADS a consolidé ses positions pour revenir dans la course aux drones après en avoir été écarté au profit de Dassault.
Le groupe a ainsi racheté récemment la filiale drone de l'Allemand Rheinmetall. Cette filiale, Rheinmetall Airborne systems, fournit des petits drones tactiques KZO à l'armée allemande et exploite pour elle des drones MALE de fabrication israélienne, Heron-1, dont elle a besoin en Afghanistan.
EADS fait valoir qu'après ce rachat il est désormais le seul à équiper avec des drones opérationnels les armées françaises et allemandes. L'Italie et la Grande-Bretagne sont équipées des "Reaper" américains.